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DCLIII

Rémission accordée à Jean Douin pour le meurtre de Laurent Bourget.

  • B AN JJ. 120, n° 160, fol. 80 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 185-187
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie des amiz charnelz de Jehan Douyn, demourant en Poytou, que comme, environ le samedi devant karesme prenant derrenier passé, le dit Jehan Douyn eust trouvé certainne quantité de bestes qui pessoient en certains pasturages nobles appartenans à Katin Lucase, fille de feu Guillaume de la Chauviere, de la quele et de ses biens il est tuteur et administreur donné par justice, et ycelles eust pris comme faire pouvoit et luy loisoit de usage et de coustume, pour en avoir amende de vii. solz et demi, la quele lui appartient ou nom de la dicte Katin, toutes foiz que bestes estranges y sont prises et trouvées, et il soit ainsy que, en voulant mener en sauf les bestes devant dictes, vint à l’encontre [p. 186] un appellé Laurens Bourget, disant ycelles bestes estre siennes et qu’il ne les emmenroit point. Et lors le dit Jehan, voulant garder son droit, respondi que si feroit et que c’estoit raison ; et tantost ycellui Laurens dist derechief de felon courage que ne feroit, et, sanz plus dire, se prist au corps du dit Jehan et le jeta à terre soubz lui moult vilainnement, et le frapa pluseurs cops du poing sur la teste, et ainsi que le dit Jehan se levoit de dessouz le dit Laurens, en resistant à sa force au mieulz qu’il povoit, la fille d’ycellui Laurens le frapa d’un baston que elle tenoit par la teste jusques à grant effusion de sanc. Et lors le dit Douyn, soy veant ainsy opprimé et batu, doubtant la puissance des diz pere et fille, qui ancores s’efforçoient de le mieulz batre, en soy defendant, prist un baston qu’il osta à une bergiere et du dit baston fery le dit Laurens par la teste un seul cop, du quel il chey à terre, et après tantost se leva et s’en ala à sa maison, comme se il feust tout sain, et pou de temps après il ala de vie à trespassement. Pour occasion du quel fait et pour doubte de rigoreuse justice, s’est absentez du païz le dit Jehan, le quel en touz cas a esté et est de bonne vie et renommée et de conversacion honeste, en nous humblement suppliant que sur ce lui veuillons impartir nostre grace. Nous adecertes, ces choses, considerées, voulans misericorde preferer à rigueur de justice, le fait dessus dit avecques touz appeaulz et evocacions qui ensuiz s’en sont, se aucuns en y a, et toute peine, offense et amende corporele, criminele et civile que ycellui Jehan a et puet avoir encouru pour les choses dessus dictes, à ycellui Jehan, ou cas dessus dit, satisfacion faicte à partie avant tout euvre, lui avons remiz, quictié et pardonné, remettons, quictons et pardonnons, et au païz, sa renommée et biens non confisquiez le restituons et remettons, en mettant au neant les appeaulz et evocacions dessus diz, et à nostre procureur imposons silence perpetuele, de nostre auctorité [p. 187] royal et grace especial, par ces presentes. Si donnons en mandement au gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers et officiers, et à chascun d’eulz, si comme à lui appartendra, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, que de nostre presente grace et remission facent et laissent le dit Jehan user et joir paisiblement, et contre la teneur d’icelle ne l’empeschent ne sueffrent estre molesté ne empeschié en corps ne en biens, maiz tout ce qui sera fait au contraire mettent et facent mettre au premier estat et deu, tantost et sanz delay. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable à touzjours, nous avons fait mettre à ces presentes nostre seel ordené en l’absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Paris, ou moiz d’avril l’an de grace mil ccc. iiiixx et un, et de nostre regne le second, avant Pasques.

Par le conseil. G. Niczon. — T. d’Estouteville.