1 Louis
de Belleville, seigneur de Montaigu, chambellan du roi, était
l’aîné de cinq frères et une sœur, enfants de Jean III
Harpedenne, dit de Belleville, sur lequel voy. nos t. VIII et X
(Arch. hist., t. XXIX, p. 45 ; XXXV, p. 367), et de
Marguerite de Valois, fille naturelle du roi Charles VI
et d’Odette de Champdivers, la petite reine. Il avait
épousé lui-même Marguerite de Culant, fille de Charles,
grand-maître de France, dont il laissa quatre enfants, un fils,
Louis II, qui rentra en possession de Montaigu en
1492, et trois filles, Catherine, mariée à Philippe de Cousdun,
sr de Migré, Renée et Marguerite, nommés dans des
lettres patentes de mai 1474, dont on trouvera le texte plus
loin, à leur date, et dans un acte de vente du 16 juin 1478.
(Bibl. nat., ms. fr. 20647, pièces orig., vol. 279, n° 18.)
Louis Ier de Belleville mourut après le
26 décembre 1473 et avant la fin d’avril 1474. Le 14 novembre
1473, Louis XI lui fit don, par lettres données à la Cour-Dieu,
des fruits, revenus et émoluments des ville, terre et seigneurie
de Montaigu jusqu’à cette date ; il y est qualifié chevalier,
chambellan du roi, naguère seigneur de Montaigu en
Poitou. On trouvera plus loin dans ce volume des lettres
patentes datées de Senlis, au mois de mai 1474, portant cession
par le roi à Marguerite de Culant, veuve de Louis de Belleville,
des château, châtellenie, terre et seigneurie de Montmorillon,
en échange du comté de Dreux promis à son feu mari. (JJ. 204,
n° 73, fol. 47.) Aux renseignements donnés sur ce personnage en
différents endroits de notre précédent volume (p. 367, note,
407, note, 454, note, 456, note) nous en ajouterons quelques
autres. Par un arrêt de la Cour des Aides, dont nous n’avons pas
retrouvé la date, la terre de Montaigu avait été saisie et mise
en la main du roi, à la requête de Mathieu Beauvarlet, receveur
général des finances d’outre-Seine et Yonne, pour une somme de
700 livres qui lui était due par Jean III de
Belleville, et trois commissaires furent nommés pour en
administrer les revenus, Pierre Raynart, Pierre Herbertin et
Pierre Guerry. Ceux-ci, n’ayant pas rendu leurs comptes, furent
l’objet de poursuites de la part de M. Beauvarlet, après le
décès du père de Louis de Belleville, ce dernier étant devenu
seigneur de Montaigu. Assignés à comparaître devant la Cour des
Aides, dont ils tenaient leur délégation, ils firent défaut et
furent condamnés à payer les 700 livres et tous les dépens.
(Arrêts des 6 juillet 1468 et 3 février 1469 ; Arch. nat.,
Z1a 68, à ces dates.) Le 13 mai 1471, Louis de
Belleville était appelant au Parlement de Bordeaux,
provisoirement installé à Poitiers, contre Louis de Beaumont,
sr de la Forêt, qui avait fait saisir et mettre en
criée quelques-uns de ses héritages et des biens appartenant à
sa sœur Marie, veuve de Bertrand Larchevêque, seigneur de
Soubise, en payement d’une somme à laquelle ils avaient été
condamnés envers lui, par sentence du sénéchal de Poitou.
(X1a 4812, fol. 145 v°.) Treize ans plus tard, sa
veuve, Marguerite de Culant, et deux de ses frères, Antoine et
Gilles de Belleville, étaient encore en procès contre ledit de
Beaumont ou ses ayants cause au sujet des criées des terres de
la Lande et de Saint-Hilaire-le-Vouhis. (Acte de février 1484,
X1a 4825, fol. 140 v°.) Citons encore deux quittances
de Louis de Belleville, chevalier, l’une du 9 avril 1471 n.s.,
l’autre du 15 mai 1478, chacune de 800 livres, montant de sa
pension d’une année. Louis XI avait porté cette pension à 1.200
livres pour l’année 1474. Ce fut sa veuve qui en bénéficia ;
elle en donna quittance, pour elle et au nom de ses enfants
mineurs, le 4 juin 1475. (Bibl. nat., ms., pièces orig.,
vol. 279, nos 14, 15 et 16.) Le n° 17 du même recueil est
un mandement du roi au sénéchal de Poitou, donné à
(blanc), le jour de (blanc) 1475, lui ordonnant de
faire jouir le chapitre et l’église collégiale de Saint-Maurice
de Montaigu de la terre et seigneurie de Vendrennes, que feu
Jean de Belleville, père de Louis, leur avait léguée par son
testament, en même temps qu’il fondait ladite église. Au mépris
de cette largesse, Marguerite de Culant, à la mort de son mari,
comme ayant le bail de ses enfants mineurs, s’était emparée
desdits château, terre et seigneurie, et prétendait les remettre
en sa possession.
Louis XI, qui à plusieurs
reprises avait eu à se venger des intrigues de
François II, duc de Bretagne, avec Charles le
Téméraire, ou à repousser ses agressions, regrettait de ne point
posséder en propre quelque bonne place forte sur la frontière de
Bretagne. Montaigu, à ce point de vue, méritait d’être l’objet
de ses préoccupations. Louis de Belleville, seigneur du lieu,
était fidèle, et le roi lui ayant demandé, le 14 août 1467,
l’engagement de garder loyalement cette place à son service
contre le duc, il n’hésita pas à en prêter le serment (Arch.
nat., J. 183, n° 154) ; il donna du reste une preuve de cette
fidélité en repoussant trois mois plus tard les Bretons qui
étaient venus assaillir Montaigu et en leur donnant la chasse
jusqu’à Clisson. (Dupuy, Hist. de la réunion de la Bretagne à
la France, t. Ier, p. 194.) Malgré tout, il parut
préférable au roi de se rendre acquéreur de la place et il
traita de cette affaire avec Louis de Belleville, puis avec sa
veuve et ses enfants. L’importance des concessions qu’il leur
fit tout d’abord en échange indique assez le haut intérêt qu’il
attachait à cette possession et combien il était pressé de
mettre son projet à exécution. Le 1er janvier 1473, peu
de temps après avoir signé avec François II la
prolongation de trêve pour un an, il avait visité Montaigu (Dom
Lobineau, Hist. de Bretagne, t. Ier, p. 720), et
il ne tarda pas à entamer les pourparlers. Le 28 juillet, à
Montsoreau, le sr de Belleville s’engagea verbalement à
céder Montaigu au roi en toute propriété, moyennant des
compensations à débattre ; le 1er août, il passa
procuration, datée dudit Montaigu, à Marguerite de Culant, et
celle-ci, quatre jours après, signa avec Louis XI à Sablé
(4 août 1473) le traité de cession définitive. En échange de
Montaigu, le roi abandonnait tout le comté de Dreux, et, comme
il ne pouvait en disposer tout de suite, en attendant, il
baillait en gage au sr de Belleville le comté d’Évreux et
la terre et seigneurie de Montmorillon. Louis avait quatre
frères, Jean, Antoine, Jacques et Gilles, et une sœur, la dame
de Soubise, qui tous prétendaient avoir droit au dédommagement,
« comme ayant chacun une part sur la succession de
Belleville-Montaigu ». Louis XI ne chicana pas ; il leur promit
tout ce qu’ils demandèrent. Le sr de Belleville voulut se
réserver quelques paroisses de la châtellenie de Montaigu, comme
les Brouzils, Chavagnes, etc., et cette concession lui fut
accordée sans difficulté. (Vidimus de Robert
d’Estouteville, garde de la Prévôté de Paris, Arch. nat.,
J. 183, n° 159 ; voy. aussi ci-dessous, n° MDXXXV.) Ces
conventions furent ratifiées par Louis de Belleville, le
26 décembre 1473, dans un acte notarié passé devant le vicomte
d’Évreux, dans lequel il s’intitule seigneur de Belleville,
comte d’Évreux, seigneur de Saintes, de Montmorillon, de Cosnac
et de la Chaize-le-Vicomte, conseiller et chambellan du roi ;
cet acte est revêtu de son sceau. (Arch. nat., P. 13731,
cote 2208.) Le mois précédent, 12 novembre 1473, il avait donné
quittance de 600 livres, sur les 10.000 livres que le roi lui
avait promises en outre pour le récompenser de la cession de
Montaigu. (Id., J. 183, n° 157.)
L’abandon du droit
de traite sur le port de Cosnac, dont le texte est publié ici,
constitue une nouvelle preuve du vif désir de Louis XI de
terminer cette affaire coûte que coûte. Elle lui tenait
tellement à cœur que, sans attendre la signature du traité, dès
le 2 août, de Sablé, il écrivait au sire de Bressuire, lui
annonçant qu’il venait de nommer gouverneur de Montaigu le
sr de Blanchefort, et le pressant d’envoyer dans la
place le plus diligemment possible une garnison et « trente ou
quarante gentilshommes bien seurs, et qu’ilz y soient samedi
prochain, bien habillez et en bon point, etc. ». (J. Vaësen,
Lettres de Louis XI, t. V, p. 163.) La mort
inattendue de Louis de Belleville ne changea rien aux projets de
Louis XI de transformer Montaigu en une grande place de guerre,
pour protéger la frontière de Bretagne ; mais elle détermina des
changements dans les compensations offertes à la veuve, aux
enfants et aux frères du défunt, lesquelles en définitive furent
beaucoup moins avantageuses pour ceux-ci que les conventions du
traité de Sablé. Les négociations se poursuivirent pendant
plusieurs années et donnèrent lieu à deux nouveaux traités, l’un
confirmé par lettres patentes datées de Senlis, mai 1474, dont
on trouvera le texte plus loin (n° MDXXXIV) et l’autre, où il
n’est plus question que de la terre et seigneurie de
Montmorillon à attribuer à la veuve et aux enfants de Louis de
Belleville, fut conclu au mois d’avril 1479. Notre prochain
volume contiendra plusieurs actes relatifs à cette affaire, nous
en signalerons d’autres conservés dans les layettes du Trésor
des chartes, au Parlement, à la Chambre des comptes, etc., et
nous en profiterons pour faire, dans la prochaine introduction,
une étude sur cette période de l’histoire de Montaigu.