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MCCCCLXXIX

Concession à Pierre Laigneau, écuyer, seigneur de la Morinière à Dissay, valet de chambre et fauconnier ordinaire du roi, d’un droit [p. 223]d’usage pour son chauffage et de la glandée pour douze porcs, chaque année, en la forêt de Moulière.

  • B AN JJ. 196, n° 161, fol. 92
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 38, p. 222-224
D'après a.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, présens et avenir, que nous, à la supplicacion et requeste de nostre bien amé valet de chambre et faulconnier ordinaire, Pierre Laigneau1, escuier, nostre grenetier de Chartres et seigneur de l’ostel de la Morinière assis en la parroisse de Dissay, prez nostre forest de Molière, et pour consideracion des bons, agreables et continuelz services qu’il nous a faiz cy devant par bien longtemps ès diz offices et autrement, et pour aucunement l’en recompenser, à icellui, pour ces causes et consideracions et autres à ce nous mouvans, avons, de nostre certaine science, [p. 224] plaine puissance et auctorité royal, donné et octroyé, donnons et octroyons, voulons et nous plaist, de grace especial, que lui et ses hoirs et successeurs ou de luy aians cause, demourans oudit ostel de la Morinière, aient doresnavant à tousjours leur usaige pour leur chauffaige de boys mort et mort boys en ladicte forest de Molière, et pour le mestaier demourant oudit hostel ou en la grange d’icelluy touchant oudit hostel, et qu’ilz en joyssent tout ainsi que font plusieurs autres ayans ledit droit de boys mort et mort boys en icelle forest ; et avec ce, que luy et sesdiz hoirs et successeurs puissent avoir et tenir en icelle forest par chacun an, durant la pesson et glandée, jusques au nombre de xii. pourceaux pour engresser, en nous payant seullement par chacun an, ou à nostre recepte ordinaire de Poictou, xii. deniers tournois de cens ou devoir noble pour tout devoir seullement, pour recongnoissance des choses dessus dictes. Si donnons en mandement, par ces dictes presentes, à noz amez et feaulx genz de noz comptes à Paris, à nostre seneschal de Poictou et au maistre des eaux et forestz en nostre pays de Poictou, et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans ou commis, presens et avenir, et à chacun d’eulx, si comme à luy appartiendra et qui requis en sera, que ledit, etc., ilz facent, seuffrent, etc. Donné aux Montilz lez Tours, ou moys de novembre l’an de grace mil iiiiclxix, et de nostre règne le neufiesme.

Par le roy, les sires de Brosse2, du Lude3 et autres presens. Toustain. — Visa.


1 Pierre Laigneau, qui déjà en 1466 est qualifié valet de chambre du roi et grenetier de Chartres, s’était marié à Poitiers et avait fixé sa résidence dans cette ville. On l’apprend par une lettre missive adressée par Louis XI, d’Orléans, le 16 avril de cette année, « aux maire, eschevins et cent de nostre ville de Poictiers », dans laquelle, après avoir exposé les titres de son valet de chambre, tels que, nous les rappelons, il ajoute : « par quoy vouldrions bien qu’il y fust eslevé et pourveu en honneur et prérogative. Nous vous prions que, en faveur de nous et à nostre requeste, vous vueillez mectre nostre dict varlet de chambre ou premier lieu de vostre eschevinage qui sera vacquant, et quant à ce le prefferer devant tous autres. Et vous nous ferez très singulier et agreable plaisir, et en aurons vous et les faiz et affaires de vostre dit eschevinage en plus grande recommandation. » (Arch. hist. du Poitou, t. I, p. 158 ; J. Vaësen, Lettres de Louis XI, t. III, p. 50.) Une nouvelle lettre, datée d’Étampes, le 25 septembre suivant, réitéra de façon expresse cette recommandation. (Arch. de la ville de Poitiers, 5e rég. des Délibérations, séance du 3 octobre 1466.) Un désir aussi formellement exprimé par le roi était un ordre ; en effet, Pierre Laigneau fut élu au premier poste d’échevin qui vint à vaquer, celui d’Antoine Vousy, qui venait de mourir, le 3 octobre 1466. (Ch. Babinet, Les Échevins de Poitiers de 1372 à 1675. Mém. de la Société des Antiquaires de l’Ouest, in-8°, t. XIX, année 1896, p. 16 du tirage à part.) Cette intervention de Louis XI dans les élections municipales n’est pas un fait isolé ; au contraire, à Poitiers elle était constante, comme le fait remarquer M. Henri Sée. Les magistrats cependant avaient demandé, deux ans auparavant, que la liberté d’élection fût laissée à la ville, mais on ne tint aucun compte de leur requête. (Louis XI et les villes. Paris, 1891, in-8°, p. 74.) Le fief de la Morinière, maison noble sur laquelle une rente était due au chapitre de Notre-Dame-la-Grande de Poitiers (Arch. de la Vienne, G. 1225) avait été sans doute apporté à Pierre Laigneau par sa femme, dont nous n’avons pu trouver le nom.

2 Jean II de Brosse, sr de Boussac et de Sainte-Sévère, chambellan du roi. Par son mariage, conclu le 18 juin 1437, avec Nicole, fille unique et héritière de Charles de Blois, dit de Bretagne, baron d’Avaugour, et d’Isabelle de Vivonne, il possédait des terres et seigneuries nombreuses et importantes dans le Bas-Poitou et en Bretagne. (Cf. la notice qui lui a été consacrée dans notre précédent volume, p. 38, note.)

3 Jean de Daillon, sr du Lude, dont il a déjà été question ci-dessus, p. 126, note 3.