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MDCXXXI

Création de trois foires par an et d’un marché chaque semaine à Mondion en faveur de Pierre L’Hermite, écuyer, seigneur dudit lieu et de Beauvais.

  • B AN JJ. 205, n° 130, fol. 68 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 266-269
D'après a.

Loys, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre cher et bien amé pannetier ordinaire Pierre L’Ermite, escuier, seigneur de Beauvais et de Montdion1, contenant que, entre ses autres terres et seigneuries, il est seigneur dudit lieu de Montdion, qui est ung beau bourg et village, situé et assis en nostre pays et duché de Touraine, et ung très bon lieu et fertil et ouquel [p. 267] demeurent et sont residens plusieurs gens, et aussi y passent, frequentent et conversent chacun jour plusieurs marchans et autres gens qui vont et viennent tant par ledit pays de Touraine, Poictou que Anjou, de lieu en autre, ès foyres et marchez qui y sont ; à laquelle cause ledit suppliant et afin que ou temps avenir ledit lieu, bourg et village de Montdion ne se depopule et viengne à ruyne et desolacion par faulte d’estre frequenté et habité tant par ceulx qui à present y sont residens et demourans que autres qui chacun jour y pourroient repairer ou temps avenir, s’il y avoit aucunes foires et marchez, nous a supplié et requis que nostre plaisir et vouloir feust, pour à ce obvier, de luy donner et octroyer doresenavant, par chacun an, audit lieu de Montdion trois foyres et ung marché, pour y estre tenuz doresenavant perpetuellement et à tousjours, c’est assavoir lesdictes trois foyres aux jours saint Sebastian, la première, saint Siste, la seconde, et saincte Ragonde, la tierce, et ledit marché au jour de mardi chacune sepmaine, depuis le premier mardi de Caresme jusques au mardi devant la saint Martin d’iver. Pour ce est-il que nous, inclinans favorablement à la supplicacion et requeste dudit suppliant, recors et memoratifz de plusieurs grans services à nous faiz, tant par feu Tristan L’Hermite2, chevalier, en son vivant nostre prevost [p. 268] des mareschaux, son père, que par ledit suppliant et autres ses parens, ou fait de noz guerres et ailleurs, font continuellement chacun jour et esperons que encores plus facent ou temps avenir, et en remuneracion et recompense d’iceulx, et que à quatre lieues à la ronde dudit lieu de Montdion n’a aucunes foires audit jour, à qui elles puissent prejudicier, mais est le bien de nous, de la chose publicque et dudit suppliant ; pour ces causes et autres à ce nous mouvans, et aussi en faveur desdiz services, avons octroyé et octroyons de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, voulons et nous plaist que audit lieu de Montdion ait et se tiengnent doresenavant à tousjours mais perpetuellement par chacun an lesdictes trois foyres et la marché chacune sepmaine et ausdiz jours saint Sebastian première, saint Sist la seconde et sainte Ragonde la derrenière et ledit marché ledit jour de mardi chacune sepmaine à commancer audit premier mardi de karesme entrant jusques audit mardi devant la saint Martin d’iver après ensuivant. Et lesquelles foyres et marché nous y avons de nostredicte grace et auctorité royal crées (sic) et erigées, de nouvel creons et erigeons par ces mesmes presentes, pourveu toutesvoies que ausdiz jours n’ait aucunes foyres à quatre lieues à la ronde dudit lieu de Montdion, et que lesdictes foyres et marché ne soient prejudiciables à nous ne à la chose publicque ne que noz droiz et devoirs n’en soient ne puissent aucunement estre diminuez. Si donnons [p. 269] en mandement par cesdictes presentes aux bailly de Touraine, [juge] des ressors et exempcions d’Anjou et du Maine, seneschaulx de Poictou, Xantonge, gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers ou à leurs lieuxtenans et à chacun d’eulx, si comme à luy appartiendra et que requis en sera, que icelluy suppliant et ses hoirs et successeurs et qui de lui auront cause et habitans dudit lieu de Montdion ilz facent, seuffrent et laissent doresenavant joyr et user de noz presens grace et octroy, ainsi et en la forme et manière que font autres ayans semblables foyres et marchez, en faisant lesdites foires et marché crier et publier audit lieu de Montdion et ailleurs ou mestier sera et les facent entretenir doresenevant à tousjours, sans faire ne souffrir aucune chose estre faicte au contraire. Et afin que ce soit chose ferme et estable à tousjours mais, nous avons fait mettre nostre seel à cesdictes presentes. Sauf toutesvoyes en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes. Donné au Plesseiz du Parc près Tours, ou moys de mars, l’an de grace mil cccc. soixante dix huit et de nostre règne le xviiie, avant Pasques.

Ainsi signé : Par le roy, le gouverneur de Daulphiné, Mes Raoul Pichon, Jacques Louet3 et autres presens. J. Duban. — Visa. Contentor. Rolant.


1 Pierre L’Hermite, seigneur de Moulins, de Mondion, de Beauvais et du Bouchet, panetier de Louis XI et l’un des cent gentilshommes de sa maison, était fils de Tristan, le grand prévôt du roi, comme on le rappelle quelques lignes plus loin, et de Guillemette de Mondion, qui avait apporté à son mari et transmis à son fils aîné cette terre et seigneurie du Châtelleraudais. Il fit don au couvent des Cordeliers de Châtellerault, dans l’église duquel il est enterré, du droit qui lui appartenait au Port-de-Piles et vivait encore le 10 juillet 1498. A cette date, il fit hommage au roi de sa terre et seigneurie du Bouchet mouvant du château de Niort. (Arch. nat., P. 5543, cote iiiclvi bis.) De sa première femme, Marguerite Goulart, dame de Loussenay, il eut Louis, qui lui succéda dans les seigneuries de Moulins, Mondion et Beauvais et épousa Jeanne de Châteaupers, dame de la Chevalerie, fille de Jean de Châteaupers, sr de Massigné et d’une autre Marguerite Goulart (voy. notre dixième vol., Arch. hist., t. XXXV, p. 6, note) ; et la seconde, Jeanne du Fau, fille de Jean, seigneur du Fau en Touraine (l’abbé Lalanne dit du Sau, Hist. de Châtellerault, t. I, p. 448) lui donna trois filles. (Voy. le P. Anselme, Hist. généal., t. VIII, p. 136.)

2 Le fameux grand prévôt de Louis XI eut pour père Jean L’Hermite, seigneur de Moulins-sur-Charente, et pour mère Marguerite Sigonneau, dame du Bouchet près le Blanc en Berry, si l’on en croit le P. Anselme (loc. cit.). Peut-être Jean fut-il marié deux fois, mais ce qui est établi par deux actes authentiques c’est qu’il était seigneur du Bouchet, mouvant de Niort, à cause de Catherine Corgnol, sa femme. Il en fit aveu à Jean, duc de Berry, comte de Poitou, le 22 novembre 1405, et le renouvela à Charles dauphin alors comte de Poitou en 1418. (Arch. nat., P. 1144, fol. 44 v° ; R1* 2172, p. 1073.) Quant à Tristan, on connaît mieux sa carrière et les charges qu’il remplit ; conseiller et chambellan du roi, commis par le connétable de Richemont à l’office de maître de l’artillerie de France, il s’en démit au bout de peu de temps, se réservant celui de prévôt des maréchaux qu’il exerça, sous Charles VII et, on sait avec quel crédit, sous Louis XI. Il avait été fait chevalier par Dunois à la prise de Fronsac (1451). Le 25 mai 1436, Jean de La Rivière, maître en médecine, se disant légitime possesseur de la maison forte de « Ramonat » (sans doute Remonet) en la vicomté de Châtellerault, poursuivait au Parlement de Poitiers Tristan L’Hermite, qui s’en était emparé sans aucun droit, affirmait le demandeur. (Arch. nat., X1a 9193, fol. 138 v° ; X1a 9194, fol. 135.) Tristan avait épousé Guillemette, dame de Mondion, fille de Renaud de Mondion, seigneur de Beauvais, dont il eut deux fils : Pierre, qui fait l’objet de la note précédente et Jean qui, son neveu Louis étant décédé sans enfants, devint le chef de la famille. On ignore la date de la mort de Tristan L’Hermite. L’acte le plus récent émanant de lui cité par le généalogiste (op. cit.) est du 17 juin 1475, et l’on voit ici qu’il avait cessé de vivre avant le mois de mars 1479 n.s.

3 Sur Raoul Pichon et Jacques Louet, cf. ci-dessus, p. 185 et 266, notes.