DCCCXL
Rémission octroyée à Pierre de Breneen, écuyer, capitaine de la Roche-sur-Yon, accusé de complicité dans le rapt de Tiphaine du Fou, enlevée de force par Jean de Lezenet, son parent.
- B AN JJ. 153, n° 188, [corr. 219], fol. 118
- a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 295-299
Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble
supplicacion de nostre amé Pierre de Breneain1,
escuier, capitaine de la Roche sur Ion pour nostre amé et feal le sire de Clichon,
contenant que, comme environ la mi karesme l'an mil CCC IIIIXX et XVI, le dit suppliant
et sa femme feussent venus du dit lieu de la Roche au lieu de Minières2 lez Saumeur en Anjou,
veoir la mere de la femme d'icellui suppliant, qui pour lors estoit malade, et aussi
certains heritaiges et possessions qu'ilz avoient prez du dit lieu de Saumur, desquelx
heritaiges Jehan de Lezenet3, parent du dit suppliant, avoit eu la garde et gouvernement par aucun
temps. Et pendant que le dit suppliant et sa femme demourerent ou dit païs, le dit
Lezenet, acompaignié de pluseurs compaignons armés, prindrent [p. 296] de fait
Thiphaine du Fou, niepce de Jehan du Fou4, elle estant en la compaignie du dit
Jehan du Fou, de sa femme et autres gens, lesquelx s'efforcerent de resqueure la dicte
Thiphaine, et pour ce furent, si comme l'en dit, navrez et batus parle dit de Lezenet
et ceulx de sa compaignie, qui enmenerent de fait la dicte Tiphaine en un lieu appellé
la Fontenelle5, à demie lieue prez du manoir de Minières, appartenant au dit
suppliant6. Ou quel lieu le
dit de Lezenet envoya quérir ycellui suppliant, qui ala ou dit lieu de Fontenelle, où
il trouva ycelle Thiphaine avec ledit de Lizenet, qui lui dist que c'estoit sa femme.
Et lors le dit suppliant respondi qu'il l'en amoit mieulx et lui fist bonne chiere. Et
tantost après, s'en retourna le dit suppliant [p. 297] au dit lieu de Minieres où
sa dicte femme estoit, et se partirent pour aler au dit lieu de la Roche, où ilz
trouverent le dit de Lezelet (sic) et la dicte Tiphaine qui se disoit estre sa
fiancée. Aus quelx le dit suppliant, sa femme, parens et amis firent très bonne
chierre, et aux compaignons, tant au dit lieu de la Roche que ou païs d'environ, par
l'espace de huit jours ou environ, depuis ce que ledit Lezenet lui ot dit la maniere du
fait dessus dit. Et aprez ce, le dit de Lezenetet la dicte Tiphaine se partirent pour
aler en Bretaigne devers les pere et mere du dit de Lezenet, afin de espouser l'un
l'autre et faire les solempnitez et noces, comme acoustumé est de faire en tel cas, si
comme le dit de Lezenet disoit. Et depuis ce, nostre très chiere et amée tante la
royne de Jehrusalem et de Secille7 eust rescript au dit suppliant comment le fait dessus dit avoit esté
commis et perpetré en son païs d'Anjou et qu'il feist diligence de savoir et enquerir
où estoit la dicte Thiphaine, et que s'il la povoit trouver, il la preist et admenast
par devers elle à Angiers, et les dictes lettres receues, se feust le dit suppliant
acompaignié de pluseurs personnes et parti pour aler ou dit pais de Bretaigne, pour
savoir s'il pourroit trouver la dicte Thiphaine, laquelle il trouva en la ville du
Bourc d'Auguen, à quatre lieues prez de Josselin en Bretaigne, et ycelle prist et mena
en garde au dit lieu de Josselin, avec la femme du capitaine dudit lieu, où il la
laissa, pour doubte que elle ne lui feust rescousse et ostée, et vint le dit suppliant
par devers nostre dicte tante au dit lieu d'Angiers, lui dire la diligence qu'il
avoit faicte et le lieu où il avoit laissée la dicte Thiphaine. Et tantost après,
nostre dicte tante renvoia le dit suppliant avec son cappitaine du chastel du dit lieu
d'Angiers et autres ses gens au dit lieu de Josselin, querir la dicte Thiphaine ;
laquelle il admenerent [p. 298] par devers nostre dicte tante, qui ycelle a
depuis rendue à ses parens et amis, et a esté mariée, si comme l'en dit. Pour
occasion du quel fait, les biens d'icellui suppliant ont esté prins et mis en nostre
main, et avec ce a esté adjourné à comparoir en personne et de main mise en nostre
court de Parlement, pour respondre à Guillemet Laignel, soy disant tuteur et curateur
du dit (sic) Jehan de Margie8, à nostre
procureur général et à autres qui partie s'en vouldront faire. Et pour ce, le dit
suppliant doubtant rigueur de justice, nous a humblement supplié que sur celui vueillons
impartir nostre grace. Pour quoy nous, attendu ce que dit est et que le dit
suppliant a tousjours esté de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sans ce
qu'il feust oncques reprins, convaincu ne attaint d'aucun vilain cas, et nous a
grandement servi ou fait de noz guerres, et que par sa bonne diligence, la dicte
Thiphaine a esté rendue à ses parens et amis saine et entiere, et sans avoir esté
corompue ne violée par le dit de Lezenet, ne autre de la compaignie, et a esté depuis
et est bien et grandement mariée, si comme on dit, et pour contemplacion du dit sire
de Cliçon dont le dit suppliant est famillier, etc., le fait et cas dessus dit,
etc., lui avons pardonné, quicté et remis, etc. Si donnons en mandement à noz amez et
[p. 299] feaulx conseillers tenans nostre present Parlement et à tous noz autres
justiciers, etc. Donné à Paris ou mois d'avril l'an de grace mil CCC IIIIXX et XVIII, et
de nostre regne le XVIIIe.
Par le roy, à la relacion du conseil. Chaligaut.