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DCCLXXX

Rémission accordée à Pierre Vigouroux, de Charroux, qui avait tué Pierre Mériot, curé d'Asnois, amant de sa femme.

  • B AN JJ. 144, n° 127, fol. 69
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 134-136
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion de Pierre [p. 135] Vigouroux1, demourant en la ville de Charros, contenant comme par longtemps Pierre Meriot, prestre, curé d'Anoiz, ait maintenu la femme du dit suppliant, habité et conversé avec elle charnelment, et par plusieurs foiz ait esté trouvé dedens la chambre d'icellui suppliant et ès autres lieux du pourpris de son hostel, et de ce est voix et commune renommée en la dicte ville de Charros, et ce venu à la congnoissance du dit suppliant, lui remembrant que icellui prestre avoit esté trouvé en sa chambre, comme dit est, et qu'il lui avoit dit à un soir par avant, en la presence de sa femme mesmes, par maniere de moquerie, que il avoit couchié avec elle par pluseurs fois, courroucié et esmeu de ce et non sans cause, acompaignié de Michiel Boutine et Pierre Dubois, ses cousins, se feussent transportez en l'ostel Guillaume Jouyn, en ycelle ville de Charroz, à heure de jour faillant, et là eussent trouvé le dit prestre, au quel le dit suppliant demanda qu'il avoit fait en sa chambre. Lequel prestre lui respondi pleinement qu'il y estoit alé en esperance de couchier avec sa femme, et que autres foiz y avoit couchié et eu compaignie avec elle charnelment, comme dit est. Et en ce disant, tenoit une dague toute nue en sa main. Et lors le dit suppliant et le dit Michiel, veans la mauvaistié du dit prestre et ses villaines et deshonnestes paroles, de chaude cole se pristrent au dit prestre, et le tirerent hors de Tostel emmi la rue et ferirent sur lui, et lui donnerent plusieurs cops dont mort s'ensuy en sa personne, en ycelle place mesmes. Pour le quel cas le dit suppliant, doublant rigueur de justice, s'est [p. 136] absenté du païs, ou quel il n'oseroit jamais retourner ne converser, se nostre piteable grace ne lui est sur ce extendue, si comme il dit. Pour quoy nous, eue consideracion aus choses dessus dicte, et à ce que on dit le dit prestre avoir esté homme de très mauvaise vie, et autres foiz pour converser avec femmes avoit esté batu et villené à Loudun, et trouvé en l'eglise de Saint Souplice de Charroz de nuit, où il avoit ouvert les almoires ou estoient les ournemens et calices de la dicte eglise, et que le dit suppliant toute sa vie a esté et est homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion, si comme il dit, à ycellui suppliant ou cas dessus dit avons, de grace especial, quictié, remis et pardonné, etc., parmi ce qu'il sera pugny civilement, selon sa faculté, etc. Si donnons en mandement par ces présentes au bailli des Exempcions de Touraine, d'Anjou, du Maine et de Poitou, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou moys de fevrier l'an de grace mil CCC IIIIXX et douze, et le XIIIe de nostre regne.

Par le roy, à la relacion du conseil. N. de Voisines.


1 Pierre Vigouroux avait obtenu, en avril 1392, des lettres de rémission pour avoir été au service des Anglais, alors qu'ils occupaient le château-fort de Font-le-Bon. (Ci-dessus, n° DCCLXVI, p.74.)