[p. 430]

DCCCLXXXIX

Rémission accordée à Jean Charrier, clerc, de Saint-Christophe-du-Ligneron, à l'occasion du meurtre de Christophe Pennart qui, dans une lutte commencée sans motif, avait été frappé par ledit Charrier et par Guillaume Chuffoulon1.

  • B AN JJ. 158, n° 41, fol. 23
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 430-432
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir,[p. 431] nous avoir receu l'umble supplicacion des parens et amis charnelz de Jehan Charrier, clerc, contenant comme le merquedi après les octaves de la feste de Nostre Dame mi aoust l'an mil CCC IIIIXX XVI, Guillaume Chuffoulon, boucher, lors demourant en la ville de Saint Christofle du Ligneron, ou diocese de Luxon en Poitou, eust prié le dit Jehan Charrier lors estant en la dicte ville de Saint Christofle, qu'il alast avec lui à un village près de la dicte ville, appelle le Buignon, en l'ostel d'un appellé Jehan Chauvet, pour veoir certains chatriz ou moutons que lui vouloit vendre le dit Chauvet, si comme disoit icelui Chuffoulon ; lequel Charrier lui eust accordé de y aler, et s'en feussent alez ensemble yceulx Charrier et Chuffoulon en l'ostel du dit Chauvet, ou dit village de Buignon, où ilz eussent trouvé le dit Jehan Chauvet et eussent parlé à lui ; lequel leur eust dit qu'il ne povoit lors encores entendre à eulx, en les priant de l'attendre jusques à ce qu'il feust venu de là où estoit son bestail, lequel il vouloit aler veoir ; et pour ce iceulx Charrier et Chuffoulon se feussent mis ou jardin du dit Chauvet, joingnant de sa maison, pour y attendre ycelui Chauvet, et le y eussent attendu jusques à environ souleil couchant. A la quelle heure, Christofle Pennart feust venu au dit jardin d'icelui Jehan Chauvet, et impetueusement et effrayement eust demandé au dit Charrier et Chuffoulon qu'ilz estoient ; lesquelz veans le dit Christofle ainsi effrayé, ne lui eussent respondu aucune chose. Et lors le dit Christofle plus impetueusement que devant les eust dit que il renyoit Dieu, se il ne les faisoit bien parler. Et lors ycelui Christofle Pennart, garni d'un baston qu'il tenoit en sa main eust couru sus aus diz Charrier et Chufoulon, et leur eust donné pluseurs cops ; lesquelz Charrier et Chuffoulon, doubtans le peril de leurs corps et mesmement que le dit Christofle estoit moult fort homme de corps, et avoit jà autrefoiz batu et injurié le dit Charrier, se feussent pris au corps d'icelui Christofle [p. 432] Pennart et eulx trois ensemble se feussent telement combatuz et entrefrappez que mort s'en soit ensuie, X jours après ou environ, en la personne du dit Christofle Pennart. Pour occasion duquel fait le dit Jehan Charrier, doubtant rigueur de justice, se soit absenté du dit païs et n'y oseroit ne ose plus converser ne habiter, dont grant inconvenient et dommage lui est pour ce ensuy, et pourroit encore plus faire, se par nous ne lui estoit sur ce impartie nostre grace et misericorde, si comme dient yceulx supplians, en implorant humblement ycelle. Pour quoy nous, ces choses considerées et qu'il y a longtemps que le cas advint, lequel advint par chaleur et non pas de fait advisié, du costé du dit Charrier, et que icelui Charrier a tousjours esté et est en tous ses autres faiz homme de bonne fame, renommée et honeste conversacion, sanz avoir esté attaint ne convaincu d'aucun autre villain cas, blasme ou reprouche, et qu'il a ja contenté partie, si comme l'en dit, au dit Jehan Charrier ou cas dessus dit avons remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement au gouverneur et prevost de la Rochelle, au seneschal de Xantonge et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois de juillet l'an de grace mil CCCC et trois, et de nostre regne le XXIIIe.
Par le roy, à la relacion du conseil. Jaques Remon.


1 Guillaume Chuffoulon avait obtenu dès le mois d'octobre 1396 des lettres de rémission pour ce meurtre. Le texte en a été imprimé ci-dessus, p. 252. Les deux versions diffèrent sensiblement; c'est pourquoi nous les publions l'une et l'autre.