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DCCXXVII

Rémission accordée à Jean Chaillot, qui avait accompagné le seigneur de Pauléon, quand celui-ci alla faire violence à la femme d’un nommé Pierre Millot.

  • B AN JJ. 135, n° 78, fol. 45
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 374-376
D'après a.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, à nous avoir esté humblement exposé de la partie des amis charnelz de Jehan Chaillot, le jeune, povre jeune varlet du païs de Poictou, contenant que comme, le premier dimenche de karesme derrenier passé ou environ, le seigneur de Pauleon1 eust [p. 375] mandé au dit exposant, qui demouroit assez près du manoir d’icellui seigneur, que il alast parler à lui, et pour ce que le dit Jehan n’oseoit desobeir ne reffuser d’aler au mandement d’icellui seigneur, ala par devers lui, car il ne savoit que il lui vouloit. Et si tost qu’il fu devers lui, icellui seigneur de Pauleon lui dist qu’il convenoit qu’il alast avec lui en certain lieu, où il avoit à faire. Et après ce, environ mienuit, icellui seigneur et ses gens et le dit Jehan en leur compaignie alerent en un hostel, ou quel il entrerent par force, et en icellui trouverent Symonne, femme de Pierre Millot, la quele femme le dit seigneur prinst par force et en fist sa voulenté. Pour le quel cas et fait dessus dit, le dit Jehan qui oncques n’y fist riens, fors seulement que il fu en la compaignie d’icellui seigneur et ses dictes gens, auquel seigneur il n’osa refuser d’aler avec lui, comme dit est, et aussi il ne savoit où vouloit aler le dit seigneur, ne que il vouloit faire, et tout le temps de sa vie il a esté de bonne vie et honneste conversacion, senz oncques maiz avoir esté reprinz ou attaint d’aucun autre vilain cas ou malefice, doubtant rigueur de justice, s’est absentez du païs. Et pour ce a esté appellez à noz droiz, et doubte que par contumace il n’ait esté banniz de nostre royaume, ou quel païs il n’oseroit jamaiz converser ne repairier, se sur ce ne lui estoit nostre grace estendue, si comme il dit. Nous adcertes, eue consideracion aux choses dessus dictes, voulans rigueur de justice en ceste partie estre moderée par misericorde, au dit Jehan Chaillot, ou cas dessus dit, avons quictié, remis et pardonné, et par ces presentes remettons, quictons et pardonnons, de nostre grace especial et auctorité royal, le fait et cas dessus diz, et le dit ban, se pour ce s’est ensuy, avec toute peine, amende et offense [p. 376] corporele, criminele et civile, que il peut pour cause des choses dessus dictes estre encouruz envers nous et justice. Et le restituons à sa bonne fame et renommée, au païs et à ses biens non confisquez, en imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur, present et avenir, satisfaction faicte à partie civilement, se faicte n’est, premierement et avant toute euvre, s’aucun est qui en face poursuite. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Xanctonge et à tous noz autres justiciers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace et remission facent, sueffrent et laissent le dit Chaillot joir et user plainement et paisiblement, senz lui donner ou souffrir estre fait ou donné empeschement aucun au contraire ; maiz se son corps ou aucuns de ses biens non confisquez estoient pour ce prinz, saisiz, levez ou arrestez, si les lui mettez ou faites mettre, tantost et senz delay, à plaine delivrance. Et pour ce que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf nostre droit en autres choses et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou mois de fevrier l’an de grace mil ccc. iiiixx et huit, et de nostre regne le ixe.

Par le conseil. N. de Voisines.


1 En 1377, le seigneur de Pauléon était Bouchart Chenin, deuxième fils de Gauvain III, seigneur de la Jarrie et de l’Île-Bapaume. Celui-ci avait épousé en secondes noces Jeanne Lécuyer, laquelle était décédée en 1377. Cette année-là, Gauvain le jeune et Bouchart son frère firent un accord touchant la possession de l’île de Bapaume (canton de la Jarrie, Charente-Inférieure), qui venait de leur mère. (Lettres de Jean Besly, publiées par Apollin Briquet, t. IX des Arch. hist. du Poitou, p. 333. — Voy. aussi le tableau généal. de la famille Chenin, donné par M. le baron d’Huart, Persac et la châtellenie de Calais. Société des Antiquaires de l’Ouest, 2e série, t. X (1887). Poitiers, 1888, in-8°, p. 141.)