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DCCCLIV

Rémission accordée à Barthélémy Gautier qui, l'an 1373, pendant les guerres, avait livré aux Anglais Guillaume Gillebert, de la châtellenie de Fontenay-le-Comte, réfugié dans l'église fortifiée d'Aytré. Ceux-ci le réclamaient comme leur prisonnier et l'avaient mis à mort, après qu'il eut été remis entre leurs mains.

  • B AN JJ. 154, n°121, fol. 65 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 332-334
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receu l'umble supplicacion à nous présentée de la partie de Berthelemi Gautier, marchant demourant en la ville de Estré près de la Rochelle, contenant que comme, en l'an mil CCC soixante et treze1 que la ville de la Rochelle, qui avoit esté ès mains des Angloiz, lors noz ennemis, se rendi à nous françoise, et que le sire de Partenay, qui ne fu pas si tost françois, fu par certains accords et ordenances tenu en souffrance par aucun temps, lui, [p. 333] toute sa terre et fortresse2 et mesmement sa fortresse de l'eglise Saint Estienne de la dicte ville d'Estrey, en laquelle le dit suppliant et plusieurs autres gens du païs estoient lors à refuge, ou quel temps noz diz ennemis qui estoient lors ou dit païs à grant nombre, eussent entre leurs autres prisonniers pris à rançon Guillaume Gillebert de la chastellenie de Fontenay le Conte, le quel se parti d'eulx et eschappa, et s'en vint à refuge à la dicte fortresse d'Estré, et ce sceu par noz diz ennemis, vindrent à la dicte fortresse et distrent que, si on ne leur rendoit icelui leur prisonnier, qu'ilz arderoient et destruieroient la dicte ville, et de fait y bouterent le feu et y firent très grant dommage ; et pour ce que l'Engloiz, auquel le dit Guillaume Gillebert estoit principalement prisonnier, vint à la dicte fortresse, requerant que on le lui rendeist, et promist et jura qu'il n'auroit nul mal du corps ne autrement, mais qu'il paieroit sa rençon, le dit suppliant de bonne foy, sanz penser à nul mal et [pour] eschever greigneur peril et dommage que de la rançon du dit Guillaume, et que encores n'estoit pas la dicte fortresse françoise, comme dit est, mist hors icelui Guillaume de la dicte fortresse, en le rendant au dit Engloiz. Pour la quelle chose et que l'en dit que icelui Angloiz dampnablement et en alant contre son serement, assez tost après qu'il eust icelui Guillaume, le tua et mist à mort, le dit suppliant se doubte à present que par rigueur de justice ne soit de ce travaillez et griement puniz, se nostre grace ne lui estoit sur ce impartie ; en nous requerant humblement que, attendu ce que dit est et [p. 334] que le dit suppliant en tous ses autres faiz a tousjours esté de bonne vie, renommée et honeste conversacion, sanz oncques avoir esté repris d'aucun autre villain cas ou reprouche, nous sur ce lui vueillons impartir nostre dicte grace. Pour ce est il que nous, ces choses considerées, etc., au dit suppliant ou cas dessus dit avons quicté, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement au gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers, etc. Donné a Paris, ou mois de mars l'an de grace mil CCC IIIIXX XVII, et le XVIIIe de nostre regne.
Par le roy, à la relacion du conseil. Chaligaut


1 La ville de la Rochelle avait été replacée en l'obéissance de Charles V, le 8 septembre 1372, et non en 1373. Quelques jours auparavant, grâce à une ruse imaginée par le maire, Pierre Boudré, les bourgeois armés avaient fait prisonniers les soudoyers anglais commandés par Philippot Mansel, lieutenant, en l'absence de Jean Devereux, capitaine, et s'étaient emparés du château. Maîtres dès lors de leurs destinées, ils avaient engagé des pourparlers avec le duc de Berry et Du Guesclin, dont ils obtinrent facilement la promesse d'être confirmés dans tous leurs privilèges ; alors ils ouvrirent leurs portes et Du Guesclin prit possession de la ville et du château au nom de Charles V et du comte de Poitou, le 8 septembre. (Voy. S. Luce, édit. de Froissart, tome VIII, p. XLII à XLV et notes.)
2 Guillaume Larchevêque, seigneur de Parthenay, avait fait sa soumission avec les autres barons poitevins enfermés dans Thouars, le 30 novembre 1372. C'est donc pendant la trêve de Surgères (18 septembre — 30 novembre 1372) qu'eut lieu l'événement rapporté ici. Il a été question, dans un de nos précédents volumes, des conventions particulières conclues entre le duc de Berry et le sire de Parthenay, touchant la soumission de celui-ci. (Acte du 15 décembre 1372, t. IV, p. 206 et note.)