[p. 287]

DCCCXXXVI

Rémission octroyée à Jean Bourdeau, charpentier de Courlay, pour le meurtre de sa femme qui le trompait avec Macé Boutin.

  • B AN JJ. 152, n° 181, fol. 100 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 287-289
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à touz, presens et avenir, de [p. 288] la partie des amis charnelz de Jehan Bourdeau, charpentier, demourant en la parroisse de Courlé, chargié de trois petites filles, nous a esté humblement exposé que jà pieça lui fut dit et notiffié par plusieurs, tant des amis de Jehanne sa femme comme des siens, que Massé Boutin repairoit charnelement et aloit souvent avec sa femme en son hostel, et qui s'en preist garde. Lequel Bourdeau, lui doubtant de ce, dist par pluseurs fois au dit Boutin qu'il ne alast ne venist plus en son dit hostel, et qu'il lui en desplairoit, ou autrement il le courrouceroit. Et depuis, c'est assavoir le jeudi après la Thiffaine l'an mil CCC IIIIXX et seze, ainsi qu'il estoit venu au marchié en la ville de Bersuyre, fu dit au dit Bourdea par aucuns ses amis que le dit Boutin estoit en son dit hostel et couchoit charnelment avec la dicte Jehanne, sa femme. Lequel Bourdea s'en ala hastivement à son dit hostel et trouva l'uis fermé de chevilles et estoit dedens le dit Boutin et sa dicte femme, et à grant paine vouldrent ouvrir l'uis, et quant le dit huis fut ouvert, le dit Boutin s'en volt fouyr, et avoit le dit Bourdea, quant il entra dedens, en sa main un couteau qui bien povoit valoir X deniers tournois ou environ, et en vouloit ferir le dit Boutin. Et quant la dicte Jehanne vit qu'il vouloit ferir le dit Boutin, ycellui Boutin et elle se prindrent au corps dudit Bourdea, et en le tenant ilz cheurent touz troiz ensemble l'un sur l'autre, et estoit le dit Bourdeau dessoubz, et en cheant le dit Bourdea frappa le dit cousteau entre les costes de sa dicte femme et tant que mort s'en ensuy en la personne d'elle. Pour occasion duquel fait le dit Bourdea, doubtant rigueur de justice s'est absenté du dit païs où il n'oseroit jamais retourner, et sont ses dictes filles en aventure de querir leur pain, se par nous ne lui est sur ce impartie nostre grace et misericorde, si comme il dit, requerant humblement ycelle. Pour quoy nous, ces choses considérées et que le dit suppliant a esté tous jours homme de bonne vie, [p. 289] renommée et honneste conversacion, etc., au dit Bourdea ou cas dessus dit, etc., avons quictié, remis et pardonné, etc. Si donnons en mandement au bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d'Anjou, de Poitou et du Maine et à touz noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois de septembre l'an de grace mil CCC IIIIXX et dix sept, et de nostre regne le XVIIe.
Par le roy, Le Besgue de Yillaines1, le sire d'Osmont2, messire Morisse de Tresiguidi3, messire Jacques de Mommor4 et autres presens. J. de Scepeaux.


1 Le Bègue de Villaines, chambellan de Charles VI dès 1380, fut gouverneur de la Rochelle et se trouvait dans cette ville le 13 avril 1390. A la fin de cette année, en novembre, il fut envoyé vers le roi de Castille et, le 14 avril 1391, il reçut une autre mission vers le même prince. On peut voir dans le Religieux de Saint-Denis comment les ducs de Berry et de Bourgogne, méconnaissant ses longs services, le firent jeter en prison.
2 Pierre II dit Hutin, sire d'Aumont, de Méru, etc., premier chambellan de Charles VI. Voy. ci-dessus, p. 205 note 2.
3 En 1378, Maurice de Tresiguidy, chevalier, était capitaine de Hennebont; en juillet 1380, il fut chargé par le roi d'une mission en Espagne, et l'année suivante nommé capitaine de la ville de Paris. (Dom Morice, Preuves de l'histoire de Bretagne, etc., t. II, p. 187, 193, 283, 374.)
4 Une notice a été consacrée à Jacques de Montmor et à son frère Morelet, dans notre tome IV, p. 244.