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DCCCLXXXVII

Rémission accordée à Pierre Fèvre, sergent de la Roche-sur-Yon, qui dans une querelle avec Perrot Dupont, contre lequel il était chargé d'exécuter un jugement d'amende, avait été contraint d'user de ses armes et l'avait frappé mortellement.

  • B AN JJ. 158, n° 2, fol. 1
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 427-428
D'après a.

Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l'umble supplicacion de Pierre Fevre, sergent en la ville de la Roche sur Yon, contenant que dès l'an mil CCC IIIIXX et dix sept, par vertu de certaine commission à lui adrecent, il se transporta en un village appellé les Bouchaus(?) pour faire execucion sur un appellé Perrot Dupont1 d'une amende en quoy il avoit esté condempné pour certaine cause envers nostre très chier et amé cousin, le sire de Clichon, seigneur de la dicte Roche sur Yon2, ou ses gens ; en la quelle ville il ne le trouva pas, mais lui dist l'en qu'il est alez en un autre village appellé Lorriere, ou quel village le dit suppliant le ala querir et le trouva. Auquel il dist en substance ces parolles : « Tu me donnes assez de paine pour l'amende que tu dois à monseigneur de Cliçon. » A quoy le dit Perrot Petit (sic) lui respondi : « Il n'est pas temps de parler de telz choses, alons nous soupper, » Et lors le dit suppliant descendi de dessus son cheval et souppa avec lui et autres, en paiant son escot, comme chascun des autres, et en souppant en la dicte compaignie, advint que l'en prist le bazelaire d'icellui suppliant en sa gaigne, ne scet qui ce fist, combien que il le demandast publiquement. Et adonc le [p. 428] dit Perrot se prist à rire. Pour laquelle chose le dit suppliant lui dist qu'il savoit bien qu'il l'avoit et où il estoit. Lequel Perrot lui respondi de courage couroucié qu'il mentoit. Et pour ce le dit suppliant lui dist qu'il n'auroit plus de terme de paier la dicte amende, lui revenu de la foire du Peyré, et si lui paieroit son salaire par raison. Lequel Perrot lui respondi que il ne devoit riens au dit sire de Cliçon, en disant : « Ne durerons nous point à ces ribaux sergens. Par le sang Dieu, je te assommeray ». Et de fait prist un tizon de feu d'une estelle de quartier de bois, et en cuida ferir le dit suppliant en lui courant sus. Et lors le dit suppliant, voiant la male voulenté dudit Perrot qui estoit comme yvre et tout eschauffé, prist un petit coustel et sur son corps deffendant, l'en fery un seul cop en la poitrine, dont assez tost après il ala de vie à trespassement. Pour occasion duquel fait, le dit suppliant fu prins et mis ès prisons du dit lieu, et pour ce qu'il doubtoit et que l'en le menassoit de le faire morir, il fit tant que il ot un fer d'un besoron dont l'en mettoit communement ou païs les feves, pois, blez et autres herbes, à l'aide du quel il rompi les dictes prisons, et se absenta du païs, ou quel il n'oseroit jamais demourer ne converser, se nostre grace et misericorde ne lui est sur ce impartie, si comme il dit. Et pour ce nous a supplié que, ces choses considerées et que en autres cas il a tousjours esté de bonne vie vie et renommée, sans oncques avoir esté reprins d'aucun autre villain cas, nous lui vueillons nostre dicte grace impartir. Pour quoy nous, etc., au dit suppliant ou cas dessus dit avons pardonné, quictié et remis, etc. Si donnons en mandement par ces presentes au bailli de Touraine et des ressors et Exempcions d'Anjou, du Maine et de Poitou, et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois de juing l'an de grace mil CCCC et trois, et le XXIIIe de nostre regne.
Par le roy, à la relacion du conseil. Chaligaut.


1 Citons un Perrot Du Pont, de Vendrennes, qualifié valet, qui rendit aveu en 1344 à Jean duc de Normandie, comte de Poitou (Arch. nat., p. 594, fol. 83 v°), et un autre s'intitulant écuyer, dont on conserve un aveu et dénombrement de treize borderies de terre sises en la paroisse des Groseillers, rendu le 18 mai 1428 au comte de Richemont, baron de Parthenay, connétable de France. (R1* 190, fol. 38.)
2 Olivier IV de Clisson, seigneur de la Roche-sur-Yon. (Voy. ci-dessus, p. 233, note 2.)