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DCCCXXIV

Rémission accordée à Jean Belotin, de Souché près Niort, pour le meurtre de Perrot Paumier.

  • B AN JJ. 151, n° 4, fol. 1 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 254-256
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, à nous avoir esté humblement exposé de la partie de Jehan Belotin, de Souchis près de Nyort en Poitou1, comme lundi après Noël derrenier passé, en venant de la taverne, il eust encontré Perrot Paumier derrenier, parrastre de la mere de la femme du dit Belotin, lequel Perrot dist à icellui Belotin qu'il vouloit marier la mere de sa femme, au quel icellui Belotin respondi qu'il lui plaisoit bien; si lui demanda le dit Perrot si il vouloit que le mariage feust creanté en [p. 255] son hostel, et il respondi que non et que sa femme estoit malade. A donc icellui Perrot dist que si seroit et part pluseurs foiz, le dit Belotin tousjours contredisant ; et lors le dit Perrot dist au dit Belotin que le dit mariage seroit creanté en son hostel2, voulsist ou non ; auquel Perrot le dit Belotin respondi que doncques y en auroit il de courrouciez, et le dit Perrot dist que ce pourroit il bien estre le premier. Et lors le dit Belotin defendi son chenal au dit Perrot et lui dist que s'il y venoit, qu'il le courrouceroit, et atant se departirent l'un de l'autre, et ala chascun en son hostel. Maiz tantost après, le dit Perrot vint en l'ostel du dit Belotin, print un fagot, le bouta au feu et s'asist à la table ; et lors le dit Belotin qui estoit alez traire du vin pour ses gens, vint et asist le pot sur la table, et quant il vit le dit Perrot, il prinst son coustel et le bouta en sa gayne, et se parti de son hostel. Et lors le dit Perrot lui demanda où il aloit, et le dit Belotin lui respondi qu'il n'en avoit que faire. Si lui dist lors le dit Perrot qu'il estoit un mauvaiz garçon. Et adonc le dit Belotin courroucié dist : « Suy je appelle garçon pour une vil garce ! » et prist la barre de quoy il fermoit son huys et fist semblant de vouloir ferir sur sa femme, combien qu'il n'en eust aucune voulenté, maiz le faisoit afin que le dit Perrot yssist de sa maison. Et lors le dit Perrot et la mere de la femme dudit Belotin lui osterent la barre qu'il tenoit; lequel Belotin, doubtant que le dit Perrot et sa dame ne le batissent, sacha son coustel et fist semblant de vouloir ferir le dit Perrot qui, pour la paour qu'il ot cria au meurtre et issy de l'ostel du dit Belotin atout la barre, encontre lequel Perrot icellui Belotin ferma son huys; après lequel huis fermé, le dit Perrot cria au dit Belotin qu'il saillist hors et qu'il alast compter à lui, c'est assavoir pour estre [p. 256] batu ; lequel Belotin pour les paroles du dit Perrot ne se voult oncques mouvoir de son hostel, ainçois estoit apuyé contre l'uis, quant icellui Perrot de la barre qu'il tenoit y fery tant de coups qu'il l'ouvry, et fist cheoir icellui Belotin contre une queue. Et lors le dit Belotin dist au dit Perrot qu'il s'en alast, ou l'un d'eulx y mourroit. Et adoncques le dessus dit Perrot cuida ferir de la barre qu'il tenoit le dit Belotin, qui se aproucha près de lui tant qu'ilz se entreprindrent à bras, et tant finalement que icellui Belotin, doubtant que le dit Perrot ne le tuast, cuidant le ferir ou bras, le navra en la gorge, de laquelle navreure mort s'est ensuye en la personne d'icellui Perrot, environ demie heure après le coup. Pour lequel fait le dit suppliant s'est absentez du païs et est en aventure d'estre desert à tousjours, si comme il dit, en nous humblement suppliant, comme il en touz ses autres faiz ait esté et soit homme de bonne vie, renommée et honneste conversacion, sanz avoir esté convaincu, condempnez ne actaint d'aucun villain meffait, nous sur ce lui vuillons eslargir nostre grace et misericorde. Nous adecertes, pour consideracion des choses dessus dictes, au dit exposant ou cas dessus dit avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Xanctonge, gouverneur de la Rochelle et à touz noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois d'octobre l'an de grace mil CCC IIIIXX et XVI, et de nostre regne le dix septiesme.
Es requestes de l'ostel. G. Millerat.


1 Le scribe a écrit par distraction a « en Pontieu »
2 Le texte porte immédiatement à la suite les mots « mais tantost après », qui sont, sinon contraires, du moins inutiles au sens.