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MD

Institution de deux foires par an à Ingrande, au profit de Galehaut d’Aloigny, seigneur dudit lieu et de la Groye.

  • B AN JJ. 197, n° 118, fol. 70
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 38, p. 288-291
D'après a.

Loys, par la grace de Dieu roi de France. Savoir faisons [p. 289] à tous, presens et advenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre bien amé Gallehault d’Aloygné1, escuier, seigneur de la Groye et d’Ingrande, contenant que le lieu et bourg d’Ingrande est assis en païs fertile, bien peuplé et où affluent plusieurs marchans du païs d’environ ; à ceste cause, ledit suppliant y feroit volentiers tenir deux foires chacun an, c’est assavoir le jour et feste de saint Fiacre et l’autre le jour de la Conversacion (sic) saint Pol, se nostre plaisir estoit lui donner et octroyer sur ce noz congié et licence. Pour quoy nous, ces choses considerées et mesmement qu’il n’y a aucunes autres foires à dix lieues à la ronde, qui se tiengnent lesdiz jours, et que lesdites foires ne seront aucunement nuysibles ne prejudiciables à [p. 290] quelxconques autres foires ou marchez, ainsi que ledit suppliant nous a fait dire et remonstrer, à icellui, pour ces causes et autres à ce nous mouvans, et mesmement en faveur des bons et agreables services qu’il nous a faiz le temps passé et fait chacun jour ou fait de noz guerres et autrement, et esperons que encores plus face ou temps avenir, avons octroyé et octroyons, voulons et nous plaist, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, qu’il puisse et lui loise faire tenir audit lieu d’Ingrande à tousjours mès perpetuellement doresenavant, ausdiz jours et festes de saint Fiacre et de la Conversacion (sic) saint Pol lesdites foires chacun an, et icelles foires faire crier et publier ès foires, marchez et assemblées [ès] bonnes villes, bourgades et places marchandes du païs d’environ, et partout ailleurs où besoing sera, pour estre tenues ausdiz jours et en joïr et user doresenavant perpetuellement par ledit suppliant et les siens, à telz et semblables previllèges, droiz, coustumes, terraiges, estallages, fenestrages, forfaictures, vuidanges et depry que font et ont acoustumé faire les autres ayans foires ou païs d’environ. Si donnons en mandement, par cesdites presentes, à noz amez et feaulx gens de noz comptes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans, presens et advenir, et à chacun d’eulx, si comme à lui appartiendra et requis en sera, que de noz presens grace, congié, licence et octroy ilz facent, seuffrent et laissent ledit suppliant et sesdiz successeurs joir et user plainement et paisiblement, sans en ce lui faire, mettre ou donner, ne souffrir estre fait, mis ou donné, ne à sesdiz successeurs, aucun destourbier ou empeschement ores ne pour le temps avenir èsdites foires ne aux marchans suyvans et frequantans icelles, en quelque manière que ce soit. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre scel ordonné en l’absence du grant à cesdictes presentes. Sauf en autres [p. 291]choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné à Vendosme, ou mois d’octobre l’an de grace mil cccc. soixante et unze, et de nostre règne le unziesme.

Ainsi signé : Par le roy, le comte de Dampmartin2, le sire de Bressure3 et autres presens. Tilhart. — Visa. Contentor. De Fontaines.


1 Galehaut d’Aloigny, fils de Pierre, mort en août 1442, et de Marguerite de Mondion, fut seigneur de la Groye, Ingrande, Chêne, Dercé, etc., chambellan et maître d’hôtel du roi Louis XI, un des personnages considérables de la cour de ce prince. L’un de ses neveux n’était autre que le grand prévôt Tristan L’Hermite. Galehaut servit au ban de 1467 comme homme d’armes de la compagnie du seigneur de l’Isle-Jourdain, et dans des lettres patentes du 17 septembre 1472 il est dit homme d’armes des ordonnances sous la charge de Louis de Beaumont, sr de la Forêt. Par autres lettres du 11 juillet 1474, il fut commis à la garde de la prévôté de Saint-Jean-d’Angély. (Anc. mém. O de la Chambre des comptes, fol. 52, 174 v°. Bibl. nat., ms. fr. 21405, p. 171, 187.) D’après le même recueil, la création de deux foires à Ingrande aurait été confirmée par acte daté de Paris, le 5 août 1473. (Mém. O, fol. 89 v°, ms. 21405, p. 178.) Le roi donna en 1479 à Galehaut d’Aloigny le commandement des archers et arbalétriers entretenus dans l’Angoumois, la Saintonge et le gouvernement de la Rochelle, et quand la vicomté de Châtellerault fut réunie à la couronne après la mort de Charles IV, comte du Maine, Louis XI ayant, par lettres patentes données aux Montils-lès-Tours, décembre 1482, érigé dans cette ville un siège royal « qui s’appellera gouvernement de Chastelairault », en nomma gouverneur et capitaine son chambellan et maître d’hôtel, qui fut reçu en cette qualité au Parlement, le 12 août 1483 : « Ce jour, messire Galhault d’Alloigné a esté receu à l’office de capitaine de Chastellerault et a fait le serment en tel cas acoustumé ». (Arch. nat., X1a 4824, fol. 237.) C’est ce personnage qui, avec le prince de Tarente, fut chargé par Louis XI, quand il se sentit menacé de mourir, d’aller trouver François de Paule et de le ramener en France, Galehaut vivait encore le 23 juin 1490 : à cette date Charles VIII lui donna mission de pourvoir à l’avitaillement de plusieurs places, en vue de la guerre qui allait éclater contre la Bretagne. (L’abbé Lalanne, Hist. de Châtelleraud, t. I, p. 316, 407 ; t. II, p. 313). De sa femme, Marie de La Touche-d’Avrigny, qu’il avait épousée le 9 décembre 1442, il eut un fils, Jacques, qui lui succéda et fut grand panetier de France, et trois filles. (Cf. le Dict. des familles du Poitou, nouv. édit., t. I, p. 53.)

2 Antoine de Chabannes né en 1411, mort à Paris le 25 décembre 1488, comte de Dammartin par son mariage (1439) avec Marguerite de Nanteuil, devint, malgré ses excès à la tête d’une bande d’Écorcheurs et sa participation à la Praguerie, grand panetier de France en 1447, bailli de Troyes, puis sénéchal de Carcassonne. Grandement compromis pendant la Ligue du Bien public, il rentra en grâce après le traité de Conflans, et Louis XI le créa grand maître de France l’an 1467. (Voy. le comte H. de Chabannes, Hist. de la maison de Chabannes, in-4°, t. II, 1894, p. 1-287.)

3 Jacques de Beaumont, chevalier, sire de Bressuire, sur lequel cf. ci-dessus, p. 235, note 3.