MCCCCLXXXVIII
Rémission accordée à Don Caulandon, homme d’armes, et à Jean Wach, archer de l’ordonnance en la compagnie de Tanneguy Du Chastel, écossais, qui, logés dans un village voisin de Chauvigny et ayant été contraints d’en venir aux mains avec des gens de la garnison du château, en avaient tué un et blessé plusieurs autres.
- B AN JJ. 196, n° 177, fol. 110 v°
- a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 38, p. 254-256
Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Don Caulandon, homme d’armes de nostre ordonnance soubz la charge et retenue de nostre amé et feal conseiller et chambellan Tanguy de Chastel1, gouverneur de noz pays de Roussillon et de Sardaigne, et de Jehan Wach, archer de ladicte ordonnance, natif du royaume d’Escoce, contenant que, le premier jour de ce present moys de may, environ quatre heures après midi, lesdiz supplians vindrent loger en ung village près de Chauvigné, eulx, leurs gens, harnoiz et chevaulx ; auquel lieu de Chauvigné, icellui Don Caulondon (sic) trouva ung des archers de la garde de nostre corps, avecques lequel il vouloit demourer à soupper cellui jour. Maiz nouvelles lui survindrent que aucuns gens d’armes voulloient [p. 255] aller destrousser ses gens, et incontinent il monta à cheval pour y aller, et appella l’oste de l’ostel où il estoit, auquel il demanda s’il lui devoit riens ; lequel lui respondit que non, et lors il lui pria qu’il voulsist prendre en pacience et que, se ses gens prenoient riens oultre son gré, il estoit prest de le payer. Et sur ces parolles survindrent les gens de la garnison de Chauvigné, en leur compaignie ung franc archer, et si tost que icellui suppliant les aperceust, il alla au devant d’eulx et les salua en leur demandant où ilz alloient. Lesquelz bien mal gracieusement lui demandèrent comment ilz s’estoient logeiz en leur parroisse, qui leur avoit esté donnée pour les fournir. Ausquelz ledit suppliant respondit que, s’il y avoit homme ne femme qui se plaignist de ses gens, qu’il estoit prest de l’amender. Alors, sans autre chose dire, ung de ceulx de leur compaignie lui donna ung coup d’espée sur le coulde du bras tant que à pou près il lui fut couppé, et s’efforcèrent tous les autres de lui donner plusieurs coups d’espées et de javelines. Et à ceste cause, ledit suppliant se retira devers ses gens, ausquelz il dist qu’ilz se meissent en habillement et qu’il y avoit des gens d’armes qui estoient venus pour les oultrager de corps et de biens ; maiz les autres le poursuivirent et descendirent tous à pié, qui commancèrent tous à crier : « A mort ! à mort ! » Et ce voyant, iceulx Don Caulondon et Jehan Wach, supplians, et autres de leurs gens, ilz se mirent en deffense, et commencèrent les autres à frapper sur eulx de tous coustez, et mesmement icellui franc archer, qui estoit le mieulx armé ; lequel icellui Don Caulondon rencontra, et se combatirent ensemble main à main, tellement qu’il lui donna ung coup d’espée par la jambe, pour raison duquel il tumba à terre et incontinent après ala de vie à trepassement. Et avecques ce, y eut plusieurs autres des diz gens d’armes blessez et navrez en plusieurs parties. Pour occasion duquel cas, iceulx supplians, doubtans rigueur de [p. 256]justice, se sont absentez du pays, ouquel ilz n’oseroient, etc. Au seneschal de Poictou et à tous, etc. Donné à Amboise, ou moys de may l’an de grace mil cccc.lxx, et de nostre règne le neufiesme.
Ainsi signé : Par le roy, le sire de Torcy2 et autres presens. De Cerisay3. — Visa. Contentor. Duban.