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CCCXL

Assignation sur les revenus des château, ville et châtellenie de Saint-Maixent, de quatre cents livres de rente annuelle, précédemment données à Savary de Vivonne, sire de Thors, sur les recettes de la châtellenie de Châteaumur.

  • B AN JJ. 76, n° 233, fol. 143
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 13, p. 389-394
D'après a.

Philippes, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, que, comme nostre très chier ainsné fils Jehan, duc de Normandie, [nostre lieutenant] ès parties de la Langue d'Oc, pour certaines consideracions et causes, eust donné à heritaige à nostre amé et feal conseiller, Savari de Vivone1, chevalier, [p. 390] sire de Tors, pour li et pour ses hoirs iiije livres tournois de annuelle et perpetuelle rente, à prendre sur les emolumens, rentes et revenues du chastel et chastellenie de Chasteaumur, lequel don nous confermasmes à nostre dit conseiller, par noz lettres seellées en cire vert, si comme il nous est plus plainement apparu par icelles, des quelles la teneur s'ensuit :

Philippe, par la grace de Dieu, roys de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir veu les lettres de nostre très chier et ainsné filz, le duc de Normandie et de Guienne, contenans la fourme qui s'ensuit :

Jehan, ainsnezfilz et lieu tenant du roy de France, duc de Normandie et de Guienne, conte de Poitou, d'Anjou et du Maine, à touz ceuls qui ces lettres verront, salut. Savoir faisons que nous, considerans les bons et aggreables services faiz a nostre dit seigneur et pere, et [à] nous par nostre amé et feal conseiller, Savari de Vivone, seigneur de Thors, chevalier, et que icellui chevalier, pour cause du dit service, a souffert moult grans paines et travaulz et s'est exposez en pluseurs perilz, en pluseurs lieux, tant pour le fait de ces guerres presentes, [p. 391] en Gascoigne, Xanctonge et ailleurs, comme en pluseurs autres honorables services, qu'il a faiz a nostre dit seigneur et nous, et expose encores de jour en jour, sanz cesser, à icellui chevalier avons donné et octroie, donnons et octroions, de grace especial, de certaine science, par ces présentes, iiijc. livres de rente à heritage, à asseoir en la chastellenie de Chastiaumur, en la seneschaucie de Poitou, en la terre de Belleville, que tenoit le seigneur de Belleville, au plus [près] du lieu appellé les Deffens2, en lieu mains damageable pour nous et plus prouffitable pour le dit chevalier à tenir et explecter pour lui, ses hoirs et ceulz qui de lui auront cause, perpetuelment à touz jours. Toutefois nostre volenté est que, quant il plaira à nostre dit seigneur ou nous asseoir au dit chevalier en lieu convenable iiijc. livrées de terre en lieu des iiijc. dessus dites, que les dites iiijc. livres de terre données au dit chevalier par nous, comme dessus est contenu, retournent en la maniere que elles estoient par avant nostre dit don. Si donnons en mandement par ces presentes au seneschal de Poitou et de Limosin, present et avenir, ou à son lieu tenant, que le dit chevalier, ses hoirs et successeurs, et ceuls qui de lui auront cause, perpetuelment à touz jours, facent et lessent joir paisiblement des dites iiijc. livrées de terre, en ostant tout empeschement qui mis y seroit. Et pour ce que ce soit ferme chose et estable perpetuelment à touz jours, nous avons fait mettre le seel de nostre secret, en l'absence du grant, à ces presentes lettres. Sauf en autres choses le droit de nostre dit seigneur [p. 392] et nostre, et l'autrui en toutes. Donné à Chaumes lès Busensai, ou mois de decembre l'an de grace mil ccc xlv.

Et nous toutes les choses et chascunes d'icelles contenues ès lettres ci dessus transcriptes loons, greons, ratiffions, et de nostre auctorité et puissance roial et de certaine science et grace especial, approuvons et confermons. Et que ce soit ferme chose et estable à touz jours, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes lettres. Sauf nostre droit en autres choses et l'autrui en toutes. Donné au Moncel lez Pons Sainte-Maixance, l'an de grace mil ccc. xlvj, ou mois d'octobre3.

Nous, considerans le bien et leaulté de nostre dit conseiller, que nous savons estre en lui, à sa requeste et de [son] consentement, li avons assigné et assignons, baillons et delivrons les dites iiijc. livres de rente, à prendre pour lui et pour ses hoirs, senz en rendre compte, sur noz emolumenz, rentes et revenues du chastel, ville, chastellenie et ressort de Saint-Maixant, c'est assavoir les rentes et demaines, ventes, paages, la justice et juridicion haute, moienne et basse, o toute cohercion, exercice, prouffiz et emolumens d'icelle, et le scel aus contraux du dit lieu avecques l'esmolument et juridicion d'icelui, jusques à tant que ailleurs les li aions ou au siens souffisanment assis en Poitou, en tele condicion et maniere que, se il est trouvé que les dites choses vaillent plus des dites iiijc. livres de rente, par l'estimacion et presage que nous en ferons faire, le seurplus tournera devers nous, et se moins valent, nous les li parferons et asseirons en et sur autres choses. Et parmi ce le dit Savary et ses hoirs seront tenuz garder et deffendre, au leur et à leurs perilz, le dit chastel de Saint-Maixant [p. 393] contre touz noz ennemis4, pour la quelle garde nous li donnons et octroions pour li et pour ses hoirs, tant comme il auront la garde du dit chastel, oultre les dites iiijc. livres de rente deux cenz livres par an, à prendre sur noz autres revenues du chastel et chastellenie dessus dis, ou ailleurs, tant comme il garderont, li et ses diz hoirs, le dit chastel en la maniere dessus dite et comme il nous plaira, et avecques ce l'usage de nos forez en la dicte chastellenie, à prandre par la main des gardes forez, pour les neccessitez du dit chastel, comme à faire pons, engins et autres neccessitez à la garde d'icellui, et pour ardoir en icellui, sanz excès. Et pourront nous et nostre dit filz, et noz successeurs, reprandre à nostre main les choses dessus. Les dites lettres de nostre dit filz confermons sur le don des dites iiijc. livres de rente, [lesquelles] demourront et seront en telle vertu comme elles estoient avant cest present assignement, et ne pourra le dit sire de Tors empescher ne contredire la dite reprise, à nous ne à nostre dit filz, ne à noz diz successeurs, pour longue tenue ou autrement. Et parmi cest present assignement et bail, le dit Savary ne prandra plus les dites iiijc. livres de rente à lui données sur les revenues de Chastiaumur, fors ou cas de la dite reprise, ou quel cas et aussi ou cas que le dit chastel et chastellenie de Chastiaumur seroit lors rendu, nous ou nostre dit filz, ou celui qui reprandroi t les choses dessus dites, serons ou sera tenuz de asseoir et delivrer [p. 394] souffisanment au dit sire de Tors, ou à ses hoirs, se il ne vivoit lors, les dites iiijc. livres de rente en Poitou, ou ailleurs, en lieu competant. Et nous li avons promis garder et enteriner les choses dessus dites. Sauves et reservées à nous les foiz, les hommages et autres choses qui ne sont baillées ci dessus au dit Savari. Et des choses dessus dites à lui baillées, comme dit est, l'avons receu en foi et en hommage, les quielx il nous a faiz et bailliez, et samblablement le nous feront ses hoirs, et à noz successeurs. Et que ce soit ferme chose et estable ou temps avenir, nous avons fait mettre nostre seel à ces presentes. Sauf nostre droit en autres choses, et en toutes l'autrui. Ce fust [fait] à Paris, l'an de grace mil ccc. xlvij., ou mois de janvier.

Par le roi, à la relacion de messeigneurs de Laon, l'abbé de Saint-Denis, de Revel, de Montmorenci, de Meullent et J. de Chastellé. Mathieu.


1 A la notice déjà longue consacrée plus haut (p. 159 et 160) à Savary III de Vivonne, il convient d'ajouter les renseignements suivants, extraits également des registres du Parlement. L'hébergement de Louchart, qui était litigieux, en 1348, entre Savary et les héritiers de Guillaume Le Comte, avocat, fut saisi par le suzerain pour défaut d'hommage, et mandement fut adressé au sénéchal de Poitou de faire une enquête (16 avril 1348, X1a 12, fol. 103). Un peu plus tard, Jean de Marconnay, évêque. et le chapitre de Maillezais portèrent plainte au criminel contre Savary de Vivonne, qui fut ajourné à deux reprises au Parlement, le 8 mai et le 8 décembre 1350 (X2a 5, fol. 192 et 197). Ils l'accusaient de leur avoir enlevé ou fait enlever par ses gens une somme importante de florins et un bassin d'argent pesant dix marcs ; au préjudice de leur église, et en enfreignant leur sauvegarde. Savary prétendait qu'il était en effet entré en possession de ces deniers, mais sans violence, et du consentement des plaignants, en qualité d'exécuteur testamentaire de son parent, le prédécesseur de Jean de Marconnay. Cette somme était destinée, disait-il, et devait être convertie par lui en pieux usages pour le salut de l'âme de ce prélat. Cependant, par un traité amiable, en date du 11 mars 1351 (n. s.), Savary s'engagea à restituer le tout en deux paiements, le premier à la Saint-Michel 1351, et le second à la saint Michel 1352 (X1c5). Enfin il eut encore a soutenir un procès contre l'abbé de Saint-Maixent, dont il était l'homme-lige, et qui lui reprochait de nombreux abus de justice. Celui-ci demandait qu'il fût condamné à restituer les fruits et émoluments prélevés indûment depuis douze ans, soit trois mille livres parisis, sur les fiefs qu'il tenait de l'abbaye. La cour décida que l'abbé et les religieux exposeraient leur plainte par écrit, que Savary de Vivonne serait ajourné aux jours de Poitou du prochain Parlement, et que, pendant ce temps, information serait faite. Mandement fut adressé en conséquence au sénéchal de Poitou, le 14 mars 1353 (X2a 6, fol. 25 v°).
2 Le fief des Deffens était l'objet d'un litige entre Jeanne de Bauçay, dame de Mauléon, tant en son nom que comme tutrice de Guyard de Thouars, son fils, d'une part, et Jeanne de Belleville, dame de Clisson, d'autre, au moment où les biens de cette dernière furent confisqués. Jean, duc de Normandie et comte de Poitou, ayant été mis en possession de ces biens et par suite substitué aux droits de la veuve d'Olivier de Clisson, fut ajourné au Parlement et mis en demeure de dire s'il entendait reprendre ou abandonner la cause pendante. Son procureur vint à la cour et déclara qu'il renonçait à poursuivre le procès, 28 juin 1345 (X1a 10, fol, 219 v°).
3 Cette donation, ainsi vidimée et confirmée, se trouve enregistrée une seconde fois, mais séparément, au fol. 166 v° du même registre (JJ. 76), et est suivie des mentions : Par le roy, P. Blanchet. — Non cadit hic financia. Clarinus.
4 Savary de Vivonne en prit l'engagement solennel devant Guillaume Gormont, chevalier, prévôt de Paris, le mardi 15 janvier 1348, par acte donné sous le sceau de la Prévôté, et conservé dans les layettes du Trésor des Chartes (J. 400, n° 54). Il déclara avoir pris le château de Saint-Maixent en garde, et fit vidimer les lettres qui sont publiées ici ; « lequel chastel le dit chevalier, de son bon gré, de sa bonne volonté et certaine science gaija en nostre main et promist loyaument et en bonne foy garder bien et loiaument, en la maniere que baillé lui est du roi, et à le rendre, bailler et delivrer au roi nostre dit seigneur, ou à monseigneur le duc de Normandie, ou à leurs successeurs, à leur volonté et requeste... et à rendre tous cous, dommages, mises, salaires et interès qui fais, eus, soustenus et encourus seroient par sa deffaute », sous l'obligation de ses biens et de ceux de ses héritiers, etc.