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MCCCCLXXXIII

Rémission accordée à Dimanche de Mussy, jeune écuyer de la maison du comte du Maine à Châtellerault, qui croyant avoir à se plaindre de l’un de ses compagnons, nommé Etienne Matago, lui avait cherché querelle et l’avait frappé à mort.

  • B AN JJ. 196, n° 252, fol. 154 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 38, p. 228-229
D'après a.

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l’umble supplicacion des parens et amys charnelz de Dymenche de Mussi1, escuier, jeune enffant, contenant que, le vie jour de fevrier derrenier passé, ledit Dymenche estant serviteur de nostre amé Jacques Palays, escuier d’escurie de nostre très chier et très amé oncle le conte du Maine2, et en son logeys en la ville de Chasteauleraud, entre vii. et viii. heures devers le matin, et après ce que icelluy Dymenche, qui estoit allé en l’estable des chevaulx de sondit maistre, trouva et apperceut, en regardant en une fenestre où il avoit mis unes estrivières de la selle du cheval qu’il chevauchoit, qui estoit à sondit maistre, que lesdites estrivières n’y estoient pas et qu’elles avoient esté ostées ou emportées, et aussi qu’il ne trouva pas le harnoys d’ung autre cheval qui estoit à sondit maistre, de ce estant eschauffé, vint en la chambre dudit Palays où il trouva ung nommé [p. 229] Estienne, auquel il s’adreça en luy disant pourquoy il avoit prinses lesdites estrivières qui estoient en ladite fenestre et aussi le harnoys du hongret. A quoy ledit Estienne Matago respondit qu’il cuidoit qu’elles ne servissent plus de riens ; et lors ledit Dymenche luy dist que s’il y eust eue meilleure chose, que il l’eust bien prinse et que tousjours le voulloit gouverner et suppediter. Auquel ledit Matago, de fière et grosse parolle, dist et respondit : « Je ne te veulx point gouverner. » A quoy icelluy Dymenche dist que non et que sondit maistre estoit pour le gouverner, s’il faisoit chose qu’il ne fust à faire, et non pas luy. Sur quoy ledit Matago respondit : « Tu en veulx faire ung tresor ! » Et ledit Dymenche luy dist : « Tu n’en as que faire, ce n’est de riens du tien, ains3 de mon maistre. » A quoy ledit Matago luy dist : « Je ne sçay », et lors s’aproucha dudit Dymenche qui estoit près du feu et luy dist : « Tu es droit villain ! » Pour laquelle cause ledit Dymenche, comme très courssé de la villenie qu’il luy disoit et que jà il luy avoit dicte, luy donna deux cops de dague, l’ung en l’espaule et l’autre au costé, incontinent l’ung après l’autre, et le laissa et s’en yssit hors de la chambre. A l’occasion desquelx coups ledit Estienne dit Matago, iii. ou iiii. jours après, par default de bon [gouvernement, est alé de vie à trespas], etc. Pour occasion duquel cas, ledit Dymenche s’est absenté du pays et, etc. Au seneschal de Poictou et à tous autres, etc. Donné à Tours, le …4.


1 M. Beauchet-Filleau mentionne ce personnage d’après les présentes lettres de rémission uniquement et le rattache à la famille de Moussy (Dict. des anc. familles du Poitou, 1re édit., t. II, p. 430) dont il est question ci-dessous, à l’occasion de lettres autorisant Jean de Moussy, écuyer, seigneur de la Contour, à fortifier cette place (n° MCCCCXCVIII.)

2 Charles d’Anjou, comte du Maine, troisième fils de Louis II, duc d’Anjou, et d’Yolande d’Aragon, né le 14 octobre 1414 au château de Montils-lès-Tours, mort à Neufvy en Touraine, le 10 avril 1473 (sur lequel cf. notre huitième vol., Arch. hist. du Poitou, t. XXIX, p. 146), résidait fréquemment à Châtellerault, dont il avait acquis la vicomté au mois de décembre 1445 de Jean VII, comte d’Harcourt. (Id., t. XXXII, p. 12 et note.)

3 Le texte du registre porte « ne de mon maistre », ce qui est contraire au siens.

4 La fin manque. Les actes voisins étant datés de Tours au mois de mars 1470 n.s., nous classons à cette date la rémission accordée à Dimanche de Mussy.