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DCCLXXVIII

Rémission accordée à Jean Billaut et à Barthélémy Ferrant, d'Azay-le-Brûlé, qui avaient participé, quatre ans auparavant, au meurtre d'un pillard nommé Truppelin, et à la détrousse d'une femme appelée Jeanne Charbonneau, à condition de faire un pèlerinage, le premier à Notre-Dame du Puy, le second à Saint-Jacques de Galice.

  • B AN JJ. 144, n° 132, fol. 101
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 129-132
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, de la partie des amis charnelz de Jehan Billaut, chargié de VII petis enfans, et de Berthomié Ferrant, chargié aussi de III petis enfans, povres et miserables personnes de la parroisse d'Asay, ou païs de Poitou, à nous avoir esté exposé que, environ le moys d'octobre l'an mil [p. 130] CCC IIIIXX et neuf, les diz Billaut et Ferrant estans en la dicte ville d'Azay, avecques plusieurs autres de la dite ville et d'ailleurs, survint en la compagnie des dessus diz un appellé Jehan Levrier, laboureur de bras de la ville de Saint Maxent en Poitou, leur ami, voisin et affin, le quel leur dist et denonça, en faisant fortes complaintes et doleances, que un appellé le Truppelin, lierres, robeur, pilleur et raençonneur de gens, lui avoit osté et tolu nouvellement sa jument, et que pour ce qu'il l'avoit poursuie pour la recouvrer, avoit voulu tuer et occirre ycelui Levrier. Ausquelles paroles estoient presens Jehan Jousselin, clerc, Jehan Jousselin, et Jehan Pageraut, laboureurs de bras, qui distrent en audience, devant tous les assistans en ycellui lieu, que sembla- blement avoit le dit Truppelin batu et navré les femmes des diz Jousselins et brûlé la barbe du dit Pageraut. Et adoncques les diz assistans, ensamble les diz Billaut et Ferrant, comme courroucez et esmeus des dites pilleries, roberies et villenies, eulx tous ensamble d'un commun accord et consentement, en entencion de trouver le dit Truppelin, pour ravoir ce qu'il avoit ainsi extorquié et prins sans raison, alerent en la ville de Leignes près du dit lieu d'Azay, et là le trouverent. Et tantost qu'il l'apperceurent, esmeus de chaleur, lui coururent sus et le battirent d'espées et de bastons telement que un ou deux jours après mort s'en ensuy en sa personne1. Et avecques ce, un pou de temps après ces choses, advint que un appellé Micheau Rousseau menoit et passoit par le vilaige de Jaunay une femme appellée Jehanne Charbonelle, si comme il lui avoit accordé et promis de la mener et passer par illec, jusques à certain autre [p. 131] lieu ; laquelle femme avoit avecques elle plusieurs biens meubles en un sac, c'est assavoir IIII plas, VI escuelles et une pinte, VI saussieres d'estain, II sarges délit, une couste pointe, un petit mirouer, un petit escrin ou forcier, unes petites matines, VI ou VII linsseux, II pieces de toille, II touailles, II servietes, une cote vermeille. Le quel Michau, conducteur de la dicte femme, si tost qu'il fu audit vilaige de Jaunay, se tray par devers les diz Billaut et Ferrant, en leur notiffiant et disant qu'il creoit que la dicte femme avoit prins et eu les dictes choses furtivement, à la promocion du quelles diz Billaut et Ferrant furent esmeus à l'encontre de la dicte femme, et eulx cuidans que elle les eust emblées, la poursuirent du dit lieu jusques à un lieu appellé Fontbossiere, et illec lui osterent les dictes choses qui bien valoient XII frans ou environ, combien que depuis elle en ait eu restitution par justice ou autrement. Pour occasion desquelx cas et faiz dessus diz, les diz Billaut et Ferrant, doubtans rigueur de justice, se sont absentez du païs de Poitou et n'y oseroient retourner, se sur ce ne leur estoit impartie nostre grace et misericorde, ainsi comme dient leurs diz amis, en nous humblement suppliant comme en autres cas ilz aient esté et soient gens de bonne vie et renommée, nous leur vueillons ycelle grace et misericorde impartir. Nous, eue consideracion aus choses dessus dictes, etc., aus diz Jehan Billaut et Berthomié Ferrant, et à chascun d'eulx, ou cas dessus dit, avons remis, quictié et pardonné, etc., en faisant satisfaction à partie, se faicte n'est, et aussi par le dit Billaut un pelerinaige à Nostre Dame du Puy en Auvergne, et par le dit Ferrant un pelerinaige à Saint Jaques en Galice, pour l'ame du dit Truppelin par eulx tué, comme dit est, les quelx pelerinaiges il feront et seront tenus faire, pour tant que à chascun touche, dedans la saint Jehan Baptiste prochainement venant, en rapportant lettre de certiffication. Si donnons en mandement au bailli de Touraine et des [p. 132] ressors el Exempcions de Touraine, d'Anjou, du Maine et de Poitou, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Poissy, le XIIe jour de février l'an de grace mil CCC IIIIXX et douze, et le XIIIe de nostre regne. Par le roy. Derian.


1 Une partie des faits criminels visés dans cette pièce, notamment le meurtre de Turpelin ou Truppelin, sont relatés dans deux lettres de rémission d'août 1389, données en faveur de deux habitants d'Azay-le-Brûlé, Jean Cholet et Simon Sabourin, qui avaient participé à cette barbare exécution.(Voy. notre tome V, p. 387 et 389.) La suite, relative à la détrousse de Jeanne Charbonneau, n'y figure pas.