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MDCLXXVI

Rémission accordée à Jean Rouaud et à Jean Brisseteau, jeunes gens de la paroisse de la Petite Boissière poursuivis devant le sénéchal de Mauléon pour les mêmes faits.

  • B AN JJ. 207, n° 9, fol. 5
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 407-410
D'après a.

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir, nous avoir receue l’umble supplicacion de Jehan Rouaud et Jehan Brisseteau, hommes de braz, demourans en la paroisse de la Petite Boissière, contenant que le derrenier jour de decembre derrenier passé se assemblèrent ledit Jehan Rouaud, supliant, bachelier de ladicte parroisse de ladicte Petite Boissière et non marié, avecques les autres bacheliers d’icelle parroisse en la maison on grange du prieur de la Petite Boissière, pour aller par les villaiges de ladicte parroisse et autres illecques près, pour congregier et amasser les aulmosnez et dons des demourans ès diz villaiges, lequel don on appelle aguylanneuf. Et fut ladicte assemblée des bacheliers faicte jusques au nombre de sept jeunes gens, dans aucun mauvaix propoux ne machinacion de mal faire à personne ; a laquelle assemblée ledit Jehan Brisseteau, qui avoit esté requis par lesdiz bacheliers d’aller audit aguylanneuf avec ung menestrier. Lesquelx supplians et leurs compaignons, après desjeuner et dès le matin, accompaignez dudit menestrier, allèrent par laditte parroisse et villaiges estans illec près. Et pour ce que les bacheliers de la parroisse de Rorretoys, qui est une autre parroisse à part avoient acoustumé les oultrager, en faisant ladicte queste, pour obvier qu’ilz ne feussent batuz et pour eux deffendre ou cas qu’ilz feussent assailliz, chacun des bacheliers de la Petite Boissière prindrent en leurs mains [p. 408] ung baston. Et quant ilz furent près d’un russeau appellé Fonteneau, ilz virent venir contre eulx les bacheliers dudit Rorretoys, qui estoient en nombre de xiii. ou xv. qui avoient avecques eulx ung menestrier et avoient chacun d’eulx en leurs mains ung gros baston ; lesquelz bacheliers dudit Rorretoys, quant ilz eurent veu et apperceu les bacheliers de la Petite Boissière firent grant criz et à haulte voix et allèrent contre lesdiz supplians et ses compaignons, avecques lesquelz estoit Mathurin Asserin, autrement dit le bastard, qui est homme marié et non pas du nombre et estat des bacheliers, lequel avoit en sa main ung gros baston. Tous lesquelx bacheliers de Rorretoys et ledit bastard à haulte voix et impetueusement demanderent aux bacheliers de la Petite Boissière : « Donnez-nous aguilanneuf ; » mais pour ce que lesdiz aguilanneuf et aulmosnes ont acoustumé estre vendues et livrées au plus offrant et derrenier encherisseur par les bacheliers de la Petite Boissière et que les deniers de la vendicion ont acoustumé estre employez à l’entretennement d’une lampe et xv ou xvi lamperons estans en ladicte eglise de la Petite Boissière, lesquelz sont allumez et ardent à chacune feste sollennelle, aussi ladicte lampe tous les dimenches, les bacheliers de ladicte Petite Boissière reffusèrent leur bailler aguillanneuf par eulx demandé. Et à ceste cause ledit bastard qui est plain de son couraige, dist que se lesdiz bacheliers de la Petite Boissière ne leur bailloient aguilanneuf, qu’ilz prandroient et osteroient des rilles, oreilles de porceau et autres pièces de char que lesdiz bacheliers de la Boissière avoient en une broche de bois et estoient les aulmones et aguilanneuf donnez par les bonnes gens, demandez et amassez par lesdiz bacheliers ; et pour ce qu’ilz furent de ce faire reffusans, ledit bastard s’efforça de leur oster et d’un baston qu’il avoit en sa main donna sur la teste dudit Brisseteau, à quoy ledit Brisseteau obvia et se tira arrière ; mais incontinant André Chapperon, l’un desdiz [p. 409] bacheliers de Rorretoys s’efforça frapper ledit Brisseteau d’un baston qu’il avoit en sa main, gros comme une verge de fleau, qu’il avoit prins entre les mains de Gillet Delavau et lui en donna sur les espaulles.

Et de rechef ledit bastard leva ung baston et en donna sur la teste dudit suppliant tellement qu’il le tumba à terre ; mais il se releva et en soy relevant donna la resource du baston qu’il avoit sur la teste dudit bastard, dont il tomba à terre et d’icellui coup lui fist sang et playe, ainsi chaudement et comme fort esmeu et desplaisant du coup qu’il avoit eu, frappe dudit baston incontinent Vincent Moreau sur la teste, dont il tumba à terre, lui fist sang et playe. Desquelles basteures les dessusdiz bastard et Moreau, aussi ledit Chapperon n’eurent aucune mutillacion au moins dangereuse de mort et sont leurs playes garies. Entre lesquelz bacheliers de la Petite Boissière, comme dit est, estoit ledit Rouaud, auquel pendant lesdictes questions esmeues par lesdiz bastard et bacheliers dudit Rorretoys et qu’ilz eussent commancé à frapper, fut donné d’un baston sur la teste, tellement qu’il tumba à terre ; et lui redresé, de la broche de bois qu’il avoit en sa main, en laquelle estoient lesdictes villes, frappa sur la teste d’un des enfans de Jehan Bonny, duquel autrement ne scet le nom ; et ce fait, Vincent Moreau, l’un desdiz bacheliers dudit Rorretois, donna d’un gros baston qu’il avoit sur la teste dudit suppliant tellement qu’il tumba à terre, cuidant estre mort, mais il se redressa et derechief de ladite broche donna sur la teste dudit Moreau, tellement qu’il tumba à terre. Ausquelles questions et debatz estoit present Regné Gaudin, lequel lesdiz supplians ne frappèrent ne batirent, et ne donnèrent conseil, confort ne aide de le frapper ne batre ; aussi ne le virent frapper par aucuns des bacheliers de la Petite Boissière ; bien le virent mutillé très fort [a] la teste, de laquelle blesseure et mutillacion, dedans ung jour naturel il alla de vie à trespassement. A l’occasion duquel cas lesdiz [p. 410] supplians se sont absentez, après ont esté adjournez à comparoir en personne par devant le seneschal de Mauleon ou son lieutenant, et illecques ont deffailli de trois assignacions on adjournemens à eulx baillez ; et a le procureur de la cour dudit lieu fait saisir et mettre en la main de le comte de Mauleon tous et chacuns les biens desdiz suplians et iceulx fait mettre en inventoires. Et n’oseroient jamais iceulx supplians converser ne repairer au païs, pour doubte de justice, se noz grace et misericorde ne leur estoient sur ce imparties, humblement requerant iceulx. Pourquoy nous, etc., voulans, etc., auxdiz supplians avons quicté, remis et pardonné le fait et cas dessusdit, avec toute peine, etc. Et les avons restituez, etc., satisfacion, etc. Et sur ce imposons, etc. Si donnons en mandement au seneschal de Poictou et à tous, etc. Et afin, etc. Sauf, etc. Donné à Chinon, ou mois de fevrier l’an mil cccc quatre vings, et de nostre règne le vingtiesme.

Ainsi signé : Par le roy, à la relacion du Conseil. Villechartre. — Visa. Contentor. Texier.