DCLXXXIII

L’an 1384, une route de Gallois étant logée à Saint-Clair1, il s’éleva une rixe sanglante entre plusieurs hommes d’armes de cette compagnie, et l’un d’eux fut tué. — Rémission accordée au meurtrier nommé « Clœlin Bren, escuier, nez du païs de Galles2 ». Paris, mars 1385.

  • B AN JJ. 126, n° 100, fol. 62 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 254
D'après a.


1 « En la ville de Saint Cler, estant en Touraine. » Ne serait-ce pas Saint-Clair, canton de Martaizé, arr. de Loudun ? On sait que le Loudunais était considéré comme faisant partie de la Touraine, et d’autre part, dans cette province proprement dite, on ne connaît pas de localité du nom de Saint-Clair.

2 Cet écuyer Gallois ne jouit pas longtemps du bénéfice de la grâce royale. Le 31 octobre 1385, il périt lui-même de mort violente, à la suite d’une rixe qu’il avait provoquée à propos d’un fait d’armes auquel il avait pris part à Bouteville. Ses meurtriers obtinrent à leur tour des lettres de rémission, dont nous allons extraire les passages essentiels, parce que l’on y trouve en outre des renseignements curieux sur l’attaque de Bouteville en octobre 1385. « Exposé de la partie de Ligon de Vergne, Guy de Villebois, sire de la Rochebecourt, Moudonnet de la Porte, Hélyot Hermite et Perrot de Bar, escuiers, que, comme un moys ença messire Jehan Buffet, chevalier, et Arnauton des Bordes, escuier, feussent alez courre à certain nombre de gens d’armes en leur compaignie devant le chastel de Bouteville, que les Anglois et ennemiz de mesdiz seigneurs et de nous tiennent et occupent, lesquelx Anglois, si tost qui les sceurent et combien il estoient, yssirent hors de leur forteresse dudit Bouteville et leur coururent sus et les desconfirent, et fut mort en la place ledit messire Jehan Buffet, et ledit Arnauton et pluseurs autres pris ; avecques et soubz lequel Arnauton estoit un Galoys, appellé Clausin Bren, qui en ladite besoingne laissa les dessus diz et s’enfouy à Angoulesme, où il dist et publia, meu de mauvaise voulenté et contre verité, que ledit messire Jehan avoit esté mort et ledit Arnauton pris en fuyant, en les diffamant et blasmant sanz cause. Ce venu à la notice dudit Ligon, qui avoit esté serviteur de feu le seigneur de Marcilly et dudit messire Jehan Buffet, son nepveu, vint audit Clausin et lui demanda la maniere comme la besoingne avoit esté, et ycelluy Galoys lui usa des paroles dessus dictes, et après ce il vint vers Sansse Bernart qui y avoit esté pris, pour en savoir la verité, lequel dist audit Ligon que il n’estoit pas ainsi comme disoit ledit Clausin, maiz que ledit messire Jehan Buffet avoit esté mort et ledit Arnauton pris vaillamment, non mie en fuyant. Et lors ledit Clausin dist qu’il ne l’avoit pas dit dudit Arnauton, maiz dudit messire Jehan Buffet, et pour ce ycellui Ligon, esmeu et couroucié de la mort dudit son maistre, dist audit Clausin qu’il mentoit, car son maistre n’avoit pas esté mort en fuyant, et mist la main au coustel sanz le saicher. Et incontinent ledit Galoys saicha sa dague et couru sus audit Ligon, et l’en fery deux cops ; et quant ledit Ligon se senti ainsi feru, lui et les dessus nommez, dont les aucuns sont ses amis charnelz et les aucuns ses amis et affins, comme eschauffez de ce, veans aussi ledit Ligon en peril de mort, en lui revengant et deboutant force par force, eulz touz ensemble batirent et navrerent ledit Clausin en telle maniere qu’il en fu porté du lieu et mis au lit, où il a demeuré malades, tant pour cause de ladite bateure comme de la boce, qui lui survint ou col, par l’espace de quinze jours ou environ, et pour ce et aussi pour son petit gouvernement de boire, de manger et autrement, il ala de vie à trespassement, la veille de la feste de Touzsains dernierement passée… » Dans la suite, il est dit que Clausin Bren, homme « rioteux », avoit été contraint de quitter la compagnie des Gallois à la suite du meurtre de deux de ses camarades, et que les impétrants avaient toujours vaillamment servi le roi en ses guerres, ainsi que le duc de Bourbon, particulièrement « en la chevauchée que fait avons derrenierement en Guienne ». Ces lettres de rémission sont du duc de Bourbon qui s’intitule lieutenant du roi en Bourbonnais, Forez, Limousin, Angoumois, Saintonge Périgord et la Marche, et du duc de Berry en ses pays de Berry, d’Auvergne et de Poitou. Elles sont datées « de nostre host à Charroz en Poitou », novembre 1385, et insérées dans une confirmation royale, donnée à Paris au mois de février 1386 n.s. (JJ. 128, n° 81, fol. 52 v°.)