DCCCXXVII
Rémission accordée à Guillaume Brigeau, coupable d'un vol de deux veaux au préjudice de Jean Baron, qui l'avait dépossédé de la ferme de Giez, appartenant au prieuré de la Millière.
- B AN JJ. 151, n° 93, fol. 43
- a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 260-263
Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, à nous avoir esté humblement
exposé de la partie des amis charnelz de Guillaume Brigeau, parroissien de l'eglise de
Cloé ou diocese de Poitiers, disans que, comme le dit Guillaume Brigeau eust jà pieçà
pris et accepté un lieu et terre appellé Gyé avec ses appartenances du prieur de la
Millerie1 à sex provendiers de blez, vint solz
tournois et un chappon de ferme, moison ou rente annuele, et eust le dit prieur promis
au dit Brigeau qu'il lui feroit avoir lettres confirmatoires sur ce des religieux,
abbé et convent dont le prieuré du dit lieu de la Milliere est menbre, et depuis [p. 261]
soit ycelui prieur alé de vie à trespassement, sanz avoir fait bailler au
dit Brigeau les dictes lettres confirmatoires, depuis lequel trespassement, un appellé
Jehan Baron, veant et sachant que le dit Brigeau avoit mout amendé le dit lieu de Gyé
et fait de très bonnes et grandes reparacions en ycelui, et qu'il n'avoit mie eu ne
obtenu les dictes lettres confirmatoires des diz abbé et convent, se transporta par
devers yceulx religieux, abbé et convent et de eulx prist et afferma le dit lieu de
Gyé, à la ferme que le tenoit le dit Brigeau, et par ainsi en a debouté ycelui
Brigeau, à son très grant dommage; et riguoreusement ycelui Baron osta d'illecques de
ses biens et les mist en un povre fondis qui estoit aus prés du dit lieu, mais toutes
foiz avoit il tousjours son lit au dit lieu de Gyé par la volonté du dit Baron, pour
ce qu'il ne se povoit pas encores bonnement hebergier ou dit fondis ; et ce pendant le
dit Baron mettoit son bestiaire d'omaille en un hostel appellé Coutaulesquin, que
tenoit le dit Brigeau et ou quel lieu couchoient aussi ses bestes tous les soirs,
comme celles du dit Baron, ensemble, et il soit ainsi que le dit Guillaume Brigeau,
courcié et dolent de ce que le dit Baron lui avoit osté le dit lieu de Gyé, meu de
mauvaise convoitise et par temptacion de l'ennemi, environ la feste saincte Katherine
derrenierement passée, prist et ravit du dit lieu de Coutaulesquin deux jeunes veaulx
de trois ans ou environ, lesquels estoient au dit Baron, yceulx veaulx vendi à un
boucher appellé Estienne Jaquant, de la ville de Vivonne, pour le pris de sex livres
et dix solz tournois, jà soit ce que par le temps de la dicte vente le dit Estienne ne
les avoit point veu, mais pour ce que autrefoiz il avoit acheté du dit Brigeau
bestiaires et qu'il l'avoit tousjours trouvé bon et loyal marchant, et pour tel
estoit tenuz au pais, il eut la dicte vente des diz deux veaux pour agreable ; et mena
le dit Brigeau yceulx deux veaux à la dicte ville de Vivonne et bailla et livra au dit
Estienne. [p. 262] Et après ce que le dit Baron apperceut qu'il avoit perdu ses
deux veaux, il fist grant inquisicion quelle part il povoient avoir esté menez, et
enquist tant qu'il fist congnoistre les peaulx d'iceulx deux veaux chez le dit
Jaquant ; et incontinent après ce que on parla et murmura que les dictes peaulx
avoient esté trouvées, le dit Guillaume Brigeau, de son mouvement, sanz commandement
de juge ne deprise de sergent, soy rendi prisonnier en la prison du lieu de Celle
Levesquau, lequel confessa et a confessé à Guillaume Vasselot2, lieutenant du seneschal du dit lieu,
avoir fait le fait et cas dessusdit. Pour occasion duquel, les diz exposans se
doubtent qu'il vueille faire sur ce et garder rigoureuse justice au dit Brigeau, se
par nous ne lui est sur ce impartie nostre grace et misericorde, si comme ilz dient, en
nous humblement suppliant que, comme ycelui Brigeau en tous ses autres faiz ait esté
homme de bonne vie, renommée et honeste conversacion, sanz ce que oncques mais il
feust repris ne actaint d'aucun villain cas, et soit chargié de femme et de quatre
petis enfans, et a [p. 263] esté et demouré en prison pour ceste cause depuis le
dit temps du dit larrecin jusques au jour d'ui et encores est ou chastel de Chauvigny,
et en recongnoissant la faute qu'il avoit faite a satisfait le dit Baron des diz veaux
et entierement contenté, nous lui vueillons sur ce nostre dicte grace extendre. Pour
quoy nous, ces choses considerées, au dit Guillaume Brigeau ou cas dessus dit avons
quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement au bailli de Touraine et des
ressors et Exempcions d'Anjou, de Poitou et du Maine, et à tous nos autres justiciers,
etc. Donné à Paris, le cinquiesme jour de fevrier l'an de grace mil CCC
IIIIXX XVI, et le XVIIe de nostre regne.
Par le roy, à la relacion du conseil. J. Hue.