[p. 281]

MCCCCXCVIII

Permission à Jean de Moussy, écuyer, de faire clore et fortifier le lieu et place de la Contour, dont il était seigneur.

  • B AN JJ. 201, n° 116, fol. 89 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 38, p. 281-283
D'après a.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et advenir, nous avoir receue l’umble supplicacion [p. 282] de nostre chier et bien amé escuier d’escuirie, Jehan de Moussy1, escuyer, seigneur de la terre, place et seigneurie de la Contour, à cause de sa femme, contenant que ledit lieu et place est assiz en pays bon et fertile, et à ceste cause est plus foullé et dommagé par les gens d’armes passans par ledit lieu, et pour ce que ledit suppliant, afin de garder et sauver lui et ses biens et ceulx de ses subgetz, est deliberé faire clorre ledit lieu et place de la [p. 283] Contour, qui à ce faire est avantaigeuse, se sur ce nous plaisoit lui octroyer noz congié et licence, si comme il dit, en nous humblement requerant que, attendu que ledit suppliant tient neuement de nous icelle place, à cause de nostre chastel et chastellenie de Montmorillon, et aussi que ladite place et ceulx d’environ en pourroient mieulx valoir, et en ce sera la seureté d’icelle place, nous luy vueillons sur ce pourveoir de nostre grace. Pour ce est il que nous, consideré ce que dit est, à icelluy, ou cas dessusdit, avons donné et octroyé, donnons et octroyons, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, congié et licence de clorre et faire clorre, fortiffier et bastir icelle place de murs, tours, creneaux, canonnières, garites, pont leveis, fossez et autres choses qui y appartiennent. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal de Poictou ou à son lieutenant, et à tous noz autres justiciers, presens et advenir, et à chascun d’eulx, si comme à lui appartiendra, que se, appellé nostre procureur illec et autres qui feront à appeller, il leur appert de ce que dit est, ilz facent, seuffrent et laissent ledit suppliant joir et user plainement et paisiblement de nostre presente grace, congié et licence, sans sur ce leur faire ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné aucun destourbier ou empeschement au contraire, non obstant quelzconques ordonnances, mandemens ou deffences à ce contraires. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre scel à cesdictes presentes. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Amiens, ou mois d’avril l’an de grace mil cccc. soixante et unze, et de nostre règne le dixiesme.

Ainsi signé : Par le roy, l’admiral2 et autres presens. B. Meurin. — Visa. Contentor. J. d’Orchère.


1 Cinquième fils de Hugues de Moussy, seigneur de la Lande en Bourbonnais, et de Jeanne de La Châtre, Jean, ayant épousé Antoinette, fille et héritière de Jean Gavarret, écuyer, seigneur de la Contour et de Langon, vint se fixer en Poitou où il fut le chef de la première branche de la Contour. Depuis l’âge de dix-huit ans jusqu’à sa mort, c’est-à-dire pendant plus de soixante ans, il servit dans les compagnies de gendarmerie, puis dans celles d’ordonnance, fit ses premières armes à la conquête de la Normandie et de la Guyenne (1449-1450), passa successivement dans les compagnies de Jean de Lorraine (1452), de Charles d’Albret, sr d’Orval, à Bordeaux, du comte de Penthièvre (1468), de Gilbert de Graçay (1492-1495), de Philippe du Moulin (1498-1503), de Lancelot du Lac (1507), et prit part à toutes les guerres pendant les règnes de quatre rois : Charles VII, Louis XI, Charles VIII et Louis XII. De 1480 à 1489, Jacques de Beaumont, sire de Bressuire, capitaine général des bans et arrière-bans de Poitou, choisit Jean de Moussy comme son lieutenant pour recevoir à Montmorillon les montres des hommes d’armes, archers, picquiers et brigandiniers, alors qu’il recevait les autres à Poitiers, Niort et Mortagne. (Chartrier de Saint-Loup, Arch. des Deux-Sèvres, E 1286.) Le 26 juillet 1503, André de Vivonne, sénéchal de Poitou, le commit de nouveau pour faire, en son lieu et place, les montres et revues des gentilshommes de vingt-trois châtellenies de cette province. Il mourut en 1510, laissant la réputation d’un chevalier « vrai prudhomme, loyal et vaillant en armes, ayant acquis honneurs tant en ce royaume que hors d’iceluy, pour s’être toujours comporté comme homme de son état devait faire », suivant le témoignage de Chérin, dans un mémoire cité par Beauchet-Filleau (Dict. des familles de l’ancien Poitou, 1re édit., t. II, p. 434). Le 18 février 1471 n.s., le Parlement siégeant à Poitiers autorisa Pierre de Combarel, chevalier, et sa femme, appelants d’une sentence du sénéchal de Poitou, donnée en faveur de Jean de Moussy, à conclure un accord avec leur adversaire ; on n’y dit point d’ailleurs en quoi consistait le litige. (Arch. nat., X1a 4812, fol. 83.) Jean de Moussy épousa en secondes noces Pernelle Ebrard, dame de Montespedon ; il eut du premier lit deux fils et une fille, et du second un fils et une fille. Aux terres et seigneuries de la Contour, Boismorand, la Vergne, Boisbousseau, Beauchamp, qu’il possédait de son patrimoine ou du chef de sa femme, il joignit par acquisition de Léonnet de Segondat (fin de 1481) celle de Villars, mouvant de Lussac, au sujet de laquelle il fut en procès avec Geoffroy Taveau, seigneur de Mortemer et de Lussac. (Voir le baron d’Huart, Persac et la châtellenie de Calais. Mém. de la Soc. des Antiquaires de l’Ouest, 2e série, t. X, 1887. Poitiers, 1888, in-8°, p. 327-329, 337.)

2 Louis bâtard de Bourbon, comte de Roussillon en Dauphiné, fils naturel de Charles Ier duc de Bourbon. (Cf. ci-dessus, p. 48, note 1.)