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MDCLXXXVIII

Don de tout droit de château, châtellenie et haute justice en la seigneurie de Monts, mouvant du roi à cause de Loudun, en faveur de Pierre de Brillac, chevalier, chambellan du roi, seigneur dudit lieu.

  • B AN JJ. 208, n° 179, fol. 106, v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 444-447
D'après a.

Loys, etc. Savoir faisons à tous presens et avenir que, pour consideracion et recongnoissance de plusieurs bons et agreables services que nostre amé et feal conseiller et chambellan Pierre de Brilhac, chevalier, seigneur de Mons et d’Argé1, et autres ses prouchains parens et amis Nous [p. 445] ont faiz par cy devant en plusieurs manieres, font encores chascun jour et esperons que plus face cy après le temps avenir, à icellui Pierre de Brilhac, pour ces causes et consideracions et autres à ce Nous mouvans, et mesmement en faveur et à la requeste de nostre cher et bien amé Charles de Brilhac, escuier, filz ainsné dudit Pierre de Brilhac, qui sur ce Nous a humblement suplié et requis, avons, de nostre propre mouvement, certaine science, grace especial, plaine puissance et auctorité royal, donné, cedé, transporté et delaissé, donnons, cedons, transportons et delaissons par ces presentes, tout droit de chastel, chastellenie et haulte justice que Nous avons et qui Nous peut et doit appartenir en sadicte terre et seigneurie de Mons et ses appartenances et deppendances, tenue et [p. 446] mouvant (sic) de Nous à cause de nostre seigneurie de Lodun, en laquelle ledit Pierre de Brilhac avoit et a la justice et juridicion moienne et basse seullement, pour d’icellui droit de chastel, chastellenie et haulte justice et de tous les droiz, honneurs, prerogatives, preeminences, prouffiz et emolumens qui en deppendent et pevent deppendre, joir et user, ensemble et avecques lesdictes justice et juridicion moienne et basse, par ledit Pierre de Brilhac, ses hoirs, successeurs et ayans cause, seigneurs dudit lieu de Mons, joir et user d’ores en avant perpetuellement et à tousjours en ladicte terre et seigneurie de Mons, appartenances et appendances d’icelle, en leur donnant povoir, faculté et puissance et auctorité, pour l’excercice d’icelle haulte justice, de eriger ou faire eriger, tenir et avoir à perpetuité justices et fourches patibulaires et autres choses concernans et demonstrans les droiz de haulte justice, et de creer et establir en ladicte terre et seigneurie de Mons bailli, prevost, chastellain, gardes de seaulx, sergens et autres officiers requis et necessaires pour l’excercisse de ladicte haulte justice et droit de chastellenie, sans riens retenir ne reserver d’icelle haulte justice pour Nous et les nostres, fors seullement les foy et hommaige à Nous et à noz successeurs roys de France à cause de nostredicte seigneurie de Lodun et le ressort et souveraineté. Si donnons en mandement à noz amez et feaulx les gens de noz comptes à Angiers, tresoriers de France, au bailli d’Anjou et à tous noz autres justiciers et officiers, que ledit Pierre de Brilhac et sesdiz hoirs, successeurs et ayans cause ilz facent seuffrent et laissent joïr et user plainement et paisiblement de noz presens don, grace, puissance, faculté, octroy et choses dessusdictes, sans leur faire ne souffrir estre fait aucun destourbier on empeschement au contraire. Et par rapportant ces presentes signées de nostre main ou vidimus d’icelles fait soubz seel royal et recongnoissance sur ce souffisant dudit Brilhac pour une [p. 447] foiz tant seullement, Nous voulons nostre receveur ordinaire de Lodun, present et advenir, en estre et demourer quicte et deschargé par nosdiz gens des comptes et partout ailleurs où il appartiendra ; ausquelz Nous mandons ainsi le faire sans dificulté. Car ainsi Nous plaist-il estre fait, nonobstant quelzconques ordonnances, restrinctions, mandemens ou deffences à ce contraires. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Vendosme, ou mois de juillet, l’an de grace mil cccc. quatre vings et ung, et de nostre regne le vingtiesme2.

Ainsi signé : Par le roy. G. Briçonnet ; et au dedans de la marge, Loys. — Visa. Contentor. Texier.


1 Pierre de Brillac, chevalier, seigneur de Monts en Loudunais et d’Argy en Berry, était le fils aîné de Pierre, seigneur d’Argy, et de Jeanne Odart, dame de Monts. On conserve de ce personnage qualifié alors écuyer « seigneur d’Argé et de Mons », sous la date du 19 mai 1449, trois aveux et dénombrements rendus à René duc d’Anjou, comme seigneur de Loudun : 1° pour le lieu de terre et appartenances du Bois-follet (auj. Bafollet, paroisse de Martaizé), « qui est demoly en ruyne et en mazerils depuis le temps des autres guerres » ; 2° pour son hôtel du petit Crouail (Crouailles, paroisse de Monts-sur-Guesnes) ; 3° pour plusieurs rentes de froment, chapons et gélines, « lesquelles rentes partirent ja piecza du fief de Roche-Rigaut. » (Arch. nat., P. 3412, fol. 34, 35, 37). Depuis le 16 mai 1461 jusqu’au 13 avril 1468, on le trouve engagé au Parlement dans un long procès contre Antoine de Prie, seigneur de Buzançais, ses officiers et autres complices, pour obtenir d’eux réparation des outrages et sévices dont ils s’étaient rendus coupables envers lui. Il serait peu intéressant d’entrer dans le détail de cette procédure ; aussi nous nous contenterons de citer les cotes des nombreux mandements, arrêts interlocutoires, plaidoiries, et autres actes, et de résumer l’arrêt définitif, du 13 avril 1468. Convaincu d’avoir à plusieurs reprises fait envahir par ses gens armés, conduits par son propre fils, le château d’Argy pour s’emparer de bois litigieux entre eux, d’avoir, lors de l’une de ces attaques, frappé et blessé grièvement Pierre de Brillac, à la tête, au cou et sur d’autres parties du corps, Antoine de Prie est condamné à reporter à Argy le bois dont il s’était indûment emparé, à payer 2.000 livres tournois à sa victime, à titre de dommages et intérêts, et deux autres mille livres d’amende au roi ; ses complices étaient tenus de faire amende honorable à Pierre de Brillac, tant au Palais à Paris qu’à Argy, à genoux, tête et pieds nus, tenant à la main chacun une torche de cire allumée du poids de quatre livres, à lui demander pardon et merci et à lui payer chacun cent livres d’amende et autant au roi. De plus Pierre de Brillac était délié de toute foi et hommage envers le seigneur de Buzançais, de qui avait relevé jusque-là la seigneurie d’Argy, et, soustrait lui et ses successeurs à toute juridiction que pourraient prétendre Antoine de Prie et ses descendants. (Arch. nat., X2a 36, fol. 21 v°. Voy. aussi X2a 21, aux dates des 7 mai et 16 juin 1461 ; X2a 30, fol. 46 v° 77 et 343 ; X2a 31, fol. 47 ; X2a 32, aux dates des 27 avril, 3 mai, 23 juillet et 19 août 1462, 25 janvier, et 10 février 1463 n.s., 17 et 20 avril et 6 septembre 1464 ; X2a 34, fol. 60 v° ; 168 v° ; X2a 36, fol. 182 v°.)

Marié à Anne de Tranchelion, fille de Guillaume, chevalier, seigneur de Paluau, et de Guillemette des Roches, Pierre de Brillac, devenu chambellan du roi, comme il est qualifié dans les présentes lettres, en eut trois fils : Charles, nommé plus tard, dans le présent acte, après lui seigneur d’Argy et de Monts, écuyer d’écurie du roi, capitaine du château de Loudun en 1490, mort à Milan en juin 1509 ; Christophe, qui fut abbé de Saint-Père de Chartres, évêque d’Orléans, en 1504, puis archevêque de Tours, en 1515 ; Jean, chef de la deuxième branche de Brillac ; et deux filles Madeleine et Marquise. (Beauchet-Filleau, Dict. des familles du Poitou, 2e éd., t. I, p. 777.)

2 Les présentes lettres furent enregistrées aussi au Parlement de Paris, le 14 décembre 1481. (Arch. nat., X1a 8608, fol. 3), et à la Chambre des comptes sur l’ancien mémorial coté R, fol. 50. (Mention dans Bibl. nat., ms. fr. 21.405, fol. 223.)