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DCLIX

Rémission accordée à Jean de Lage, pauvre gentilhomme demeurant à Chauvigny, qui avait dérobé, avec deux compagnons, trois chevaux et une malette remplie de reliques et d’ornements d’église appartenant à des pèlerins, dans une hôtellerie de Saint-Savin, [p. 201] et ne les avait restitués que plus de six mois après.

  • B AN JJ. 122, n° 129, fol. 63
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 200-202
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, de la partie de Jehan de Lage, de Freschinay, demourant à Chauvigny, povre gentilhomme, nostre serviteur en noz guerres soubz nostre amé escuier le Poursuivant d’Amours1, a nous avoir esté exposé comme deux ans a ou environ le dit exposant fust venuz de nuit en la ville de Saint Savin en l’ostel Jehan Couvet, hostellier, avec lui et en sa compaignie deux autres hommes, ou quel hostel le dit exposant et les diz compaignons d’un commun accort eussent priz et ostez iii. chevaulx et une malette à certains pelerins ylà hebergiez, et iceulz chevaulx et malette eussent emmenez hors du dit hostel, cuidans que en la dicte malette eust austres choses qu’il n’avoit, car dedans n’y avoit que aournemens et reliques d’eglise ; les quielx chevaux, aournemens et reliques ilz retindrent par devers eulz par l’espace de demi an ou environ, sanz en faire restitucion aucune, jasoit ce que le dit exposant et compaignons dessus diz, il a un an et plus, considerans et advertissans qu’ilz avoient mal fait, aient rendu et restitué les diz chevaulx, aournemens, reliques et malette aux diz pelerins, et leur en aient fait plaine satisfacion à leur gré. Neantmoins pour doubte de rigueur de justice, s’est absentez le dit exposant du dit païs, et n’y oseroit [p. 202] bonnement retourner, si comme il dit, se de nous n’avoit remission du dit fait, en nous humblement suppliant que nous sur ce lui vueillons impartir nostre grace. Nous, attendu ce que dit est et pour consideracion des services que icellui Jehan nous a fait en noz dictes guerres, en soy exposant pluseurs foiz à grans perilz, et especialment en nostre armée faicte derrenierement en Flandres, tout le fait et crime dessus declaré et toute peine et offense corporele, criminele et civile que le dit exposant pourroit avoir encouru envers nous pour celle cause, à icellui exposant ou cas dessus dit avons remis, quictié et pardonné, remettons, quictons et pardonnons de nostre grace especial, plaine puissance, auctorité et magesté royal, par ces presentes, sattisfacion faicte premierement et avant toute euvre, se faicte n’est, en le restituant au païs, à sa bonne fame, renommée et à ses biens. Si donnons en mandement par ces presentes au seneschal du Poictou et à tous autres justiciers de nostre royaume, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, que le dit exposant de nostre presente grace facent et sueffrent joir et user paisiblement ores et par les temps avenir, sanz le faire ne soufrir estre molesté aucunement à l’encontre. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touz temps, nous avons fait mettre à ces presentes nostre seel ordenné en l’absence du grant. Sauf nostre droit en autres choses et l’autrui en toutes. Donné à Paris, en nostre chastel du Louvre, le xixe jour de fevrier l’an de grace mil ccc iiiixx et deux, et le tiers de nostre regne.

Par le roy, à la relacion de monseígneur le duc de Bourgongne. S. de Castel.


1 Jean Win ou Wyn, dit le Poursuivant d’Amour, occupait le château de Beaufort en Champagne en 1369, pour le duc de Lancastre, quand il prit le parti de Charles V. Froissart dit qu’il était l’ami d’Yvain de Galles et Gallois lui-même. (Edit. Kervyn de Lettenhove, t. VII, p. 324, 325, 539). On conserve dans la coll. Clairambault, à la Bibl. nat., une quittance des gages d’Yvain de Galles scellée du sceau de Jean Win, à Paris, le 24 avril 1373, pour des services de guerre dans le Bordelais. L’écu est écartelé : au 1er et 4, un lion à la bande brochant ; au 2 et 3, un lion, penché, timbré d’un heaume couronné et cimé d’une tête de loup, supporté par un lion et par un loup. (G. Demay, Invent. des sceaux de la coll. Clairambault, in-4°, 1886, t. II, p. 328).