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MDLXXXIX

Rémission en faveur de Pierre et Julien Barbin, père et fils, de Cheffois, et de Jean Bégault, leur voisin, qui, pour sauvegarder l’honneur de Marguerite Barbin, fille de Pierre et sœur de Julien, avaient exposé et abandonné un soir sous l’auvent de l’Aumônerie de Pouzauges un enfant qu’elle avait eu quoique non mariée, lequel enfant avait été trouvé mort le lendemain.

  • B AN JJ. 206, n° 1063, fol. 229 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 148-150
D'après a.

Loys, par la grâce de Dieu roy de France. Savoir faisons, etc., nous avoir receu l’umble supplicacion des parens et amis charnelz de Pierre Barbin, filasseur, Julien Barbin, son filz, et Jehan Begault, tous povres gens mechaniques et demourans au bourg de Chauffaye en Poictou, contenant que la vigile de la Purificacion Nostre-Dame, l’an mil cccc. lxxiiii, Marguerite Barbine, fille dudit Pierre Barbin et de Jehanne Morine, lors sa femme, acoucha d’un enfant masle environ le point du jour et ne volt oncques nommer celluy [p. 149] qui luy avoit fait ledit enfant. Après lequel acouchement, lesdiz Pierre et Julien Barbins et ladite feue Morine, qui lors vivoit, pour cuider couvrir l’onneur de ladicte fille, qui ne avoit point esté mariée, baptisèrent ledit enfant en une poesle à leur dit hostel et le tindrent et recelerent en icelluy jusques environ huit ou neuf heures de nuyt et delibererent entre eulz de porter ledit enfant secretement en l’Aumonerie de Pousauges, qui distoit de leurdit hostel de deux lieues ou environ, et pour ce faire lesdiz supplians prindrent ledit enfant et icelluy envoloperent bien et convenablement en bons draps. Et ce fait, ledit Julien ala querir ledit Begault qui estoit son voisin, luy declara ledit cas et le requist qu’il les voulsist acompaigner jusques à ladicte Aumosnerie, ce qu’il consentit. Et pour ce, Begault venu en l’ostel dudit Barbin, lesdiz suppliant prindrent ledit enfant et le portèrent à ladicte Aumosnerie ou Hostel-Dieu, et illec le laissèrent en ung ballet ou ouvrouer estant devant ladicte Aumosnerie, bien envolopé, cuidant qu’il fust sain et en grant vie, et ne cognoissoient en luy aucun signe de maladie ne de mort. Mais le lendemain au matin fut ledit enfant trouvé audit balet tout mort, et fut enterré en ladicte Aumosnerie. Et depuis fut ledit cas denoncé aux chastellain et procureur de la [p. 150] seigneurie de [Vouvent]1, en la chastellenie desquelz demeurent lesdiz supplians. Par quoy informacion faicte dudit cas par la justice dudit Vouvent furent constituez prisonniers audit lieu de Vouvent lesdiz Julien et Begault. Et au regard dudit Pierre Barbin, le père, qui avoit donné ledit conseil de porter ledit enfant, il se absenta. Et depuis furent lesdiz Julien et Begault eslargis jusques à certain temps et par caucion. Et depuis ont esté lesdiz Barbins père et filz mis esdictes prisons ; et au regard dudit Begault, il s’est absenté et n’a comparu au jour à luy assigné. Et combien que lesdiz supplians en faisant ladicte deliberacion de porter ledit enfant à ladicte Aumosnerie et Hostel-Dieu ne pensassent faire aucun mal et le faisoient seulement pour couvrir l’onneur de la dicte jeune fille, néanmoins ilz dobtent que, à l’occasion de ce ilz fussent longuement detenuz prisonniers et que l’en les voulsist traiter par rigueur de justice, se nostre grace, etc., requerans, etc. Pourquoy nous, etc. ausdiz supplians avons quicté, etc., les fait et cas dessusdiz, avec toute peine, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou, etc. Donné à Paris, ou moys de fevrier, l’an de grace mil cccc. soixante seize et de nostre règne le xvime.

Ainsi signé : Par le conseil. Brulart. — Visa. Contentor. Le Clerc.


1 Le scribe du registre a défiguré ce nom en « Bruvent ». Deux lignes plus loin, il a bien écrit « Vouvent », de sorte que la rectification ne pouvait être douteuse.