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DCI

Lettres de rémission en faveur de Colin de Landelles, de Charroux, qui avait mis dans la circulation en Poitou des monnaies par lui rapportées d’Orange. Cependant il devra rester en prison pendant trois mois, au pain et à l’eau.

  • B AN JJ. 110, n° 82, fol. 48
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 1-3
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté signifié par Colin de Landelles, demourant à Charros, ou païs de Poitou, que, comme pour cause de ce que par noz ennemis il avoit esté prins pluseurs foiz et par pillars et autres mauvaises genz desrobez souventes foiz, dont il a esté et estoit tellement dommagiez qu’il en estoit devenuz à pouvreté, et par ainsi lui consideranz qu’il estoit en telle misere, par induction et admonition d’autrui, eust depuis un an ença empruntez iiiixx frans d’or pour mettre et convertir en marchandises, dont il avoit acoustumé soy entremettre, et se fust transporté ou païs d’Orenge et environ, pour emploier la dicte somme de iiiixx frans d’or et en avoir blans et autre monnoie, qui illec avoient [p. 2] cours, la quelle il apporta ou dit païs de Poitou et environ en nostre royaume, et d’icelle fist satisfacion et paiement à ses crediteurs, aus quelx il estoit tenuz pour les diz iiiixx frans et autrement ; et pour ce il ait esté molesté moult grandement, priz et detenuz en prison par les genz et officiers de nostre amé et feal cousin le conte de la Marche1, combien que à eulx n’en appartenist la cognoissance, et encores doubte d’en estre poursui et molesté par noz genz et officiers, se par nous ne lui est sur ce pourveu de nostre grace, si comme il dit. Sur quoy nous a fait très humblement supplier. Pour quoy nous, eue consideracion aus choses dessus dictes, et que le dit Colin ne fu onques mais approchiez, diffamez ne convaincuz d’aucun autre crime ou meffait, mais est de bonne vie et honneste conversacion, et que l’une partie de la dicte monnoie avoit et a commun cours ou dit païs de Poitou, ainsi que l’en dit, à ycellui ou cas dessuz dit avons remis, quictié et pardonné, quictons, remettons et pardonnons, de certaine science, grace especial, auctorité et plaine puissance royal, le fait dessuz dit et tout ce qui s’en est ensui, avecques toute peinne, amende et offense corporelle, criminelle et civile, en quoy il puet estre encouru ou avoir commis envers nous, comment que ce soit, pour la causse dessus dicte, en le remettant et restablissant, se mestier est, à sa bonne fame et renommée, se pour ce sont amenries, et à ses biens, pourveu que à ceulx qui auroient eu ou soustenu aucun dommaige, pour cause de la dicte monoie, soit faicte [p. 3] satisfacion, ainsi que de raison appartendra, s’il est aucun qui en vueille faire poursuite ; et que le dit Colin, pour en avoir en partie aucune punicion, demeure de fait en noz prisons ou dit païs, telles comme nostre bailli des Exempcions d’Anjou, de Touraine et de Poitou lui ordenera, continuelment par l’espace de trois mois, à compter du jour qu’il y entrera pour ce fait, sanz avoir pour son vivre aucune administracion que pain et eaue tant seulement, le dit terme durant. Si donnons en mandement à nostre dit bailli des Exempcions dessuz dictes et à touz noz autres justiciers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que ou dit cas ilz facent, seuffrent et lessent le dit Colin joir et user paisiblement de nostre presente grace et remission, sanz le molester ou souffrir estre empeschié ou molesté, en corps ne en biens, ores ou pour le temps avenir, aucunement au contraire. Et se aucuns de ses biens estoient pour ce prins, saisiz ou empeschiez, si les lui mettent ou facent mettre sanz delay à plainne delivrance. Et afin que ce soit ferme et estable chose à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Paris, en nostre chastel du Louvre, le xxiiiie jour de janvier l’an de grace mil ccc. lxxvi, et le xiiie de nostre regne.

Par le roy. J. Tabari.


1 Jean Ier de Bourbon, second fils de Jacques Ier comte de la Marche, et de Jeanne de Châtillon-Saint-Pol. Son père et son frère aîné, Pierre, étant morts des suites de blessures reçues à la bataille de Brignais (6 avril 1362), il devint comte de la Marche. Catherine de Vendôme, qu’il avait épousée le 28 septembre 1364, le rendit père de six enfants, trois fils : Jacques II, comte de la Marche ; Louis de Bourbon, tige des comtes de Vendôme ; Jean, qui a fait la branche des seigneurs de Carency ; et trois filles dont l’aînée, Anne, fut mariée à Jean comte de Montpensier, fils de Jean duc de Berry, comte de Poitou. Jean Ier comte de la Marche mourut le 11 juin 1393.