DCCCLXV
Rémission accordée à Etienne Dousset, de la Chapelle-Thireuil, qui avait frappé à la joue Jean Aymer, prieur curé dudit lieu, au cours d'une querelle qui avait éclaté entre eux à propos de la dîme.
- B AN JJ. 155, n° 164, fol. 100
- a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 24, p. 362-365
Charles, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, de [p. 363] la partie de
Estienne Dousset, demourant à la Chappelle Tiroil ou pays de Poictou, nous avoir esté
humblement exposé que comme,le lendemain de la Magdelaine derrenierement passée, environ
heure de vespres, ledit suppliant eust trouvé devant son hostel le vallet de frere Jehan
Aymer1, prieur curé du dit
lieu de la Chappelle Tiroil, au quel varlet, pour ce que il en cueillant et levant
la disme de blez apartenant au dit prieur, au dit lieu de la Chappelle, avoit prins du
blé d'icelui exposant, si comme il lui sembloit, plus que au dit prieur n'en
apartenoit à cause d'icelle disme, le dit exposant eust dit qu'il avoit prins deux
(sic) gerbes de son blé, combien que à icelui prieur, son maistre, n'en apartenist que
cinq ; aux quelles paroles feust survenu le dit prieur, qui entreprint les dictes
paroles, disant à icelui exposant qu'il paioit mauvaisement sa disme et qu'il estoit
excommenié comme un chien. Et le dit suppliant lui respondi qu'il mentoit et qu'il
n'estoit point excommenié. Et après ce, s'entreprindrent iceulx exposant et prieur
moult fort de paroles, disant l'un à l'autre par pluseurs foiz : « Que veulx tu dire,
que veulx tu dire ? — Mais toy, mais toy ?» Et en ce faisant et disant, le dit prieur
cracha au visaige du dit exposant, et lors icelui exposant, esmeu des paroles que
lui avoit dictes icelui prieur, et aussi de ce que il lui avoit crachié ou visaige,
comme dit est, feri par chaude cole un cop parmy la joe icelui prieur, sans
ce qu'il lui feist sangc ne playe, ne que mort, mehaing ou mutilacion aucune s'en
soient ensuiz. Mais ce non obstant, soubz umbre et pour occasion de ce que, dix ans a
ou environ, pour aucunes controverses qui estoient pour lors entre les diz exposant et
prieur, icelui exposant donna [p. 364] asseurement au dit prieur en l'assise de
Guillaume Sauvage2, audit lieu de
Tiroil, appellée l'assise de la Marche, et aussi en la court de l'official de
Maillesais, et les dis asseuremens promist et jura tenir et garder, aux paines en tel
cas acoustumées, et en fu jugié par le juge de la court du dit lieu de la Chappelle,
et admonesté de l'auctorité de la court du dit official, les gens et officiers du
seigneur d'icelui lieu de la Chappelle Tiroil ont prins ou s'efforcent de prendre,
saisir et mettre en la main du dit seigneur tous les biens d'icelui exposant, et
eussent prins et emprisonné son corps, en lui imposant les dis asseuremens par lui
avoir esté enfrains, se il ne se feust absenté du dit lieu et pays ; et avecques ce,
se doubte icelui exposant que nos gens et officiers en icelui pays le vueillent mettre
et tenir en procès à l'encontre de nostre procureur, ou autrement, sur ce que le dit
prieur se disoit estre lors en nostre sauvegarde, combien que depuis les dis
asseuremens, iceulx exposant et prieur aient repairé et conversé, beu et mengié
souventes foiz ensemble, sans ce qu'ilz se monstrassent ne portassent aucunement
hayneux [p. 365] l'un envers l'autre. Pour cause du quel fait advenu, le dit
exposant qui est chargié de femme et de petiz enfans seroit en aventure d'estre exilé
du pays, sanz jamais y retourner, et ses dis enfans et femme d'estre desers à tousjours,
se par nous ne lui estoit sur ce estendue nostre grace et misericorde, si comme
il dit, suppliant que, comme le fait dessus dit, ou quel n'a heu mort, mehaing ne
mutilacion aucune, soit advenu par chaude cole, comme dit est dessus, et que le dit
suppliant qui est homme de bonne vie, renommée, non convaincu ne ataint d'aucun
villain cas ou blasme, ne se recordoit aucunement, quant le dit cas advint,
des dis asseuremens, pour cause du long temps qu'ilz furent donnez, nous sur ce lui
vueillons impartir nostre dicte grace. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans
misericorde estre preferée à rigueur de justice, à icelui suppliant avons ou dit
cas remis, quicté et pardonné, etc. Si donnons en mandement par ces presentes au
bailli de Touraine, et des ressors et Exempcions d'Anjou, de Poictou et du Maine, et à
tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois d'aoust l'an de grace mil
quatre cens, et de nostre regne le XXme.
Par le roy, à la relacion du conseil. R. Lijote.