DCCCXII
Rémission accordée à Jean Moreau, de Charzais. S'étant, en état d'ivresse, querellé avec sa femme et l'ayant frappée, celle-ci, pour échapper aux coups, s'était réfugiée dans un grenier qui s'effondra sous elle et l'entraîna dans sa chute, où elle se tua.
- B AN JJ. 140, n° 80, fol. 60 v°
- a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 222-223
Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir esté humblement
exposé de la partie des amis charnelz de Jehan Moreau, demourant nagueires à Charzay
en Poitou, chargié de IIII petis enfans, que environ la sainct Hillaire
derrenierement passée ot un an, après ce qu'il ot esté boire en la taverne et se feust
enyevré, il s'en vint sur la nuit en sa maison, en la quelle il trouva sa femme,
laquelle pour ce qu'elle le vit ainsi appareillé, le commença à tencer et rioter très
aigrement, et pour ce le dit Moreau s'esmut, lui osta un enfant qu'elle tenoit entre
ses bras, et la frappa pluseurs cops, et elle s'efforça aussi de le frapper et
escratigner ou visage, en lui disant pluseurs injures, et depuis s'en fuy ou
planchier du dit hostel, duquel, pour ce qu'il fondi soubz elle, chey à bas et se
greva et dommaga grandement; des quelles choses [p. 223] icelle nuit elle alla de
vie à trespassement, et le dit Moreau qui s'estoit endormi par force de vin, se
reveilla et trouva sa dicte femme morte, et lors s'en fuy et se absenta du païs, ou
quel il n'oseroit jamais retourner, se sur ce ne lui estoit impartie nostre grace et
misericorde, si comme il nous a fait exposer, requerant, comme en tous autres cas il
ait esté homme de bonne fame et renommée, sanz avoir esté repris ou actaint d'aucun
autre villain cas ou reprouche, et aussi pour pitié et compassion de ses quatre petis
enfans, qui sont pour ce en aventure de mendier et querir leur pain, que le dit Moreau
est bon laboureur et que pour lors il estoit chargié de vin, comme dit est, nous sur
ce lui vueillons estre piteables et misericors et en ceste partie preferer pitié et
misericorde à rigueur de justice. Pour quoy nous, ces choses considerées, audit Jehan
Moreau ou dit cas avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement au
gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois
de fevrier l'an de grace mil CCC IIIIXX et quinze, et de nostre regne le XVIe.
Par le roy, à la relacion du conseil. Freron.