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MCCXXXV

Rémission en faveur de Guillaume Mandart, de Champigny-le-Sec, qui, douze ou treize ans auparavant, attaqué la nuit dans sa maison par une bande d’hommes armés le menaçant de mort, avait tué l’un des agresseurs.

  • B AN JJ. 185, n° 297, fol. 206
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 32, p. 321-324
D'après a.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Guillaume Mandart, povre homme, laboureur de braz, natif et demourant ou bourg de Champaigné le Sec en la chastellenie de Mirebeau, aagé de quarante cinq ans ou environ, chargié de femme et de quatre filles, dont il en y a deux prestes à marier, contenant que, douze ou treze ans a ou environ, à ung jour de feste de saint Jaques et saint Phelipe, ung nommé Loys Pouvereau1, Jehan Paluau, Pierre Brun, le bastart Mautaint, le bastart Chauderon, ung nommé Jehannin, serviteur dudit Loys Pouvereau, et autres jusques au nombre de huit ou neuf, vindrent aussi comme environ neuf heures de nuit, à l’ostel du père dudit suppliant où icellui suppliant et son dit père avec leur mesnage demouroient, et monta ledit Loys Pouvereau par dessus la muraille de la court ou bail dudit hostel, pour ce que la porte ou entrée de la dicte court ou bail estoit fermée, et ouvrit icelle porte à ses compaignons, lesquelz entrèrent au dedans et s’en allèrent avec ledit Loys à l’ostel dudit suppliant et de sondit père, [p. 322] et frappèrent à la porte. Et lors ledit suppliant demanda qui ce estoit. Lequel Pouvereau luy respondy qu’il le sauroit bien tantost ; et incontinant commencèrent ledit Pouvereau et autres dessusdiz à frapper contre ladicte porte. Lequel suppliant s’escria tant qu’il pust : A l’aide et au murtre. Et tantost ledit Paluyau monta sur ladicte maison et commença à descouvrir pour vouloir entrer dedans. Et ledit Pouvereau et autres dessusdiz rompirent de la muraille de ladite maison et dirent audit suppliant qu’ilz le feroient mourir avant qu’ilz partissent d’ilec, et ledit Paluyau qui estoit sur ladicte maison lui dist aussi qu’il mengeroit de sa fressure, avant qu’il partist de la place. Et ce fait, commencèrent à tirer viretons les ungs avec arbalestres qu’ilz avoient apportées et les autres à gecter pierres, telement qu’ilz en frappèrent d’une la mère dudit suppliant par la teste, dont elle fut moult longuement malade. Et pour ce qu’ilz ne cessoient de gecter pierres et tirer viretons, icellui suppliant prinst une sienne arbalestre qu’il avoit et tousjours a eu et tenu, pour la tuicion et deffense de la forteresse dudit lieu de Champaigné le Sec, et tira contre les dessuz diz dix ou douze materaz qu’il avoit. Et quant ledit suppliant vit que lesdiz Pouvereau et autres dessus diz ne cessoient point de tirer lesdiz viretons et gecter lesdictes pierres, et aussi qu’ilz avoient jà descouvert et rompu deux travées de ladicte maison, icellui suppliant print ung vireton et le tira contre ledit Paluau qui estoit dessus ladicte maison, lequel Paluau cheut incontinent de dessus icelle maison à terre en ladicte court, et tantost après les dessus diz le prindrent et l’en emmenèrent à l’ostel dudit Pouvereau. Et ilec dist et confessa icellui Paluau à pluseurs que ledit suppliant lui avoit fait ce qu’il lui vouloit faire et qu’il luy eust faict, s’il ne se fust deffendu ; et de là à quatre ou cinq jours après, ala ledit Paluyau de vie à trespassement. Et pour ce qu’il estoit tout notoire que les dessus diz avoient ainsi assailli le dit suppliant [p. 323] et qu’ilz avoient disposé de l’occire, la justice dudit lieu de Mirebeau demoura par certain temps sans en faire poursuite contre icellui suppliant ; et après fut prins et mis en prison audit lieu de Mirebeau, où il fut par aucun temps detenu. Et pour ce qu’il disoit et dist aux officiers dudit lieu qu’il avoit bonnes justificacions et leur remonstra le cas estre tel que dessus est dit, iceulx officiers de Mirebeau se informèrent sur icelle et trouvèrent que la verité du cas estoit telle que ledit suppliant leur avoit dit et qu’il l’avoit fait en soy defendant ce qu’il avoit fait. Et à ceste cause, fut ledit suppliant eslargy et mis hors des dictes prisons. Et lui fut ordonné qu’il feroit ses ediz publiquement, pour faire adjourner les parens et lignagiers dudit Paluyau, et tous autres qui pourroient avoir sur ce interest. Et lesquelz ediz il a faiz faire bien et solempnelement par quatre foiz, ainsi qu’il est acoustumé. Mais il n’est venu homme ne femme qui ait riens voulu dire ne poursuir contre ledit suppliant. Et à ceste occasion, l’a tenu tousjours en procès le procureur de ladicte court de Mirebeau depuix l’an mil iiiicxlv. jusques à present, et doubte ledit suppliant, qui en tous autres cas s’est bien et doulcement gouverné, sans avoir esté actaint ne convaincu d’aucun vilain cas, blasme ou reprouche, que la justice dudit lieu de Mirebeau vueille tendre à le faire pugnir corporelement ou autrement proceder contre lui par voye extraordinaire, se sur ce ne luy estoient noz grace et misericorde impartiz, humblement requerant iceulx. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, audit suppliant ou cas dessus dit, et en faveur de sesdiz femme et enfans, avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au bailli de Touraine, des ressors et exempcions d’Anjou et du Maine, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Jazenueil, ou mois de may l’an de grace mil cccc. cinquante trois, et de nostre règne le xxxie.

[p. 324] Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du conseil. Rippe. — Visa. Contentor. P. Aude.


1 Louis Pouvereau tenait, en 1438, des terres et pré à la Belletière, près Champigny-le-Sec, à dix sous de devoir, aux aides et aux gardes, et ses héritiers les possédaient en 1508. Dans un texte de 1452, il est dit écuyer, seigneur de la Boirie à cause de sa femme, Marie Chevaleau, et propriétaire de l’hôtel du Pressoir, mouvant de Champigny. (E. de Fouchier, La baronnie de Mirebeau, etc., 1877, in-8°, p. 133, 134.) On trouve encore, aux dates des 2 juin 1453 et 20 mai 1462, deux aveux au nom de Louis Pouvreau, écuyer, seigneur de Laugerie, pour les passage, péage et péagerie de Jazeneuil. (Arch. nat., P. 1145, fol. 72 v°, 123.)