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DCCLXXXVI

Rémission accordée, sous certaines conditions, à Macé Marciron, écuyer, de Verrue, qui avait tué Thomas de Chargé, dit Chapon, son fermier, à la suite d'une discussion touchant le prix de son fermage.

  • B AN JJ. 145, n° 4, fol. 2
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 148-151
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplication des amis charnelz de Macé Marciron, escuier de la parroisse de Verue ou diocese de Poictiers, contenant que, comme il eust affermé à Thomas [p. 149] de Chargé1, dit Chappon, de la parroisse d'Aunoy ou dit diocese, une disme de blez à lui appartenant ès parroisses de la Chaucée, d'Aunoy et de Martezé 2, pour le pris de vint et huit sextiers de blez, c'est assavoir tiers froment, tiers seigle et tiers baillarge, et une mine de potaige, c'est assavoir deux boisseaulx feves, deux boisseaulx pois blans et deux boisseaux de terres (sic), tout à la mesure de Lodun, et afin que le dit Thomas, fermier dessus dit, peust mieulx et plus proffitablement les blez de la dicte disme assembler et mettre en un lieu ensemble, il fu dit par le marchié de la dicte ferme que il le mettroit et assembleroit en l'ostel du dit Macé, en la ville de Vielle Chaucée, ou quel hostel le dit Thomas mist et assembla la dicte disme, et les y bati et mist au net, ou fist batre et nettoier. Et quant les diz blez de la dicte disme furent ainsi batuz et nettoiez, le dit Thomas paia et contenta le dit Macé Marciron de tout le pris de la dicte ferme, excepté de la mine de potage dessus dicte, sur la quele mine meut certain debat entre le dit Macé et le dit Thomas, fermier dessuz dit, parce que le dit Macé demandoit à estre paié de la dicte mine de potage et le dit Thomas disoit qu'il n'en devoit que un provendier, c'est assavoir trois boisseaux, et que plus n'en devoit par le marchié de la dicte ferme; et le dit [p. 150] Macé disoit que si devoit et que il le paieroit, voulsist ou non, en la presence de un appellé André Prevost, lequel disoit au dit Macé que, pour ce que le dit Thomas l'avoit servi et qu'il y avoit poy gaignié en la dicte ferme, que il feroit bien de quicter le dit Thomas pour quatre boisseaux de potage. Et lors le dit Thomas respondi qu'il ne le daigneroit servir, et le dit Macé dist au dit Thomas qu'il se teust ou il lui donroit sur la teste ; et le dit Thomas respondi au dit Macé assez fierement que, s'il y mettoit la main, qu'il feroit son povoir de soy defendre et que le dit Macé parloit bien à cheval fierement. Et adonc le dit Macé tira un badelaire qu'il avoit en sa main et donna un cop du taillant audit Thomas sur l'espaule senestre ; et tantost le dit Thomas descendi de sur un asne où il estoit monté et mist son coustel appellé badelaire en sa main, pour cuidier ferir le dit Macé. Et incontinant le dit Macé qui estoit à cheval mist pié à terre et fery encores le dit Thomas sur la dicte espaule et un autre cop sur la teste, duquel cop le dit Thomas chey à terre et tant que assez tost après mort s'en ensuy en sa personne. Pour lequel fait, le dit Macé s'est absenté du païs et n'y oseroit jamais habiter ne converser, se sur ce ne lui estoit impartie nostre grace et misericorde, si comme il dit, requerant ycelle. Pour quoy nous, ces choses considerées, et attendu aussi que le dit Macé, depuis qu'il se pot armer, nous a servi touzjours en noz guerres en tous les voiages que nous avons faiz en Flandres et ailleurs en plusieurs autres parties, et que en tous autres cas il a esté et est homme de bonne vie et honneste conversacion, sanz onques maiz avoir esté reprins d'aucun austre vilain cas, à icellui Macé Marciron ou cas dessus dit avons quictié, remis et pardonné, etc., parmi ce que le dit Macé sera tenu de faire un pelerinage à Nostre Dame du Puyen Auvergne et de ce raporter certifficacion souffisante, et en oultre sera tenuz à son retour de faire chanter trente messes à ses despens pour le salut et remede du dit Thomas. [p. 151] Si donnons en mandement par ces presentes au bailli de Touraine et des Exempcions d'Anjou, de Poitou et du Maine, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois de septembre l'an de grace mil CCC IIIIXX et treze, et de nostre regne le XIIIe
Par le roy, à la relacion de monseigneur le duc d'Orliens, le patriarche d'Alexandrie3, messire Elionde Neilhac4 et autres du conseil presens. G. de la Fons.


1 MM. Beauchet-Filleau ont donné une liste des membres de cette famille de Loudunais, Touraine, Poitou et Angoumois, suivie d'une généalogie de diverses branches, à partir du XVIe siècle. (Dict. des familles du Poitou, anc. édit., t. I, p. 642 et s.) Le nom de Thomas de Chargé n'y figure pas.
2 « Cette dîme sur les paroisses d'Aunay, la Chaucée, Martaizé, Saint-Aubin, en commun avec l'abbaye de Saint-Jouin de Marnes, valant 30 livres, dit M. E. de Fouchier, était tenue à hommage lige, à vingt sous aux aides, et aux quarante jours de garde, en basse justice, par la famille Marcirion, depuis 1329 jusqu'en 1534. Elle avait dans sa mouvance un hébergement à Chouppe,... une pièce de terre à Combe,... un hébergement à Grice, etc. » Le même auteur décrit les armoiries de la famille Marciron ou Marcirion (La baronnie de Mirebeau du XIe au XVIIe siècle. Poitiers, in-8°, 1877, p. 252 et 273. Mémoires de la Société des Antiquaires de l'Ouest, 2e série, tome Ier.)
3 Le patriarche d'Alexandrie, c'est-à-dire Simon de Cramaut, ancien évèque de Poitiers. (Voir le vol. précédent, p. 319 note.)
4 Hélion de Naillac, troisième fils de Perrichon, seigneur de Naillac et du Blanc, vicomte de Bridiers, était conseiller et chambellan du roi, châtelain de Beaugency. Il fut seigneur d'Onzain du chef de sa femme Jeanne, fille de Guillaume Guenant, sr des Bordes, veuve en premières noces d'Hugues d'Amboise, seigneur de Chaumont. Hélion était mort en 1398. Les titres scellés de Clairambault contiennent plusieurs quittances de gages scellées de ses armes, pendant la campagne de Flandres. (G. Demay, Invent. des sceaux de la coll. Clairambault, in-4°, t. II, p. 2.)