DCCCLXXVIII
Confirmation des lettres de rémission accordées par le duc de Berry, comte de Poitou, à Jean Aubert, pauvre marchand, impliqué dans diverses poursuites pour fabrication et émission de fausse monnaie.
- B AN JJ. 156, n° 400, fol. 242 v°
- a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 403-406
Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir esté exposé de la
partie de Jehan Aubert, povre marchant, chargié de femme et de quatre petiz enfans,
que comme de certain delict par lui commis et perpetré pour le temps que il demouroit
en la conté du Perche, il dit avoir obtenu noz lettres de remission, et depuis ait
demouré en la conté de Poitou, et offensé ou delinqué d'avoir perseveré, conversé et
soustenu par aucun temps un faulx monnoier appellé Jehan Bertelot, auquel ledit
exposant bailla ou fist bailler du metail d'or et d'argent pour faire de la monnoye,
et aussy en a acheté et tant que il en puet bien avoir eu jusques à la somme de cent
[p. 404] pieces d'or ou environ, dont il dit avoir obtenu lettres de
remission de nostre très chier et très amé oncle le duc de Berry et d'Auvergne, conte
de Poitou et d'Auvergne et nostre lieutenant ès diz pays, èsquelles sont encorporées
noz dictes lettres de remission, des quelles la teneur s'ensuit :
Jehan, filz de roi de France, duc de Berry et d'Auvergne, conte de Poitou et
d'Auvergne, lieutenant de monseigneur le roy ès diz pays. Savoir faisons à tous,
presens et avenir, à nous avoir esté exposé de la partie des parens et amis de Jehan
Aubert, povre marchant, chargié de femme et de quatre petiz enfans, que comme mon dit
seigneur le roy, par ses lettres scellées en las de soye et cire vert, lui ait
pardonné et remis certain cas de crime par lui commis et perpetré pour avoir conversé,
fové et soustenu pluseurs faulx monnoyers et marchans de faulses monnoyes, et avoir
acheté, vendu, priz et alloué de la dicte faulse monnoye, et priz et eu prouffit, comme
plus à plain est contenu ès dictes lettres, des quelles la teneur s'ensuit : Charles,
etc...1. Et pour ce que le dit Aubert, ou temps du delit commis, estoit demourant
en la conté du Perche, et de present soit demourant en nostre païs de Poitou, il
doubte que noz gens et officiers lui voulsissent pour ycellui cas donner empeschement,
si nous a humblement supplié et requis que sur ce lui vueillons pourveoir. Pour ce est
il que nous, qui aucunement ne nous vouldrions opposer contre la grace et remission de
mon dit seigneur le roy, et eu consideracion à ce que dit est, et ayans agreable tout
ce que mon dit seigneur par ses dictes lettres de grace lui a remis et pardonné, nous
de nostre certaine science et grace especial, si et en tant que mestier lui est,[p. 405] lui
pareillement remettons, quictons et pardonnons, jà soit ce que il n'ait
aucunement vérifié ou fait verifier sa dicte grace, ainsi qu'il appartient. Et
neantmoins d'abondant, pour ce que depuis la dicte grace il a offensé ou delinqué
d'avoir perseveré, conversé et soustenu par aucun temps un faulx monnoyer, appellé
Jehan Berthelot, qui à present est prins et detenu en noz prisons de Poitiers, pour
avoir forgié et fait fausses monnoyes, au quel le dit Aubert bailla ou fist bailler du
metal d'or et d'argent, pour faire de la dicte monnoie, et aussy en a achetté de lui,
et tant qu'il en puet bien avoir eu jusques à la somme de cent pieces d'or ou environ,
nous, considerans la povreté et misere et aussy la charge de femme et enfans du dit
Aubert, et que nous voulons grace et misericorde estre preferée à rigueur de justice,
les diz crimes et tous leurs dependences lui avons remis et pardonné, etc. Si donnons
en mandement à tous noz justiciers et officiers, etc. Donné à Paris, l'an de grace mil
trois cens quatre vins et dix, ou mois de may.
Non obstans les quelles lettres de remission de nous et de nostre dit oncle dessus
transcriptes, il n'a osé ne encores oseroit repairer ne converser en pluseurs lieux de
nostre royaume, où il a souventes foiz à faire et à besongner pour le dit fait de sa
dicte marchandise et autres besongnes, pour avoir la povre vie de lui et de sa femme
et enfans dessus diz, sanz avoir grace et remission de nous, du pareil casque il a eu
de nostre dit oncle, si comme il dit, suppliant humblement que, ce consideré et qu'il
s'est, depuis que il a obtenu la dicte remission de nostre dit oncle, bien, deuement
et loyalment gouverné, sanz avoir fait ne commis aucun crime, nous lui vueillons
eslargir nostre grace sur ce. Nous, ces choses considerées, avons de nostre plus grant
grace au dit Jehan Aubert, ou cas dessus dit, remis, quictié et pardonné, etc. Si
donnons en mandement au bailli de Touraine et des ressors et Exempcions [p. 406] d'Anjou, du Mayne et de Poitou, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris,
ou mois de mars l'an de grace mil CCCC et un, et de nostre regne le XXIIe.
Par le roy,
à la relacion du conseil. P. de la Mote.