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DCXXII

Don à Thomas Olivier, le jeune, clerc d’un Trésorier des guerres, de vingt-cinq livres de rente annuelle, à prendre sur les terres et biens confisqués de Jean de Velort, écuyer, rebelle au roi, situés en Poitou, Touraine et Anjou.

  • B AN JJ. 113, n° 81, fol. 32
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 79-82
D'après a.

[p. 80] Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens etavenir, nous avoir oy l’umble supplicacion de Thomas Olivier, le jeune, clerc de nostre amé et feal tresorier des guerres Jaques Regnart1, contenant comme ledit suppliant qui par le fait de noz guerres, ès quelles il a esté prisonnier, a esté moult grevé et dommagé de sa chevance, nous ait servi loyalment par l’espace de quatre ans ou environ, et sert chascun jour à son povoir, en la compaignie et ou service de nostre dit tresorier des guerres, et pour le paiement de noz dictes gens d’armes et autres soudoiers, ait pluseurs fois esté en armes et en chevaux ès frontieres de noz ennemis, aux journées, sieges et assemblées que nous avons fait tenir et mettre sus, si comme à Coignac2, à Saint Sauveur de Brettaigne3, en la conqueste du païs de Guyenne et ailleurs, où ycellui suppliant a gardé et administré loyalment à son povoir nostre finance à nostre proffit, et en ce a eu et soustenu pluseurs pertes de chevaux, dont les uns ont esté mors, les autres affolez et empiriez, et les autres avecques aucuns de ses varlès perduz et pris par noz diz enmiz, sanz ce qu’il en ait eu aucun restour ; et il soit ainsi [p. 81] que Jehan de Velort, escuier, filz de feu Aymery de Velort4, chevalier, né de nostre royaume, se soit pieça rendu nostre ennemi et rebelle, tenant le parti de noz ennemis, avecques lesquelx il est et demeure, en commettant envers nous crime de lese majesté ; pour quoy touz ses biens meubles et heritages, qu’il avoit en nostre dit royaume, nous sont confisquez et acquis ; que, en remuneracion des diz services, nous audit suppliant, pour lui et ses hoirs, vueillons donner yceulx heritages avecques touz les drois quelconques dudit Jehan de Velort, que il avoit, pour le temps qu’il devint nostre ennemi et rebelle, ès païs d’Anjou, de Touraine et de Poitou, jusques à la valeur de vint cinq livres tournois de rente, à l’assiete du païs, avecques les fruiz et revenues d’iceulx, depuis le temps de la rebellion et desobeissance dudit Jehan de Velort. Et nous adecertes, eue consideracion aux choses dessus dites, pour contemplacion de nostre dit tresorier des guerres, inclinans à la supplicacion du dit Thomas Olivier en ceste partie, à ycellui avons donné et octroyé, et par ces presentes, de nostre certaine science, grace especial et auctorité royal, donnons et octroyons pour lui, ses hoirs, successeurs et aians cause à tousjours mais, lesdictes terres et heritages, qui furent dudit Jehan de Velort, à nous appartenans et confisquez à la cause dessus dicte, jusques à la dicte valeur de vint cinq livres tournois de rente par an, à l’assiete du païs, avecques les fruiz et revenues d’iceulx heritages depuis le temps de la rebellion dudit Jehan, jusques à la valeur de six vins livres tournois en tout. Si donnons en mandement, par ces mesmes lettres, au bailli des Exempcions et ressors des diz païs de Touraine, [p. 82] d’Anjou et de Poitou, et à touz noz autres justiciers, presens et avenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, ou à leurs lieuxtenans, que le dit Thomas Olivier, ou son procureur pour lui, il mettent ou facent mettre en possession et saisine des diz heritages soubz la valeur dessuz exprimée, et d’iceulx avecques les dictes revenues et yssues, depuis la rebellion d’icellui Jehan, facent et seuffrent lui et ses hoirs, successeurs ou aians cause, joir et user paisiblement à tousjours, jouxte la teneur de nostre presente grace, senz le souffrir par quelconques empeschier au contraire, ores ne pour le temps avenir ; laquelle chose nous voulons ainsi estre faicte, et l’avons octroyé audit Thomas de nostre grace, non contrestant quelconques autres dons ou graces, que faictes li aiens le temps passé, et que en ces presentes ne soient desclairiez, et ordenances, mandemens ou defenses à ce contraires. Toutesvoies, s’il avenoit que par traictié de paix ou autrement le dit Jehan retourneroit à ses heritages, nous n’en ferons au dit Thomas recompensacion aucune. Et que ce soit chose ferme à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné à Saint Germain en Laye, l’an de grace mil ccc. soixante et dix huit, et le quinziesme de nostre regne, ou moys de juillet.

Par le roy. P. Cadoret.


1 Jacques Renart ou Regnart est qualifié de trésorier des guerres dans plusieurs mandats de payement ou quittances des années 1375 et 1376, publiés par dom Morice (Hist. de Bretagne, Preuves, in-fol., t. II, p. 103, 173, etc.). Antérieurement il portait le titre de général conseiller des aides (acte du 15 janvier 1372 n.s.), et plus tard, le 5 septembre 1380, celui de conseiller du roi, commis à recevoir des montres. (G. Demay, Invent. des sceaux de la coll. Clairambaut, t. II, p. 110.) Voy. aussi une courte notice sur ce personnage dans le t. II, p. 115, des Comptes municipaux de la ville de Tours, publ. par M. Delaville Le Roulx.

2 Il s’agit évidemment de la démonstration militaire faite en avril et mai 1375 et qui précéda la reddition de Cognac à Du Guesclin, celle-ci ayant eu lieu le 1er juin. (Voir l’introduction du précédent vol., p. liv.)

3 Saint-Sauveur de Bretagne est une expression défectueuse au point de vue géographique ; car il est de toute vraisemblance que c’est au siège et à la capitulation de Saint-Sauveur-le-Vicomte (Manche), qu’il est fait allusion ici. Cette ville se rendit le 3 juillet 1375. Il a été question de cet événement dans notre tome IV, p. 415 et note.

4 Il est assez fréquemment question, dans les textes de cette époque, de Guy et de Pierre de Velort ; mais nous n’en avons point rencontré de relatif à Aimery et à Jean, qui appartenaient certainement à cette même famille du Loudunais.