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DCCCXLVII

Confirmation d'une rémission accordée, onze ans auparavant, à Jean Bernart pour le meurtre d'Eliot Durant, dans une rixe, bien qu'il eût aggravé son cas depuis en s'échappant de prison et en rompant son ban.

  • B AN JJ. 153, n° 418, fol. 281
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 313-315
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons a tous, presens et advenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Jehan Bernart, povre homme laboureur, chargié de femme et d'enfans, [p. 314] du pays de Poitou, contenant que comme, onze ans et huit moys a ou environ, parce que un appellé Heliot Durant fist abaier et courre un chien à une truye qui estoit au dit suppliant, icelluy suppliant qui lors estoit en son hostel, yssy hors de son dit hostel, qui vit et apperçut ce, et veant le chien qui moult oppressoit de faire mal à ycelle sa truye, s'adreça au dit Heliot et luy dist qu'il faisoit mal de ainsi grever et faire mal par son chien à la dicte truye, lequel respondi que aussy feroit il contre lui, s'il estoit mestier ; et incontinent le dit Heliot tenant en sa main un baston, comme plain de sa volenté desraisonnable, s'adreça à ycellui suppliant en soy efforçant de le vouloir ferir, laquelle chose il eust fait, se ne fust ce que ledit suppliant receut le cop de baston aux mains, et lui osta le dit baston, du quel comme esmeu, après ce qu'il le lui ot osté, en donna un cop parmi la teste au dit Heliot Durant, à sang et à playe, et atant se retray en son hostel et lessa sa truye dehors ; et sa femme qui riens ne savoit de ce et qui queroit la dicte truye trouva d'aventure le dit Heliot qui estoit yvre, si comme il lui sembloit, laquelle de bonne foy le prist et l'amena en son dit hostel. Et quant elle y vint, le dit suppliant aussy vit et apperceut que il seignoit de la teste, et pour cela dicte femme le fist charmer et ordonner au mieulx qu'elle pot par le dit suppliant son mary, en lui faisant le mieulx qu'ilz porent, et le firent retraire bien et doulcement en son hostel, sans rien declairier qui ce lui avoit fait, pour ce qu'il estoit yvre. Lequel Heliot le lendemain, par son petit et mauvais gouvernement, environ heure de midi, ala de vie à trespassement. Pour occasion du quel fait le dit suppliant, pour doubte de rigueur de justice se feust absentez et trait par devers nous ou nostre court, sa dicte femme et ses biens estans en arrest en la juridiction de Fontenilles; et eust obtenu pour et à cause du dit cas certaines noz lettres de remission en las de soye et cyre vert, et pour verifier le contenu en ycelles, se feust [p. 315] rendu prisonnier en noz prisons, de Saint Jean d'Angeli, et illec ses parties adverses appellées, qui estoient grans et puissans amis et affins de noz officiers et qui moult durement et rigoureusement s'efforçoient de proceder contre lui, veant que desjà il avoit esté bien XV jours ou plus prisonnier, sans ce que en son fait eust aucun appointement et que delivrance feust aucunement faicte de sa dicte femme qui de ce n'estoit en riens coulpable, et qu'il n'avoit personne qui le poursuist ne qui riens lui administrast, yssy hors de la dicte prison et s'en ala au dit lieu de Fontenilles, où il prist sa femme ainsi arrestée par justice, et se absenterent dès lors du païs en delessant leurs diz enfans et biens ; lesquelz depuis le dit temps ont souffert grant povreté et misere, et leurs diz enfans cheuz en grant povreté et desolacion, et les aucuns d'iceulx leurs enfans povres mendians au pays, se par nous ne leur estoit sur ce eslargie nostre grace et misericorde, requerans sur ce le remede de nostre provision. Pour ce est il que nous, attendu et considéré ce que dit est, le long temps qu'il a que le dit fait advint par cop de meschief, la desolacion et povreté de lui, sa femme et ses diz enffans, ainsy estans mendians, à ycellui suppliant avons quicté, remis et pardonné la dicte prison brisée et ban, se aucun s'en est ensuy, ensemble ledit arrest et ban de sa dicte femme, etc., et que il puisse verifier ses dictes lettres de remission tout ainsy et en la fourme et maniere qu'il eust fait ou peu faire par avant le département et bris de prison, pourveu que dedens II mois à compter de la date de ces presentes, le dit suppliant se rende prisonnier en noz prisons du dit lieu de Saint Jehan d'Angeli, pour ester à droit et verifier les choses dessus dictes. Si donnons en mandement au seneschal de Xantonge et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou moys d'aoust l'an de grace mil CCC IIIIXX XVIII, et de nostre regne le XVIIIe.
Par le roy, à la relacion du conseil. De la Mote.