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MDLX

Rémission octroyée à Méry Gargot, qui, ne pouvant se faire rembourser une somme de onze écus qu’il avait prêtée en toute confiance à Catherine Blanchart, et celle-ci niant sa dette, avait fait fabriquer par un notaire de Poitiers une fausse reconnaissance.

  • B AN JJ. 195, n° 1521, fol. 364
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 34-36
D'après a.

Loys, etc. Savoir, etc., nous avoir receue l’umble supplicacion de Mery Gargot, pouvre homme, laboureur, chargé de femme et mesnaige, aagé de quarante ans ou environ, contenant que une nommée Katherine Blancharde estoit tenue audit suppliant à cause de prest à elle fait par ledit suppliant et sa grant necessité eu la somme de unze escuz, c’est assavoir neuf escuz en or et cinquante et cinq solz tournois en monnaye, pour laquelle somme paier par plusieurs et diverses foiz ladicte Katherine ait esté par ledit [p. 35] suppliant semonce et requise, dont elle n’a tenu compte ; et à ceste cause icellui suppliant l’a fait convenir à certain et compectant jour par devant l’official de Poictiers, par devant lequel entre lesdites parties comparans fut tant procedé que, après ce que ledit suppliant eut fait de demander desdictes sommes de deniers à ladicte Katherine, icelle Katherine contre raison luy nya sadicte demande. Pour laquelle cause ledit suppliant est encouru en grans despens, lesquelz paier il ne pourroit bonnement, obstant la grant pouvreté en quoy il est. Et pour ce que véritablement ladicte Katherine lui devoit lesdictes sommes de deniers et que doulcement et amiablement il les lui avoit prestées à sa nécessité, et dont il n’avoit prins aucune congnoissance, soy confiant en la conscience d’icelle Katherine, ledit suppliant, soy voyant ainsi trompé et deceu pour bien faire et dont il lui venoit mal, pour soy conseiller sur ce, se tira et transporta par devers ung nommé Jehan Lucas, qui se dit estre notaire audit lieu ; et narracion à lui faicte de ce que dit est, luy pria et requist que, se il estoit possible que il lui peust faire aucune congnoissance et obligacion desdictes sommes à lui deues que dit est par ladicte Katherine, il le contenteroit bien. Lequel notaire lui respondit que voulentiers il le feroit ; laquelle chose il fist et contre signa ladicte obligacion d’un seing manuel d’autre notaire, et icelle faicte et signée, ledit suppliant la porta pour sceller au promoteur dudit lieu ; lequel, après ce qu’il eut veue et visitée, il retint par devers lui, en disant qu’elle estoit faulce et faulcement faicte. Et combien que ledit suppliant, qui est pouvre simple homme de labour, non congnoissant en telles matières, ignorant et fort hors de son entendement, pour les griefz qui lui estoient faiz pour faire plaisir et courtoisie à ladicte Katherine, supposoit et lui estoit advis que ledit notaire eust puissance de ce faire, doubtant rigueur de justice s’est absenté du païs, auquel il n’oseroit doresenavant converser [p. 36] ny habiter se noz grace et misericorde ne lui estoient imparties, humblement requerant que, attendu qu’il n’a receu aucune chose du contenu en ladicte obligacion, qu’il s’est tousjours bien et honnestement gouverné sans reprouche, qu’il est agé de soixante ans1 ou environ et fort debille de son corps, sens et entendement, il nous plaise sur ce lui impartir nostre grace. Pour quoy nous, etc., audit suppliant pour les causes dessus dictes, avons quicté, etc., quictons, etc., le fait et cas dessusdit, avec toute peine, etc. Si donnons en mandement, par ces presentes, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers, etc. Donné à Paris, ou mois d’aoust, l’an de grace mil cccc. soixante quinze, et de nostre règne le quinzeiesme.

Ainsi signé : Par le conseil. Ja. de Wignacourt. — Visa. Contentor. J. Picart.


1 Dans les premières lignes de cette rémission, Méry Gargot est dit âgé d’environ quarante ans.