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MCCCCXXI

Rémission en faveur d’Alain Lemosnier, mercier colporteur, qui avait été la cause indirecte et involontaire de la mort d’une fillette de six ans, à Mauzé.

  • B AN JJ. 194, n° 220, fol. 121
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 38, p. 59-60
D'après a.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Alain Le Mosnier, mercier, natif du pays de Bretaigne, contenant que, le vendredi xxiime jour du mois d’aoust derrenier passé, ledit suppliant arriva sur le soir au lieu de Mauzé, assez près de la Rochelle, avec ung jeune enffant, qui estoit sur ung sien cheval de poil rouen, chargié de marchandise et mercerie à lui appartenans ; auquel lieu de Mauzé il se logea et fist descendre sadicte mercerie et marchandise en l’ostel d’un nommé Pichault, en intencion de illec, le lendemain, desployer sadicte mercerie et marchandise pour la vendre, ainsi qu’il avoit acoustumé de faire journelement, de lieu en autre. Et après ce que ledit cheval eust esté en l’estable par certain temps et qu’il ot mengié, volut ledit mercier mener boyre sondit cheval, et pour ce faire monta dessus et le mena à la rivière, distant de son logis de environ deux traiz d’arc ; et quant ledit cheval ot beu, il voulut aproucher d’autres chevaulx qui semblablement buvoyent, pour leur ruer ; mais pour cuider resister, ledit suppliant, pour ce que il avoit ung jeune enfant qui estoit sur ung autre cheval, et doubtant ledit suppliant que sondit cheval ne lui fist desplaisir, en la chaleur où estoit icellui cheval, fist tant que le tira hors de la rivière. Et pour ce que ledit suppliant voyoit sondit cheval esmeu et comme plain de frenesie, et qu’il ne savoit pas encores bien ses condicions, par ce qui n’y avoit pas plus de xv. jours qu’il l’avoit achepté, il le voult mener bellement et hors de la [p. 60] grant rue, par laquelle il estoit venu à ladicte rivière, et entra en une rue foraine ; et incontinant, souldainement commença ledit cheval à rentrer en sa frenesie ou challeur, et se print à ruer, saulter et prandre le mors aux dans, tellement que ledit suppliant ne le pot tenir, et en corant rencontra ledit cheval une jeune fille de l’aage de six ans ou environ, que l’en dist estre fille d’ung nommé Taresnay, demourant oudit lieu de Mauzé, laquelle il fist cheoir arrière et la bleça du pié ou derrière de la teste, tellement que deux jours après ladicte fille ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel cas, etc., ledit suppliant s’est mis en franchise, etc., humblement requerant que, etc., il nous plaise noz grace et misericorde lui impartir. Pour quoy nous, etc., avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Montargis, ou mois de septembre l’an de grace mil quatre cens soixante et six, et de nostre règne le sixiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion de son conseil. Amys. — Visa. Contentor. J. d’Orchère.