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MDCCXXXII

Lettres patentes données à la requête et en faveur du comte de Dunois, déclarant que désormais ses terres et seigneuries de Parthenay, de Vouvant de Mervent, la Gatine et leurs habitants ressortiront par [p. 573] devant le sénéchal de Poitou ou son lieutenant, à son siège de Poitiers.

  • B AN JJ. 210, n° 44, fol. 26
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 572-578
D'après a.

Loys, etc. A tous ceulx que ces presentes lettres verront, salut. La supplicacion de nostre amé et feal cousin, le conte de Dunois1, avons receue, contenant que, jaçoit ce qu’il tiengne et ait acoustumé de tenir, et ses predecesseurs, les baronnies, terres et seigneuries de Partenay, Vouvant Merevant et autres, leurs appartenances et deppendences de nostre conté de Poictou et tour de Maubergion, assise en nostre ville de Poictiers, et par ce en feussent et soient lui et ses hommes, subgectz directement en juridicion et ressorts et que d’ancienneté il eust acoustumé de y ressortir, et que aussi en nostre ville de Poictiers y eust une cours et siège ordinaire seullement et non ailleurs, auquel lieu lui et ses subgectz avoient et eussent acoustumé obéir ès causes dont par previlleiges estoit donné et commis la congnoissance de lui et desdiz subgectz et autres vassaulx et subgectz dudit païs ; que, ce neantmoins par aucun temps, durant le vivant de nostre très cher et très amé oncle le duc de Berry2, qui tenoit nostre ville de Saint Maixent, il avoit fait ressortir, en droit d’assise seullement, lui et ses subgectz desdictes terres audit Saint Maixent. Et depuis, après qu’il fut decedé et que les terres de Saint Maixent, Melle, Civray et Chisé furent baillées en appanage à nostre très cher et très amé oncle le feu conte du Maine3, nostre seigneur et père avoit remis ledit ressort d’assises desdictes terres en la ville de Nyort, en laquelle [p. 574] ilz ont obey ; et depuis nostre avenement avons créé ung sieige ordinaire au sieige de Nyort, au moien duquel ilz ont fait obeir nostredit cousin et sesdiz subgetz non seullement ondit ressort d’assise mais en juridicion ordinaire, telz qu’ilz avoient acoustumé obeir à nostre sieige de Poictiers ; et soit nostre très cher et très amé cousin le roy de Secille, filz de nostredit oncle4, puis peu de temps ença allé de vie à trespas, au moien duquel et pour ce que lesdictes terres nous sont retournées de plain droit, à la requeste desdiz habitants de Saint Maixent, qui nous ont fait remonstrer lesdictes terres avoir ressorti en droit d’assise audit Saint Maixent paravant que audit Nyort, et lesdictes choses estre retournées en leur nature, eussions ordonné sieige audit Saint Meixant, comme il estoit paravant, et que lesdictes terres de Partenay, Vouvant et Merevant et ressort de Gastine y ressortiroient tout ainsi qu’elles avoient acoustumé ressortir du temps de nostre dit feu oncle duc de Berry, et mandé à nostre seneschal de Poictou ou son lieutenant expedier lesdictes assises tout ainsi qu’on avoit acoustumé faire ondit temps ; lesquelz habitans aient presenté leurs lettres à nostredit seneschal, lequel, sans oyr ne appeller ledit exposant nostre cousin, leur a donné ses lettres executoires, au moien desquelles lettres et executoire Jehan Gastineau, soy disant nostre sergent, s’est transporté en ladicte ville de Partenay et signiffié ladicte assignacion desdictes assises à certain jour audit Saint Maixent, et que le ressort desdictes terres y estoit assigné, duquel octroy desdictes lettres executoires et signifficacions faictes par ledit Gastineau, nostredit cousin exposant ou procureur pour lui ait appellé à nous et à nostredicte court de Parlement5, et son appel bien et [p. 575] deuement relevé et fait faire les adjournemens [et] inthimacions en tel cas appartenans ; aussi se soient opposez les maire, bourgeois et eschevins de nostredicte ville de Nyort, pour et afin que lesdictes terres de nostredit cousin et ressort d’icelle ne feussent mises en nostre dicte ville de Saint Maixent ; sur laquelle opposicion est et a esté tant procedé par devant nostredit seneschal ou son lieutenant que les parties aient esté appointées à escripre à fin de memoire et à en fournir à certain jour, et que ce pendant l’obéissance et ressort desdictes terres surcerroit, dont n’a esté appellé ne reclamé. Et depuis, lesdiz maire et eschevins dudit Nyort se soient tirez par devers nous et aient de nous obtenu autres lettres, par lesquelles aians ordonné et mandé audit seneschal de Poictou ou son lieutenant ondit sieige de Nyort et autres noz juges ressortir lesdictes terres dessusdictes audit Nyort, tout ainsi qu’ilz eussent fait ou peu faire paravant les lettres par nous données à ceulx dudit Saint Maixent ; au moien de quoy sont et se meuvent entre ceulx dudit Saint Maixent et de Nyort plusieurs procès et differans. Et combien que, comme dit est, nostredit cousin ait bonne cause et matière d’appel, neantmoins il doubte que s’il le poursuivoit en nostredicte court, au moien de la grant multitude des causes qui y sont, le ressort et juridicion de sesdictes terres pourroit longuement estre retardé et empesché, et aussi au moien des questions et procès qui sont ja meuz et introduiz pour occasion de ce entre lesdictz habitans dudit Nyort et de Saint Maixent, qui seroit en grant detriment de lui, sa juridicion et de ses subgectz, et retardement de leursdiz [p. 576] procès et en grant fatigacion d’eulx d’estre tenuz obeir en nostre court ordinaire audit lieu de Nyort, et en ressort et droit d’assise audit [Saint] Maixent qui sont devers lieux et diverses jurisdicions, et dont souventesfoiz pour occasion de mesme matière se pourroient asseoir divers procès et ensuir diverses sentences, au grant interest et dommaige de nostredit cousin et de sesdiz subgectz, consideré mesmement la pocité du conseil, qui est en chacune desdictes villes, par quoy voulentiers obeiroit en juridicion ordinaire et aussi ressortiroit en nostredicte court et siège de Poictiers, tant pour le bon et notable conseil qui y afflue, que aussi que noz officiers y sont manans, demourans et residens, que lesdictes terres sont tenues de nous à cause de nostredicte tour de Maubergeon assise en nostredicte ville de Poictiers, par quoy la matière y est subgecte et disposée naturellement et directement selon la nature des fiefz, si nostre plaisir estoit sondit appel mettre au neant et ce dont a esté appellé sans amende, et ordonner sesdictes terres ressortir tant en ordinaire que droit d’assise à nostredit siège de Poictiers, ainsi que d’ancienneté et selon la nature du fief elles avoient acoustumé et sont tenues ressortir, requerant nostre provision surce. Pour quoy nous, ces choses considerées, voulans remettre les choses à quoy naturellement elles sont disposées et selon que raisonnablement elles sont tenues et doivent ressortir, et autres consideracions à ce nous mouvans, ladicte appellacion dessusdicte ainsi faicte par nostredit cousin, ensemblement ce dont a esté appellé avons mis et mettons du tout au neant, de grace especial, sans amende ; et neant[moins], par cesdictes presentes, avons, de nostre certaine science, grace especial, plaine puissance et auctorité royal, et par l’advis et deliberacion de plusieurs de nostre sang et autres gens de nostre grant conseil, ordonné et declairé, ordonnons et declairons, par ces presentes, que lesdictes terres, baronnies et seigneuries de Partenay, Vouvant et [p. 577] Merevant et ressort de Gastine et les deppendances d’icelles ressortiront doresenavant par devant nostre seneschal de Poictou ou son lieutenant à nostredit siège de Poictiers et obeyront à sadicte court ordinaire et siège de Poictiers tout ainsi qu’elles eussent fait ou peu faire paravant qu’elle eussent et aient ressorti par quelque temps que ce fut, audit Sainct Maixent et Nyort, et ce nonobstant la creacion faicte dudit siège ordinaire audit Nyort et quelzconques lettres de declairacion à eulx et à chacun d’eulx sur ce données, lesquelles quant ad ce nous avons revocquées, cassées et adnullées, revocquons, cassons et adnullons et sans ce qu’ilz s’en puissent aider à l’encontre de nostredit cousin ne sesdiz subgectz, et lesquelles nous ne lui voulons nuyre ne prejudicier touchant la decision desdictes causes et ressort de lui et de sesdiz subgectz. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx conseillers les gens qui tiennent ou qui tiendront nostre court de Parlement à Paris, aux seneschal de Poictou, conservateur des previlleiges royaulx de l’Université dudit Poictiers ou à leurs lieuxtenans, commis ou acesseurs, que de nostre presente ordonnance et declairacion ilz facent joïr nostredit cousin et sesdiz hommes et subgetz, sans souffrir sesdictes terres ressortir ne sesdiz subgetz obeir, en assise ou ordinaire, ausdiz Nyort ne Sainct Maixent, et de contraindre les juges, greffiers et autres officiers dudit Nyort à mettre les procès qu’ilz ont en droit par devers eulx, par devant vous, seneschal, ou vostre lieutenant à vostredit siège, qui seroient d’entre les parties …6 dudit ressort, pour en estre par vous decidé, et lesquelz, en tant que mestier seroit, en avons evocquez et evocquons, ensemble tous les autres procès dudit ressort, et aussi les reffusans de ce faire, touchant ladicte matière et les deppendances, à vous obeir et tous autres par toutes voyes deues et raisonnables. Car [p. 578] ainsi, etc., nonobstant opposicions ou appellacions quelzconques faictes ou à faire, et lettres impetrées ou à impetrer à ce contraires, par lesquelles ne voulons estre differé. En tesmoing de ce, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Donné au Plesseys du Parc, le xxiiiie jour de fevrier l’an de grace mil cccc. quatre vings et deux, et de nostre regne le xxiie.

Ainsi signé : Par le roy, le conte de Clermont, l’arcevesque de Nerbonne, l’evesque de Chalon, le gouverneur de Bourgongne, les sires de Sainct Pierre, d’Estellant et de L’Isle, Me Philippe Bairdot7 et autres presens. Amys. — Visa. Contentor. de Villechartre.


1 Sur les possessions poitevines de François d’Orléans, comte de Dunoi, voy. ci-dessus (MDLV) et Arch. hist. du Poitou, t. XXXV, p. 73. [L.C.]

2 Jean, duc de Berri, dernier comte de Poitiers (1340-1416), arrière-grand-oncle de Louis XI. [L.C.]

3 La donation de Saint-Maixent, Melle, Chizé, Civray et Sainte-Néomaye à Charles d’Anjou Cte du Maine eut lieu en février 1443, par lettres patentes publiées, avec une notice sur Charles d’Anjou, au t. XXX, des Arch. hist. du Poitou, p. 146. [L.C.]

4 Sur Charles II d’Anjou, comte du Maine, duc de Calabre, roi de Sicile à la mort du roi René, voy. ci-dessus (MDLXII). [L.C.]

5 Il ne m’a pas été possible de trouver trace de cette affaire dans les registres du Parlement. Les historiens poitevins, Thibaudeau, Hist. du Poitou, t. II (1840, p. 50), et Ledain, Hist. de Parthenay (1858), p. 243 et 255, nous apprennent, d’après les documents relevés par D. Fonteneau, que les lettres du roi transférant au siège de Niort la connaissance des affaires de Parthenay remontaient au 27 juin 1441, et celles en faveur de Saint-Maixent au 8 juillet 1482. Les lettres patentes publiées ici ne terminèrent pas entièrement la lutte, mais l’avantage resta en définitive aux Poitevins. [L.C.]

6 Quatre ou cinq mots en blanc.

7 Pierre de Bourbon, comte de Clermont, François Hallé, archevêque de Narbonne, André Poupet, évêque de Châlons, et Guillaume Picard, sieur d’Estelan, ont dé à été l’objet de notices au cours de ce volume. Le gouverneur de Bourgogne était alors Jean de Beaudicourt, qui avait succédé à Charles d’Amboise. (Mouget, La Chartreuse de Dijon, t. II (1901), p. 191, et Vaesen, Lettres de Louis XI, t. V, p. 169-170) — Jean Blosset seigneur de Saint-Pierre, paraît déjà dans un acte de 1474 (Arch. hist. du Poitou, t. XXXVIII, p. 454) ; il fut grand sénéchal de Normandie. (Vaesen, Lettres de Louis XI, t. V, p. 23.) — Philippe Baudot, conseiller au Parlement de Paris, reçu le 6 mars 1480 (Aubert, Le Parlement de Paris, t. I, p. 76), remplacé en 1506 (ibid., p. 62). [L.C.]