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DCCCXXIX

Confirmation de la sentence des commissaires du roi sur le fait des francs-fiefs et nouveaux acquêts, portant maintenue de noblesse en faveur de Tassin Scolin, demeurant à Saint-Etienne de Sérigny.

  • B AN JJ. 151, n° 187, fol. 88
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 265-271
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, nous avoir veu les lettres des quelles la teneur s'ensuit : A tous ceulz qui ces lettres verront et orront, Jehan le Baener, grenetier à Laval Guion, et Guillaume Guerin, commissaires de par le roy nostre sire ès pays de Touraine, Anjou et du Maine sur le fait des finances des acquisitions faictes par gens d'eglise et personnes non nobles, salut. Comme par les lettres royaulx du roy nostre sire puet apparoir, dont la teneur s'ensuit :
Charles, par la grace de Dieu roy de France, à Guillaume [p. 266] Bouchart1, Jehan le Banier, grenetier de Laval Guion, et à Guillaume Guerin, salut. Comme nous jà pieça, par la deliberacion de noz amez et feaulx tresoriers à Paris, et par nos autres lettres, vous eussions commis et ordenez et chascun de vous à vacquer et proceder et entendre sur le fait des nouveaux acquès faiz par gens d'eglise et personnes non nobles ès païs de Touraine, d'Anjou et du Maine, et ès mettes et ressors d'iceulx païz, tant en regales, fiez enclavez comme dehors, confians à plain de vos sens, loyaultez et bonnes diligences, et aussi à la relacion de nos diz tresoriers, vous avons commis et ordenez, et par ces presentes commettons, ordenons et establissons commissaires sur le dit fait ès diz païs. Si vous mandons, ou aux deux de vous, ou cas que les trois n'y pourroient vacquer, ou l'un seroit empeschié d'autres besongnes, que ou dit fait procedez et entendez diligenment, et par ces presentes vous avons donné et donnons, aux troiz ou deux de vous, plain pouvoir de finer et composer avecques tous non nobles et gens d'eglise, qui nous doivent ou pourront devoir aucune finance à cause des fiez ou choses nobles par eulx faiz et acquis, ès diz païs et ès mettes et ressors d'iceulx, de personnes nobles ou en fiefz nobles, pourveu que les gens d'eglise les aient acquises en leurs propres et privez noms, selon la juste valeur d'iceulx et les instructions sur ce faictes à vous envoyées, et de les contraindre à ce, et aussi toutes gens d'eglise à mettre hors de leurs mains, tant religieux comme autres, et à bailler par declaracion les dons, lais, augmentacions et acquests par eulx faiz ès diz pais et ès mettes et ressors [p. 267] d'iceulx, par toutes voies et manieres deues et raisonnables et qu'il est acoustumé à faire en tel cas. Et les composicions que vous aurez faictes, baillez au receveur sur ce ordené, pour les faire par lui lever et exploictier à nostre proufit. Et voulons et nous plaist que tous ceulz qui auront finé et composé avecques vous, les deux ou les trois de vous, par la maniere que dit est, à cause des diz nouveaux acquès, en soient et demeurent et les aians cause d'eulx à tousjours mais quictes et paisibles, et dès à present les en quictons en rapportant lettres des diz commissaires et quictance du paiement des dictes finances du dit receveur. Et neantmoins, pour ce que par les registres des tabellions jurez ès diz païs vous pourra apparoir de pluseurs acquisicions faictes par gens d'eglise et personnes non nobles, dont finance nous est deue, lesquelles acquisicions par aventure pourroient estre recelées par ceulz qui les possident, nous mandons et estroictement enjoignons à tous les tabellions des diz lieux et païs qui ont esté et sont, et qui pour le temps avenir, durant vostre commission, y seront, qu'ilz vous facent ostencion et lecture de leurs registres, se mestier est, et par vous en sont ou seront requis, afin d'en extraire ce qui pour nous vous sera necessaire. Et se aucuns vous sont desobeissans ou refusans, ou à voz commis et deputez, adjournez les ou faictes adjourner, à certain et competant jour, par devant nos diz tresoriers, à comparoir personnelment et à respondre à nostre procureur sur ce que pour occasion de ces choses, les circonstances et deppendences d'icelles, leur vouldra requerir et demander, et proceder en oultre selon raison. Et tellement procedez et entendez ou dit fait que de bonne diligence vous en doiez estre recommandez, et que le dit fait soit briefment par vostre bonne diligence mis à fin et à deue conclusion. Saichans que, se ainsi le faictes, vous de la peine et despense que vous y ferés nous vous ferons telement remunerer que vous en devrés estre contens, en certiffiant souffisanment [p. 268] sur ce nos diz tresoriers de tout ce que fait ou fait faire aurez en ceste partie. De ce faire vous donnons pouvoir, mandons et commandons à tous nos justiciers, officiers et subgiez que à vous ou aux deux de vous, et à vos commis obeissent diligenment et entendent, et vous prestent conseil, confort et aide, se mestier est et par vous en sont requis. Donné à Paris, le XIIIe jour d'aoust l'an de grace mil CCC quatre vins et quinze, et le XVe de nostre regne. — Ainsi signé : Par les trésoriers. G. Millerat.
Par vertu desquelles lettres royaulx dessus transcriptes et du povoir à nous donné par ycelles, nous avons fait appeller et convenir par devant nous Tassin Scolin2, demourant à Saint Estienne de Sarigné, pour nous apporter et bailler par declaracion toutes et chacunes les rentes, possessions et choses que il tient, acquises par lui ou par ses predecesseurs de personnes nobles, ou qui font parties de fiefs nobles, depuis le temps contenu ès instructions royaulx, afin qu'il feust tenu d'en faire finance au roy nostre dit seigneur, selon le contenu des dictes instructions. Lequel Tassin Scolin disoit à sa deffense et proposoit par devant nous en jugement que tenu n'estoit d'en paier ne faire aucune finance au roy, par ce qu'il est noble personne du costé et ligne de par son pere et né et extrait de noble lignée, offrant le dit Tassin Scolin de ces choses prouver et enseigner souffisanment. Lequel propos par lui fait nous lui nyasmes à toutes fins, et sur ce assignasmes jour au [p. 269] dit Tassin, pour prouver de sa noblesse et enseigner comme en tel cas appartenoit. Auqueljour le dit Tassin a produit et amené par devant nous certains tesmoings, desquelx les noms s'ensuivent, c'est assavoir Pierre de Mausson3, chevalier, messire Guillaume de Coué4, chevalier, messire Fouchier de Mellay, chevalier, Derrenne (sic) de Mons, Jehan de Saint Ponçain, escuiers, Guillaume Luillier et Jehan Luillier5, les quielx tesmoings nous avons fait jurer solempnelment et diligenment examinez, et leur deposicion mise par escript et retenue par devers nous ; par la deposicion desquielx tesmoings nous avons trouvé et sommes souffisanment informez que le dit Tassin Scolin est noble personne et qu'il a joy et usé en tous cas et en toutes manieres du previlege de noblesse, et ses predecesseurs paravant [p. 270] lui. Sur la deposicion desquielx tesmoings nous a esté requis o grant instance, de la partie du dit Tassin, que par nous droit et jugement lui feust fait sur ce. Et partant, veu et consideré la deposicion des diz tesmoings, avons dit et prononcié par jugement et sentence que le dit Tassin a bien et deuement prouvé ses ententes, et qu'il est noble personne, né et extrait de noble lignée, et l'en avons envoié et envoyons sans jour et sans terme, et sans faire finance, et absolt par jugement de la demande et peticion dessus dicte. En tesmoing des quelles choses, nous avons mis noz seaulx à ces presentes, et à greigneur confirmacion, nous à nostre requeste y avons fait mettre et apposer le seel des contrats de Faye la Vinouse. Donné à Lengès, soubz noz signez manuelz, le XXe jour d'octobre l'an mil CCC IIIIXX et quinze. — Ainsi signé : Banier, Guerin.
Les quelles lettres dessus transcriptes et toutes et chascunes les choses contenues en ycelles nous avons fermes, estables et agreables, ycelles voulons, louons, approvons, ratifions et par la teneur de ces presentes, de nostre grace especial, plaine puissance et auctorité royal les confermons, en tant qu'elles ont justement et deuement esté faictes et passées en force de chose jugée. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes au bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d'Anjou, de Poitou et du Maine, et à tous noz autres justiciers et officiers, presens et avenir, ou à leurs lieux tenans et à chascun d'eulx, si comme à lui appartendra, que Thassin Scolin, nommé ès dictes lettres, facent, sueffrent et laissent joir et user paisiblement de nostre presente confirmacion, sans le molester ne empescher, ne souffrir estre molesté ou empesché en aucune maniere au contraire. Et afin que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous à ces presentes lettres avons fait mettre nostre seel, sauf en autres choses nostre droit et l'autruy en toutes. Donné à Paris, ou mois de mars l'an [p. 271] de grace mil CCC IIIIXX et XVI, et de nostre regne le XVIIe.
Par le roy, à la relacion du conseil. Mercier.


1 Guillaume Bouchart avait été chargé déjà, par lettres du 1er avril 1394, d'une mission semblable dans le comté de Poitou, en compagnie de Jean Guérin. (Voy. ci-dessus, p. 156.) La Touraine, l'Anjou et le Maine, limites assignées aux trois commissaires sur le fait des francs-fiefs et nouveaux acquêts, comprenaient le Mirebalais, le Loudunais et la châtellenie de la Roche-sur-Yon, qui faisaient partie de l'apanage d'Anjou.
2 Les renseignements sont rares sur cette ancienne famille poitevine. En 1453, Pierre Scolin, meurtrier du prieur de Céaux, fut poursuivi à ce sujet devant le sénéchal de Poitou par l'abbé et les moines de la Trinité de Mauléon, dont dépendait le prieuré-cure de Céaux. L'affaire portée en appel devant le Parlement occupa la cour le 2 juin et le 12 juillet de cette année. (X2A 26, fol. 240 v° et 283.) Pierre Scolin obtint des lettres de rémission pour ce meurtre. (JJ. 182, n° 110, fol. 62.) Artus Scolin, sr de Launay, maître d'hôtel de François Ier, fut commis par lettres datées de Lyon, le 30 juillet 1525, à faire rendre compte aux personnes chargées de mener des vivres aux armées, des deniers qu'elles avaient reçus en Poitou, Saintonge, Guyenne, Périgord, etc. (Bibl. nat., ms. fr. 5779, fol. 129.)
3 La famille de Mausson devait son nom à la tour de Mausson, plus ordinairement écrit Mosson, mouvant de Mirebeau, bien que située en dehors du Mirebalais, dans la paroisse de Braye-sous-Faye-la-Vineuse. Pierre de Mausson devait être un cadet, le chef de la famille, de 1369 à 1407 au moins, se nommant Tartarin de Mausson. (Voy. le reg. P. 13342, fol. 83; M. E. de Fouchier, La baronnie de Mirebeau du XIe au XIIIe siècle, p. 256-258, 274 ; M. Carré de Busserolle, Dict. géogr. d'Indre-et-Loire, v° Mosson.)
4 Guillaume de Coué était capitaine de Faye-la-Vineuse en 1366-1367, et nous avons publié des lettres de rémission de février 1367 pour des représailles qu'il avait exercées avec Jean III, comte de Sancerre, contre Bouchard de l'Ile-Bouchard, en prenant comme otages des sujets de ce seigneur. (Voy. notre tome III, p. 347 et 351.) Cet acte n'avait pas mis fin à la querelle, et les poursuites furent reprises au Parlement même après la mort du sr de l'Ile-Bouchard, par son fils. Elles se terminèrent par un accord, que nous avons retrouvé depuis, entre le comte de Sancerre, Guillaume de Coué et Louis de Langon, d'une part, le sr de l'Ile-Bouchard et Jean Prévost, l'un des otages, d'autre. Les parties déclarent se quitter respectivement des attaques et faits de guerre qu'elles se reprochaient, renoncer à tout procès, et se promettent désormais une bonne et mutuelle amitié. Cet accord est du 9 juillet 1383. (Arch. nat., X1C 47.)Le 3 avril 1388, Guillaume de Coué fit hommage à Marte duchesse d'Anjou, dame de Mirebeau, de son hôtel de Champigny-le-Sec et dépendances, avec la promesse habituelle de bailler son aveu dans les quarante jours. Il possédait aussi un hôtel à Bernay en la châtellenie de Faye-la-Vineuse, pour lequel il devait aussi l'hommage lige au duc d'Anjou, hommage qu'il fit à Angers le 2 avril 1407. (P. 13342, fol. 83 et 91.)
5 Un Aimery Luillier était en procès au Parlement, le 16 juillet 1400, avec le chapitre de Saint-Georges de Faye-la-Vineuse, touchant une rente de froment. (X1A 47, fol. 143.)