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MCCCCLI

Rémission donnée en faveur de Guillaume Saucet, boucher à Hérisson, qui, étant ivre, avait tué, d’un coup de javeline, Gervais Mainot, serviteur d’un gentilhomme nommé François Gomart, lequel Gervais, [p. 137]d’ailleurs, étant venu à Hérisson pour préparer les logis de la compagnie de son maître, avait dépouillé brutalement une pauvre femme d’une charge de paille, ce qui avait excité l’indignation dudit Saucet.

  • B AN JJ. 197, n° 10, fol. 6
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 38, p. 136-138
D'après a.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc. nous avoir receue l’umble supplicacion de Guillaume Saucet, povre boucher, demourant à Heriçon en Poictou, contenant que, le quatorziesme jour de novembre dernier passé, ung nommé Gervois Mennot, acompagné de deux hommes en habillement de guerre, vindrent audit lieu de Heriçon, environ soulail couchant, pour prendre les logeis de leurs maistres ou autrement, et se disoit ledit Mainot estre serviteur d’ung gentilhomme nommé François Gomart1. Et tantost après que ledit Mainot fut arrivé audit lieu de Heriçon, il trouva une femme qui portoit ung faiz de paille, laquelle paille icelui Mennot osta à ladite femme par force et la porta en l’ostel d’un nommé Festicier où il se vouloit loger, jaçoit ce que ladite femme le debatoit à tout son povoir, sur lequel debat survint ledit Guillaume Saulcet, suppliant, qui print parolles avec ledit Mannot pour ladite paille ; et après plusieurs parolles eues entre eulx, icelui Saulcet se empara d’une javeline qu’il trouva contre la maison d’un nommé Jehan Germain et ladite javeline print en sa main et vint parler à ung de ceux qui estoient venuz avec ledit Mainot et lui dit : « Que allègues tu ? » ou parolles semblables. Et ce fait, ledit suppliant, qui estoit yvre et embeu, se transporta par devers [p. 138] ledit Mainot qui vouloit monter à cheval, et après qu’il fut monté et qu’il s’en aloit, icelui suppliant frappa ledit Mannot du bout de sa javeline par derrière, en lui disant : « Tue ! avant ! » et le bleça ou cousté, au moien de quoy, au bout de deux ou trois jours après, cheut malade au lit et y a demouré l’espace de iii. sepmaines et jusques au cinquiesme jour de decembre, qu’il est allé de vie à trespas. A l’occasion duquel cas, le dit suppliant, doubtant rigueur de justice, s’est absenté du pays, et n’y oseroit jamaiz seurement retourner, se nostre grace ne lui estoit sur ce impartie, en nous humblement requerant que, attendu que en tous ses faiz il a tousjours esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, etc., il nous plaise sur ce lui impartir nostre grace. Pourquoy, etc., voulans, etc. audit suppliant, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal, avons quicté, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons le fait et cas dessus dit, avec toute peine, amende et offence corporelle, criminelle et civille en quoy, à ceste cause, il pourroit estre encouru envers nous et justice, et l’avons restitué, etc., satisfacion faicte à partie civillement tant seulement, si faicte n’est, etc. Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, au seneschal du Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. que de nostre presente grace, etc. Donné aux Montilz lès Tours, ou moys de janvier l’an de grace mil cccc. soixante huit, et de nostre règne le huictiesme.

Ainsi signé : Par le roy. B. Meurin. — Visa. Contentor. J. Duban.


1 On trouve, vers la même époque, un Foucaut Gommart, chevalier, sr d’Echillais en Saintonge, qui, ayant frappé mortellement, avec son valet nommé Capitaine, un de ses sujets de ladite seigneurie d’Echillais, obtint des lettres de rémission, datées de Bourges, au mois de mai 1455. (JJ. 191, n° 171, fol. 90 v°). Un Jean Gomart, écuyer, était poursuivi au criminel, quelques années plus tard, par le prieur et les religieux de Tusson, de l’ordre de Fontevrault. (Actes des 13 juillet 1459, 10 et 29 décembre 1461. (Arch. nat., X2 29, fol. 73, et X2a 30, fol. 96, 97 v°).