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DCCXLV

Rémission accordée à Jean Vignaut pour un homicide commis sur la personne de Jean Queyrin, à condition qu'il restera un mois en prison fermée, au pain et à l'eau.

  • B AN JJ. 139, n° 92, fol. 109
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 15-17
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de Jehan Vignaut, povre homme laboureur, chargié de femme et de IIII enfans, contenant comme le jeudi après la saint Vincent qui fu l'an de grace mil CCC IIIxx et VII1, Jehan Queyrin qui amenoit busche du bois de l'Espine, eust trouvé ou grant chemin, en venant de Monstreul Bonin à la ville de Poitiers, en la valée du Fayner, Jehan Vignaut varlet et cousin du [p. 16] dit suppliant, gardant IIII buefs, qui avoit et tenoit une verge nommée aguillée à toucher et chasser beufs, de laquelle aguillée avoir le dit Queyrin ot envye et icelle osta au varlet du dit suppliant ; et lors ledit varlet d'icellui suppliant appella le dit suppliant, qui estoit joygnant et assez près d'illec, en lui disant telles paroles : « Sire, sire, par le corps Dieu, il me oste mon aguillée ! » Et tantost le dit suppliant qui estoit près d'illec, comme courroucié et indigné de ce, courut après le dit Queirin qui estoit après ses bestes et le frappa du poing sur l'eschigne; et adonc le dit Queirin s'en fouy, et le dit suppliant en le poursuiant cheut à terre, et lui relevé de terre, tousjours en poursuiant le dit Querrin, ycellui suppliant ferit et gista le dit Querrin d'une pierre par la cuisse, et après lui gista un caillo qui au dit Querrin ne toucha point. Et avec ce le dit suppliant, en poursuiant tousjours le dit Querrin, print un autre caillo de grez de la grosseur comme un homme a les II poings, et gista le dit suppliant le dit caillo après le dit Querrin, duquel caillo le dit suppliant attaignist et frappa le dit Querrin par derrieres en la teste, tellement que icellui Querrin cheut à terre en soy escriant et disant : « A ! » du quel coup mort s'en est ensuye en la personne du dit Querrin. Pour lequel fait le dit suppliant, doubtant rigueur de justice s'est absenté du païs et n'y ose converser ne repairer, et pour ce [a esté] banny par la justice du lieu pour le dit fait, et a laissié sa dicte femme et ses diz povres enfans tous despourveuz, lesquelz sont en adventure d'estre mendians et desers, et est icellui suppliant en adventure d'estre pery pour ledit fait, se nostre grace ne lui est sur ce impartie, si comme il dit, en nous humblement suppliant que d'icellelui veuillons pourveoir. Pour quoy nous, attendu que le dit suppliant ne fut oncques maiz reprinz ne diffamé d'aucun autre villain cas ou reprouche et qu'il a tousjours esté de bonne vie, renommée ethonneste conversation, et aussi que le dit fait fu fait [p. 17] de chaude cole et qu'il a fait paix et sattisfaction à partie, audit suppliant, ou cas dessus dit, avons quicté, pardonné et remis, etc. Si donnons en mandement au gouverneur delà Rochelle et au bailli des Exempcions et ressors d'Anjou, de Touraine et du Maine, et à tous noz autres justiciers, presens et avenir, ou à leurs lieuxtenans, etc. Donné à Paris, ou mois de septembre l'an de grace mil CCC IIIIXX et dix, et de nostre regne le Xe.

Es requestes par vous tenues du commandement du roy, presens pluseurs du grand conseil. R. Le Fevre. — Voisines.


1 Le 23 janvier 1388 n. s;