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DCXLIII

Lettres de rémission en faveur d’Aymar Malemain, impliqué dans l’assassinat d’André de Parthenay, commis par le beau-père de celui-ci, Perrot Loyau, écuyer, et son beau-frère, Gillet Loyau.

  • B AN JJ. 119, n° 154, fol. 101
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 164-166
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir esté exposé de la partie de Aymart Malemain, contenant que, comme ou moys de juing derrenierement passé Perrot Loya1, escuier, demourant en la parroisse Saincte Gemme en Poitou, qui nagueres avoit marié une sienne fille appellée Jeanne Loyelle, à André de Pertenay2, se fust transporté en l’ostel du dit exposant quí estoit son voisin à moins d’une lieue, et lui eust dit qu’il estoit mal content et courroucié contre le dit de Partenay, son gendre, pour ce qu’il menoit trop dure vie à sa dicte fille, qui estoit et est jeune damoiselle de bon lignaige et de bonne vie et renommée, et nouvellement mariée au dit André, et qu’il la batoit et deschassoit moult inhumainement, de quoy il estoit commune renommée au pays, et aussi eust le dit Perrot prié moult affectueusement au dit exposant que il lui feist compaignie à aler à Coulonges, où demouroit le dit de Partenay, son gendre, pour ycellui blasmer, se il le trouvoit, et le induire à ce que sa dicte [p. 165] femme il voulsist traictier amiablement, ainsi que il appartenoit. Le quel exposant, meu d’amour et affection que il avoit au dit Perrot, son voisin, desirans aussi de mettre à bonne paix et accort les diz mariez, s’en ala avec ycellui Perrot, un baston en sa main, pour ce que c’estoit environ un quart de lieue loins de son hostel, sanz ce toutesvoies que il eust entencion de en faire aucun mal. Et ainsi que il furent là venus, il trouverent le dit André hors de son hostel, le quel le dit Perrot Loya et un sien filz nommé Gilet, qui survint à l’eure, il ferirent et batirent en tele maniere que mort s’en ensuy en sa personne. Pour quoy les diz Perrot et Gilet, son dit filz, furent prins et emprisonnez. Et combien que le dit exposant ne ferist ne ne touchast le dit de Partenay, ne ne lui fist autre chose que dit est, et que au dit Perrot il ne donnast conseil, confort ou ayde autrement que dit est, mais tantost que il vit la maniere du dit fait, s’en retourna en son dit hostel tout doulent, couroucié et effreé de ce ; toutes voies, jà soit ce que partie adverse ne lui en demande riens, le dit exposant, doubtant rigueur de justice, mesmement que on dit que le dit Gilet lui impose que il fery le dit André i. cop du dit baston, n’ose bonnement demourer ou pays et se doubte que justice ne procede rigoreusement à l’encontre de lui, se par nous ne lui est sur ce impartie nostre grace et misericorde, si comme il dit. Si nous a humblement fait supplier que, comme il ne soit autrement coulpable du dit fait que dit est, et aussi que tousjours il ait esté et encores est de bonne vie et renommée, sans avoir esté reprins ou diffamé d’aucun meffait, nous lui vuillions sur ce impartir nostre dicte grace et misericorde. Pour quoy nous, eue consideracion aux choses dessus dictes, avons au dit Aymart Malemain, ou cas dessus dit, quittié, remis et pardonné, quittons, remettons et pardonnons, de grace especial, plainne puissance et auctorité royal, par ces presentes, toute paine, amende et offense corporelle, criminele [p. 166] et civile, et tout ce en quoy il puet estre et avoir encouru pour cause de ce ; et l’avons restitué et restituons à sa bonne fame et renommée, au payz et à ses biens. Et sur ce imposons silence perpetuel à nostre procureur. Sauf et reservé le droit de partie adverse à poursuir civilement tant seulement, se aucun y a qui à l’encontre du dit Aymart en vuille faire poursuite. Si donnons en mandement, par la teneur de ces presentes, au gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieux tenans, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que le dit Aymart Malemain facent, sueffrent et laissent joir et user paisiblement de nostre presente grace et remission, et contre la teneur de ces presentes ne le molestent, traveillent ou empeschent, facent, sueffrent ou laissent estre molesté, traveillié ou empeschié en corps ou en biens, en aucune maniere ; mais se son corps estoit pour ce prins ou emprisonné, si le mettent ou facent mettre avec ses biens, qui pour cause de ce seroient prins, saisis, arrestez, levez ou empeschez, à plainne delivrance tantost et sanz delay. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable perpetuelment et à touz jours mais, nous avons fait mettre à ces presentes nostre seel ordené en l’absence du grant. Sauf nostre droit en autres choses et l’autrui en toutes. Donné à Paris, le iiiie jour du moys de juillet l’an de grace mil trois cens quatre vins et un, et le premier de nostre regne.

Es requestes de l’ostel. J. d’Ailly. — G. Guerout.


1 Nommé Pierre Leaue et Leau, dans deux lettres de rémission accordées à sa propre personne, pour ce même meurtre, en juillet 1381 (JJ. 119, n° 159, fol. 103), et le 22 mai 1382 (JJ. 120, n° 308, fol. 450). Voy. ci-dessous à ces dates.

2 On rencontre souvent des personnes nobles portant ce nom de Parthenay, n’ayant aucun lien connu avec l’illustre maison. Larchevêque de Parthenay. Il y eut certainement plusieurs familles de ce nom ; mais les généalogies n’en ont pas été dressées. Nous en rencontrerons divers autres membres par la suite.