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MDCCXLIII

Confirmation du don de huit cents livres de rente sur la vicomté de Châtellerault, fait à Marguerite de Calabre, par Charles d’Anjou, roi de Sicile et de Jérusalem, comte du Maine, vicomte de Châtellerault, par son testament.

  • B AN JJ. 210, n° 8, fol. 7 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 41, p. 615-617
D'après a.

Loys, etc. Savoir faisons à tous, presens et avenir nous avoir receue l’umble supplicacion de nostre chère et amée cousine, Margarite de Calabre1, fille naturelle de feu nostre filz et cousin Nicolas d’Anjou, en son vivant duc de Calabre et de Lorraine2, contenant que depuis le trespas de nostre dit feu filz et cousin le duc Nicolas, feu nostre cousin Charles d’Anjou en son vivant roy de Jherusalem et de Scecille, conte de Prouvence et viconte de Chastellerault a fait nourrir et entretenir ladicte suppliante en son hostel, en la compaignie de feue3 nostre cousine Jehanne de Lorraine, sa femme et tousjours l’a entretenue et honnestement fait po[ur]voir de ce qu’il lui a esté necessaire, et jusques à l’eure de son trespas ; lequel soy voyant malade, dont il est allé de vie à trespas, fist son testament et ordonnance de derrenière voulenté, par lequel, entre autres choses, pour certaines causes à ce le mouvans, masmement considerant que icelle suppliante estoit demourée orpheline en bas aage, despourveue de tout bien, sans avoir heritaiges ne autres biens dont elle peust vivre ou temps avenir, ne de quoy entertenir son estat, selon le lien et lignaige dont elle est yssue, lui donna et delaissa, [p. 616] pour elle, ses hoirs, successeurs et ayans cause a perpetuité la somme de huit cens livres tournois de rente annuelle et perpetuelle, à l’avoir et prendre sur les rentes et revenues des ville et viconté de Chastellerault. Et avec ce lui donna tous les joyaulx, dyamans et autres pierres demourées par le décès et qui estoient et appartenoient à sa dicte feue femme, laquelle estoit decedée paravant, ainsi que des diz don et laiz nous est apparu par ledit testament, dont la teneur de la clause et article, extraict d’icellui, faisant de ce expresse mencion s’ensuit et est telle.

« Item eciam legavit sive relinquit nobili domicelle Margarite de Calabra, filie naturalis eterne memorie domini Nicolay ducis Calabrie et Lothoringie, ac suis heredibus et successoribus quibus cumque per imperpetuam, octingentas libras turonensium, habendas, exigendas, recipiendas et recuperandas annuatim in et super denariis juribus et reditibus vice comitatus Castri Ayraudi. Item, jocalia supra dicte condam domine nostre regine Johanne, videlicet les diamans et ceteros lapides preciosos. »

Et après plusieurs autres dons et laiz faiz par ledit feu Charles, nostre cousin, il nous fist et institua sun heritier seul et universal ; au moien de laquelle institucion et autrement ledit viconté de Chastellerault, ensemble les rentes, droiz et revenues d’icellui nous sont advenues et escheues, et à ses tiltres et moiens en avons prins et apprehendé la possession. Et depuis, non advertiz et informez desdiz don et laiz faiz à nostre dicte cousine, suppliant, avons donné, aumosné et admorti aux chanoines et chappellains par nous nagueres fondez en nostre maison des Montiz les Tours4, en l’honneur de monseigneur [p. 617] Sanct Jehan, apostre et envangeliste, certaines grans rentes et revenues sur ladicte terre, seigneurie et viconté de Chastellerault, et leur en avons fait faire assiete. A laquelle cause icelle supliant n’a peu ne peut avoir, prendre ne parcevoir lesdiz huit cens livres tournois à elle données et laissées par la manière dessus dicte ; et doubte qu’elle n’en puisse joir, et que à ce moien elle demeure depourveue de sa vie, qui seroit chose piteable, se de nostre grace ne lui est aidé et secouru ; en nous humblement requerant et suppliant que nostre plaisir soit la faire joir desdiz don et laiz selon l’intencion que ledit deffunct l’a voulu et ordonné par son dit testament et derrenière voulonté. Pour quoy nous, voulans lesdiz don et laiz faiz à nostre dicte cousine suppliant sortir leur plain et entier effect et entretenir5


1 Sur Marguerite de Calabre, fille naturelle de Nicolas d’Anjou, mariée à Jean de Chabannes, fils d’Antoine de Chabannes, comte de Dammartin, voy. le P. Anselme, Hist. généal. de la Maison de France, t. I, p. 234, et La Chesnaye des Bois, Dict. de la noblesse, t. IV, col. 961. [L.C.]

2 Sur Nicolas d’Anjou, marquis de Pont, duc de Calabre et de Lorraine, voy. Arch. hist. du Poitou, t. XXXVIII, p. 250. [L.C.]

3 Sur Charles d’Anjou, voy. ci-dessus, (MDLXIII). [L.C.]

4 Le chapitre, ou église collégiale, appelé aussi Sainte-Chapelle, des Montils ou du Plessis du Parc, placé sous le vocable de saint Jean l’Évangéliste, fut fondé au château du Plessis par lettres patentes de Louis XI, données audit lieu du Plessis, au mois de novembre 1484 ; par autres lettres datées des Montils-les-Tours, mai 1483, le roi déclara que la collégiale comprendrait vingt chanoines, et la dota de 4.000 livres de rentes. Ces lettres furent enregistrées au Parlement de Paris, le 29 juillet 1483. (Arch. nat., X1a 8608, fol. 19 v°, 196.)

5 La transcription de ces lettres est restée ainsi inachevée ; le registre, à la suite, porte un blanc d’une page et deux tiers. Le texte n’en a pas été enregistré au Parlement. Nous lui donnons la date de juillet 1483 parce qu’elles se trouvent au milieu d’autres actes tous de cette date. D’après M. Lalanne (Hist. de Châtellerault, t. I, p. 308), Marguerite consacra, sur les 800 livres léguées par son oncle, 160 livres à la fondation d’une messe à l’église collégiale Notre-Dame de Châtellerault, par acte du 2 septembre 1488. Il y avait eu même, au sujet de cette fondation, un procès entre les héritiers de Marguerite et le chapitre de Notre-Dame, procès dont je n’ai trouvé nulle trace dans les tables des procès du Parlement, aux Archives nationales. [L.C.]